Adam Roberts – Gradisil

Folio SF, 769 pages.

Adam Roberts - GradisilVO : idem. Roman intéressant sans être décoiffant. Gradisil, femme au nom tout nordique, est à l’origine de la création d’une nation particulière, sur fond de tensions entre l’UE (enfin une vraie fédération) et les EUA. En plus du roman de hard science qui est livré, c’est toute la construction politique et diplomatique d’un État pas comme les autres qui est abordée, même si c’est parfois très manichéen.

Il était une fois…

De 2060 à 2150 environ, trois générations de femmes vont irrémédiablement bousculer le paysage mondial. Si au début avoir son habitat dans l’espace était considéré comme un caprice de milliardaire, très vite le nombre de personnes dans les cieux a exacerbé le « vide » juridique et fiscal de ce nouvel État en suspension. Quand les grandes puissances s’en mêlent, la marche vers la reconnaissance sera plus dure que prévu.

Critique de Gradisil

Le Tigre a assez peu de souvenirs au final de ce roman. Sur près de 800 pages il y a eu des passages sublimes (une personne qui tombe dans l’atmosphère depuis l’espace notamment) comme des pages et des pages sans grand intérêt qui passeront vite à la trappe de vos neurones.

L’intrigue est belle, crédible et toute en longueur puisque sur 150 ans nous suivrons pas moins de quatre protagonistes acteurs de l’émergence d’une nation. Dans un futur proche, Européens et Américains s’affrontent alors qu’au dessus de leurs têtes des habitats se construisent et échappent à leur contrôle. C’est là que l’auteur a plutôt bien bossé son sujet quand il aborde les conséquences politiques et juridiques de la création d’une sorte d’Islande dans l’espace.

Hélas Adam Charles Roberts fait parfois montre de facilité quand il présente les Américains, très cons et brutaux dans leur approche par rapport aux Européens qui soutiennent la démarche de Gradisil. Un poil stéréotypés nos États-Unis tout en conquête, l’auteur n’avait pas besoin de ces démonstrations de « busheries » pour que le lecteur comprenne la géopolitique des acteurs.

En revanche, la psyché, les sentiments de ces individus sont magnifiquement décrits, sans pathos excessif, en particulier un homme qui malgré lui va trahir la femme qu’il aime ou encore un viol en apesanteur. L’idée de suivre des générations d’une même famille est bien exploitée, on sent qu’on a affaire à une lignée d’exception, entièrement à l’image de l’aventure qui se déroule sous nos yeux.

Pour conclure, ouvrage excellent en particulier pour le juriste en droit de l’espace ou qui est curieux de voir comment on traite ces problèmes de « néant législatif ». Si la longueur de l’œuvre peut paraître excessive, c’est oublier le réalisme sans faille de l’auteur qui créer pour nous une nation en l’espace d’un siècle et demi.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

Le nationalisme et ses variantes. Outre les EUA toujours aussi belliqueux ou l’UE un peu plus « soft power », Adam Roberts nous invite à réfléchir sur la définition de nation « spatiale ». Tout d’abord ce sont des gens voulant être tranquilles et échapper à l’impôt de leur pays, ensuite une certaine solidarité naît entre eux. Gradisil, au final, propose de subsituer à la patrie la « matrie », penchant féminin et plus doux d’un pays.

Du coup, le roman tourne à l’anticipation politique : le matriotisme, c’est l’espace commun référence de ces pionniers qui ne sont pas attachés à une propriété car indéfinissable dans l’espace. Espace d’accueil et de liberté avec des droits et devoirs allégés. Un peu comme l’UE de Gradisil, fédération dont on aurait souhaité en savoir plus. Comme le lecteur aurait aimé savoir ce que penses les autres continents, ce qu’est devenue l’Asie, l’Amérique du Sud,… Comme s’ils n’existaient pas.

La guerre spatiale. Dès que les hostilités sont déclarés entre les habitats spatiaux et les EUA, place à la pratique. Les Américains souhaitent capturer Gradisil, cette dernière se cachant dans les différents habitats en changeant régulièrement de lieu. Ça vire vite au cauchemar des deux côtés : approvisionnements délicats et fatigue extrême d’un bord ; impossibilité de contrôler l’immense espace ou de chercher une personne très mobile de l’autre bord. Pas de conflit façon Moonraker avec Roger Moore, juste quelque chose de long et fastidieux.

…à rapprocher de :

– Sur une aventure spatiale racontée sur le (très) long terme, avec plusieurs générations qui se suivent, découvrons ensemble La guerre éternelle, de Joe Haldeman.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.

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