Charles Williams – Fantasia chez les ploucs

Folio Policier, 312 pages.

Charles Williams - Fantasia chez les ploucsVO : The Diamond Bikini [le rapport avec le titre français est en effet à des années lumières]. Presque un classique du genre mi-polar mi-comique américain du milieu du 20ème siècle, pour une fois remercions Gallimard qui laisse perdurer un tel auteur. Histoire qui n’en est pas vraiment une, en fait on s’en tape le coquillage lorsque confronté à cette brochette d’individus déjantés. A lire, ne serait-ce que pour l’auteur.

Il était une fois…

Au beau milieu des États-Unis, le p’tit Billy est témoin d’un joyeux bordel qui met la région dans tous ses états. En effet, une femme a disparu (la très pétillante Caroline) et une prime de 500 dollars est proposée pour sa capture. Entre son père Pop avec son alambic notoirement clandestin ou l’oncle Sagamore, en passant par les autorités dépassées par les événements, on hésite à qualifier le tout de foire du trône ou foire d’empoigne.

Critique de Fantasia chez les ploucs

Je me souviens encore de ce qui m’est passé par la tête après avoir fini ce roman : mouais, pas mal. Me suis bien marré, mais ce n’est pas mon univers…wait…écrit au milieu des années 50 ?? Oh mazette, ce mec est un petit génie ! Et oui, si le tout fait de temps à autre vieux jeu, on ne peut que saluer Williams d’avoir pondu quelque chose qui reste, de nos jours, encore si poilant à lire.

Je vais commencer sur le style, puisque l’auteur n’a rien trouvé de mieux que de nous présenter Fantasia chez les ploucs par le biais d’un enfant qui a à peine atteint l’âge de raison. Et c’est bien le seul à l’avoir, sa raison. Ainsi, sur 300 pages (assez denses, j’avoue avoir été content que ça se termine) nous penserons, verrons les choses comme le fait le jeune Billy. Or le mioche est l’observateur le plus immédiat grâce aux membres de sa famille qui vont se autant se jouer des lois que de leurs représentants (le shérif au bord de l’apoplexie notamment) .

Fantasia, car certains protagonistes (le père, mais surtout l’oncle capable de monter des affaires improbables) vont faire d’un coin tranquille une attraction qui n’a rien à envier au Woodstock des années 70. Des ploucs, enfin, car cela se passe dans la campagne profonde où le chaland moyen attiré par la recherche de la Caroline n’est pas vraiment un dandy.

Au final, la mayonnaise a plutôt bien pris dans mon esprit, c’est comme si on chopait le petit Nicolas par la peau du cul pour l’installer parmi quelques bouseux américains (sans l’aspect négatif) pendant une paire de jours.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

La candeur de l’enfance. Billy est loin d’être un benêt, et sa jeunesse donne un rythme revigorant au titre. Bah oui, presque il voit ça comme un grand jeu notre garçon. Du coup, ce qui m’a arraché quelques ricanements, ce sont les savoureux dialogues entre les grandes personnes : en présence du gamin dont ils savent qu’il ne bitera pas un mot, leurs conversations laissent quelques indices (le lecteur n’a nul besoin d’être mentaliste) augurant de l’ampleur des magouilles mises en place.

En effet, les petites arnaques en tout genre prennent ici une ampleur assez inédite. Paris de turf, petites distilleries clandestines, augmenter les prix lorsque la demande suit (le passage sur les prix des hamburgers est digne d’être relu), on est dans le trivial. Mais quand l’arnaque prend un tour inattendu et que des milliers de personnes suivent le mouvement, l’improvisation (en est-ce vraiment une ou tout était prévu?) de nos héros fait curieusement des miracles. Le fameux bon sens paysan, sans aucun doute, entre réalisme (par rapport à l’argent) et cynisme rigolard.

…à rapprocher de :

– De Charles Williams, j’ai rapidement parcouru L’ange du foyer ou Avec un élastique.

– A signaler l’adaptation sur grand écran, par Gérard Pirès, en 1970, de Fantasia chez les ploucs (même titre). Les conditions de tournage en Italie ou la gestion des acteurs (le gros Lino) / figurants fut un incommensurable bordel que Tigre se plait à rappeler. En vrac : arnaques transalpines, colères noires de Ventura, pour finir Pirès va cramer son décor afin d’éviter qu’un autre réalisateur le squatte pour tourner son western spaghetti. Des barres.

– Certains font le rapprochement avec Jusqu’à plus soif, du Français Jean Amila. Bonne lecture également.

– Pour la débrouillardise mâtinée d’une profonde malhonnêteté, Le Tigre se souvient de Jim Thompson et son amoral 1275 âmes.

– Plus récent, par un maître français du polar, avec un gamin comme narrateur, c’est La vie de ma mère !, de Jonquet.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez ici trouver ce roman en ligne ici.

3 réflexions au sujet de « Charles Williams – Fantasia chez les ploucs »

  1. Ping : Jean Amila – Jusqu’à plus soif | Quand Le Tigre Lit

  2. Ping : Thierry Jonquet – La vie de ma mère ! | Quand Le Tigre Lit

  3. Ping : Jim Thompson – 1275 âmes | Quand Le Tigre Lit

Laisser un commentaire