John Irving – La quatrième main

Points, 376 pages.

John Irving - La quatrième mainVO : The Fourth Hand. Deuxième livre lu d’Irving, Le Tigre espérait continuer sur la bonne lancée du premier. Écrit au début des années 2000, trente ans séparent les deux romans que j’ai enchaînés. Disons qu’il y a eu petite déception, à moins que je m’attendisse (ça passe là ?) à quelque chose de plus grand. Titre amusant et résumant bien le roman au moins.

Il était une fois…

Patrick Wallingfort est journaliste. Lors d’un reportage en Inde il se fait arracher la main droite (il est gaucher, ouf) en direct. Depuis il est « l’homme catastrophe ». Un médecin particulier, le docteur Zajac, lui offre la possibilité de se faire greffer une main, issue d’un homme décédé un peu connement. A partir de là, la vie de Patrick, déjà bien embrouillée, va se compliquer : la femme du donneur d’organes veut un gosse de lui, il n’arrête toujours pas de courir les femmes, tout le monde reconnaît « l’homme aux lions », sa greffe plante, etc.

Critique de La quatrième main

Autant le dire tout de suite, après 30 ans de bons et loyaux services, Le Tigre attendait un peu mieux d’Irving. Les ingrédients du succès du premier roman lu sont certes présents, mais très peu d’évolution dans le style parfois encombré. Quelques passages sont encore ennuyeux hélas, même s’il y a de très bonnes choses.

Les personnages, d’abord, semblent encore plus déjantés que d’habitude. Et terriblement crédibles à la fois. Le protagoniste principal déjà, tout une histoire. Mais surtout les petits à côtés : un docteur anorexique aux hobbies particuliers, sa gouvernante métamorphosée par amour, une femme qui fantasme sur la main de son mari (et reporte une petite part de son amour sur le journaliste), une maquilleuse chewing-gumée qui manque de s’étouffer en plein acte sexuel, un homme qui illustre le danger des armes à feu. Tout ce beau monde contribue à créer un univers à fort potentiel humoristique.

Ensuite l’humour. De jolies saillies qui nous tirent un rictus de temps à autre, mais c’est trop rare pour un livre de cette taille.Et comme Irving, à part ses les talents de conteur et de « dresseur de portrait », n’apporte pas grand chose d’autre, on peut se surprendre à souhaiter que les 100 dernières pages finissent plus vite. La fin, qui se termine toujours bien avec Irving, est passablement ennuyeuse, à moins qu’il ne s’agisse du retour (enfin) à la normale du héros qui va vivre pépère avec femme et enfant.

Entre l’humour délirant d’un Self, Welsh ou encore Sharpe, et les talents d’écriture d’un Updike, Irving paraît peu trouver sa place. Au final Le Tigre va sûrement continuer à lire de cet écrivain, mais sans plus de convictions.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

L’amour encore, le sexe aussi. La relation aux femmes de Patrick est le point central du roman. Tantôt c’est pour lui le coup d’un soir, sentiment non partagé par une femme sur le point d’être amoureuse ; sinon c’est la femme qui porte son enfant (au nom de son défunt époux) dont il devient accroc. Ou alors une femme ayant l’âge de sa mère qui ravive sa sexualité avec lui au Japon. John Irving présente de nombreuses situations, et parvient à bien expliquer les tenants et aboutissants de ce qu’il créé. De la bonne cohérence.

Le politiquement incorrect fait enfin quelques apparitions bienvenues. Je pense notamment à Mary et Patrick qui cherchent le moyen de faire virer ce dernier. Hélas certaines de ces idées (par exemple harceler une collègue) n’ont pas les effets escomptés. Assez corrosif pour un roman de ce type.

Comme dans d’autres romans, le titre prend sa signification vers la fin de l’ouvrage, grâce à la femme qu’il aime, et résume les vies du protagoniste : la deuxième main (on ne parle pas de la première, qui est normale) correspond à sa vie d’avant l’accident, la troisième est le passage fort mouvementé pendant la greffe, la quatrième étant enfin le moignon avec lequel il coulera le reste de ses jours heureux. Pas loin des quatre saisons en fait !

…à rapprocher de :

 – En parlant de docteur un peu jeté qui a une vie et une pratique peu orthodoxes, lisons Dr Mukti du très britannique mais néanmoins grand Will Self.

– Lisons également, rien que pour le capital sympathie auprès des femmes du héros, quelques ouvrages de Daniel Pennac (je pense au sieur Mallaussène).

La petite amie imaginaire, biographie d’Irving, est intéressante quoique décevante.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.

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