Riverstone – Nagarya

Dynamite, 124 pages.

Riverstone - NagaryaUne planète exotique, des voyageurs se baladant gaiment cul nul, les tentations sont fortes, des créatures bien humaines et ouvertes sur place…l’histoire, quelle histoire ? On s’en fout, les images seules apportent la satisfaction de l’outrageante et moite sensualité. Ésotérique, intensément sexuel, Nagarya ne laisse point indifférent.

Il était une fois…

Après un périple spatial dont on ne sait pas grand chose, quatre voyageurs atterrissent sur une planète à la végétation touffue et apparemment vierge de toute faune. Alors que se pose la question des relations entre les compères (trois hommes pour une femme) et qu’ils foulent du pied le nouveau monde, il appert que d’autres individus l’occupent déjà.

Critique de Nagarya

Voilà le genre de petit ovni littéraire que le Félin affectionne. Déjà, l’auteur, Bernard Kamenoff, un Français ayant vécu pas bien loin de la ville de votre serviteur et dont je ne savais absolument rien. Le gars doté d’un style que l’on peut difficilement confondre avec un autre auteur, et qui a mis un certain temps à pondre une œuvre majeure, laquelle peut sembler plus que confuse malgré un scénario montant progressivement en intensité – dommage, les dernières pages annonçaient quelque chose de plus « pêchu ».

Ensuite, l’histoire, qui a un effet doublement agaçant. D’une part, ça traine salement en longueur. Une planète pseudo-déserte, d’accord. L’exploration par l’équipage – composé d’un couple en formation – entrecoupée de quelques séances de touche-pipi pas bien méchantes, pourquoi pas. Lorsqu’apparaissent de sublimes créatures humaines sensuelles et apeurées, le félin n’a plus compté les pages où les héros tentent de comprendre ce qu’il se passe…sans compter qu’il n’y a qu’un seul mâle (fort bien monté il faut en convenir) parmi les autochtones, et que ce dernier a jeté son dévolu sur la belle Annie tout en refusant de partager son harem. Et je ne vous parle pas du fameux « Nagarya » (enfin si, dans le chapitre suivant), terme prometteur mais dont l’exploitation est notoirement insuffisante.

D’autre part, Riverstone semble être friand de flashbacks fort verbeux, notamment au sujet de la préparation de la mission spatiale, et plus particulièrement sur la sélection d’Annie Wellington. Une jeune blonde un tantinet volage qui, avant même le départ, fait perdre la tête à son futur capitaine. Une tête de gamine posée sur un corps esquissé pour faire l’amour. Hélas, ces avant-propos n’éclaircissent en rien la narration (le schmilblick n’avance guère), voire ajoutent au désordre ambiant. Comme si les idées jaillissaient au petit bonheur la chance dans l’esprit d’un Riverstone aussi pressé que foutraque, sans avoir le temps de tout poser à plat et reprendre une BD ambitieuse depuis le début.

Cependant, avouons-le, ce n’est pas vraiment le déroulement de l’intrigue qui ravira le lecteur. Oh que non. Plutôt le dessin, d’un érotisme porno-chic lumineux et luxuriant. Les quatre hommes (Johnny, Jean et Mongo suivi du sauvage surmembré) musculeux et aux faciès entreprenants, dotés d’attributs veineux d’un réalisme troublant. Annie bien sûr, sensuelle en diable et roulant du derche avec des airs de midinette à damner plus d’un saint. Mais, surtout, les « sauvageonnes » locales, toutes brunes comme pour rompre avec le charme d’Annie, immensément félines lorsqu’elles rampent (il n’y a pas d’autre verbe adéquat) autour des héros, la vulve rasée déjà ouverte et les doigts baladeurs. La puissance animale est telle qu’il pourrait venir à l’esprit du lecteur des sentiments vaguement xenophiles.

Pour conclure, voici une bande dessinée qui fera davantage appel à votre cerveau reptilien qu’à la logique la plus élémentaire. En effet, nul indice sur la période, les raisons d’un départ vers cette planète, ou encore les menues problématiques de toute exploration. Juste les courbes intenses des demoiselles, et les queues continuellement raides (ils ne débandent jamais les salauds) de ces messieurs.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

Trois hommes et une femme dans un lieu perdu. Un quatrième larron enlevant la seule femelle blonde présente. Entre l’histoire romaine (l’épisode peu glorieux des Sabines) ou celle contée par la bible, difficile de s’y retrouver. Annie serait-elle une nouvelle Eve, comme le quatrième de couverture le laisse suggérer ? Il est vrai que les références bibliques sont nombreuses, particulièrement le thème de la tentation éternelle contre laquelle lutter est bien vain : la pomme de l’ancien testament est ici la somptueuse croupe que l’héroïne agite constamment devant le nez de Johnny, lequel n’en peut plus de la frotter avec son gland et culpabilise de pénétrer la tendre chair de son aguicheuse partenaire. Cette dernière s’abandonne sans peine à l’indigène dans les arbres – la référence à Tarzan est aisée -, sans se rendre compte que ses absences charnelles sonnent, pour les explorateurs, le glas de leur survie.

Au-delà de ces tergiversations pornographiques, le titre mérite que l’on s’y attarde. Nagarya. Le mot ultime, le verbe puissance, dont la seule évocation fait paniquer les amazones. Pourquoi donc ? C’est là que l’ouvrage aurait pu devenir très intéressant : Nagarya a tout l’air d’être le nom de la ville dépeuplée qu’aperçoivent nos héros, une cité d’où sont issus quelques guerriers commettant de terribles exactions sur les « femelles » locales. S’alliant avec elles, l’équipe engage un début de réponse contre cette civilisation déchue, tout en s’approchant d’une découverte – qu’on pressent mais qui restera à l’état de suppositions. Cette alliance contre la technique guerrière et ses tortures élaborées ont tout d’une sorte de renaissance de la nature contre les « restes » d’une civilisation qui semble avoir fait montre de son ignominie – la nouvelle humanité, menée par Eve/Annie, serait en marche ?

…à rapprocher de :

– S’agissant de l’aspect purement visuel des corps lascifs s’abandonnant aux multiples plaisirs, je ne saurai trop vous conseiller les titres de Giovanna Casotto (tels Giovanissima, en lien) ou L’internat féminin (toujours en lien), de Magnus.

– Chose curieuse, un des personnages a tout d’un certain John C. Holmes, que ce soit sa bouille ou la taille de sa bite. A ce sujet, un court essai en lien pour connaître ce fameux acteur…

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman graphique en ligne ici.

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