Maurice G. Dantec – Les Racines du mal

Folio Policier, 768 pages.

Maurice G. Dantec - Les racines du malDeuxième polar de Dantec, et ça y est l’auteur imprime sa marque. Pas vraiment un policier, ni un roman de science-fiction, juste un ouvrage dérangeant où se mêlent horreur et réflexions philosophiques et scientifiques appuyées et surtout déjantées. On aime ou on déteste. Pas de nuances.

Il était une fois…

Arthur Darquandier (protagoniste dans La Sirène rouge), est une sorte de profiler. Il est chargé de retrouver Schaltzmann, suspecté d’être un très dangereux tueur en série. Or ce dernier, schizophrène et paranoïaque au possible, n’est pas responsable de tous les morts que la police trouve. Pour aider Arthur, on lui prête la « neuromatrice », ordinateur surpuissant et sur-connecté qui est capable de simuler le profil psychologique de tout individu. En chasse ! Mais qui chasse qui au juste ?

Critique des Racines du mal

Compliqué de résumer un Dantec, plus on avance dans ses œuvres plus Le Tigre va se défiler. Surtout que je ne les ai pas lues hier. Les Racines du mal, c’est un peu le « titre pivot » : Dantec abandonne progressivement le polar (première partie) pour se diriger non pas vers la SF, mais du Dantec. C’est à dire de longues digressions vers du fascinant, ou du n’importe quoi. C’est selon.

Pour cela, l’histoire faite à base de tueurs en série, super-ordinateur capable de reproduire l’esprit humain, psychopathes jouant avec les frontières et évoluant à l’échelle du globe, séjour en Australie,…est intimement mêlée au style Dantec que Le Tigre connaît bien : philosophie politique (l’Homme qui n’est plus libre comme on l’espérait au XVIIIème siècle) ; la physique quantique (recréer l’esprit d’un être humain) ; la géopolitique (pourquoi l’Europe a perdu ses valeurs depuis la guerre en Yougoslavie),…

C’est long parfois, mais quand on fait un effort d’immersion, tout ça peut très bien se passer. Le jeune Tigre qui a lu ce roman a crié au génie, je ne sais s’il en serait de même en ce moment. Certes il y a de nombreuses approximations (l’aspect techno doit avoir sacrément vieilli), mais le phrasé seul de Dantec reste assez fluide. Pour cela, il ne faut pas avoir peur de perdre l’auteur avec ses pensées, il nous revient très vite en général.

Bref, ceci n’est pas un polar, davantage un essai sur le mal, le vrai. Et ce qui peut se passer dans la tête de l’Autre, que ce soit le diable ou l’auteur dont l’imagination et la vision méritent le détour par leur originalité (et radicalité).

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

Le tueur en série, Andreas Schaltzmann. Dantec s’est mis à la place de ce pauvre Andreas, c’en est flippant. Comme si l’auteur avait en lui les ressources d’une telle folie. Intenses bouffées délirantes (son pays serait envahi par les nazis et quelques E.T.) ; paranoïaque et d’une violence gore (les descriptions peuvent être assez dures), son parcours constituera le gros de la première partie du bouquin et est édifiant (en plus d’être sanglant et dérangeant). Mais l’ennemi n’est pas vraiment cet être esseulé en proie à la schizophrénie.

Le mal mondialisé. Le vrai ennemi, celui dont l’auteur semble nous faire prendre conscience parce qu’il pourrait se développer à terme, ce sont les très vilains qui vivent avec leur temps : connaissant le manque de moyens des polices et surtout le non partage d’informations (même à un échelon européen), leurs actes sont établis pour n’éveiller l’attention d’aucune autorité. Et pourtant, tout mis bout à bout, c’est terrifiant (du moins c’est ce que Le Tigre croit avoir retenu).

Si en plus on rajoute la « neuromatrice », ordinateur d’une complexité redoutable qui tape la discute avec le héros, je vous laisse imaginer comment ça peut vite partir dans la stratosphère cette histoire. Surtout si on donne des données susceptibles de corrompre notre HAL-9000 version française.

…à rapprocher de :

– Bien plus polar, le premier roman de Dantec, La Sirène rouge. La neuromatrice est au centre du prochain roman de Dantec, Babylon Babies.

– A la rigueur, offrez-vous Comme le fantôme d’un jazzman dans la station Mir en déroute. Ne pas se fier au titre dont la longueur est inversement proportionnelle à celle du roman.

– Dantec a produit une autre saga qui a plus d’envergure : Liber Mundi : Villa Vortex, Metacotex, et un dernier dont j’ai oublié le nom.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.

4 réflexions au sujet de « Maurice G. Dantec – Les Racines du mal »

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