Witold Gombrowicz – Ferdydurke

Folio, 400 pages.

Witold Gombrowicz - FerdydurkeVO : idem (le contraire aurait été étonnant). Un classique de la littérature polonaise, Ferdydurke (Fredy par la suite) fut une des plus jolies surprises littéraire du Tigre concernant le postmodernisme. Le retour forcé à la jeunesse, un ouvrage d’une finesse rare, oscillant entre humour décapant et créations littéraires (notamment le vocabulaire) savoureuses.

Il était une fois…

Jojo Kowalski, le narrateur, va suivre la curieuse transformation d’un homme trentenaire en un adolescent (traité comme un enfant). Enfermé malgré lui dans un rôle qu’il ne veut plus jouer, le héros sera contraint de vivre (ou revivre) dans un monde où il n’est pas pris au sérieux en raison de son âge.  Escarmouches entre bandes, cours avec des professeurs un peu limites, concours de grimaces, vacances à la campagne chez la vieille, tout est repris sous la plume acerbe de Witold Gombrovicz.

Critique de Ferdydurke

Conseillé par une connaissance polonaise, Le Tigre s’était rapidement procuré la bibliographie de l’écrivain majeur de ce pays (du moins il a été vendu comme tel). Du haut de mon inculture dans ce domaine (un auteur qui a écrit son truc dans les années 30, imaginez), je ne peux qu’être d’accord. Car c’est une vraie pépite.

Pépite en effet, parce que le lecteur qui ne connaît pas Witold pourra trouver le début un peu abrupt au début, les cent premières pages n’offrent en effet pas de didacticiel pour saisir l’univers décalé de l’auteur. Cependant, pour un titre publié avant la seconde guerre mondiale et traduit à la hussarde en français, il apparaît vite qu’on est en présence d’un ouvrage pas comme les autres. Absurde, inclassable, et qui laisse un arrière-goût de cendre par rapport à un environnement à la fois foisonnement et terne – sans doute mon esprit a, par défaut, imaginé un monde en noir et blanc relativement glauque.

Il n’en demeure pas moins que ce roman est tout bonnement génial, avec une scénario assez retors (quelqu’un est d’un jour à l’autre considéré et traité comme un gamin) mais donnant lieu à une création de termes et de néologismes assez fins. Notamment le terme « culcul » qui est repris à toutes les sauces (cf. infra). Bon enfant dans l’ensemble, Le Tigre s’est plutôt accroché à Fredy et son univers qui lui était plutôt étranger.

Pour conclure, un ouvrage où se mêle le comique, un peu de tragique, et même de l’érotisme, presque un ovni littéraire vis-à-vis duquel passer à côté serait plus que dommage. Pire, je dirais que le relire tous les cinq ans n’est pas envisageable.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

La jeunesse « culcultisée ». La culcultisation, c’est la propension qu’ont les adultes à prendre de haut les enfants et à s’adresser à eux comme de gentils attardés (un peu comme Le Tigre parle à son chat). Notre héros se retrouve entouré d’individus qui, non contents de l’abaisser, tendent à l’infantiliser à l’extrême en ne lui laissant qu’une autonomie plus que limitée. A se demander si ce n’est pas un vilain clin d’oeil aux dictatures qui fleurissent alors en Europe en dictant à leurs masses leurs comportements.

L’humour burlesque. Voilà ce qui a correctement marqué Le Tigre. Des situations borderlines mais à fort potentiel comique, des péripéties à se demander où l’écrivain peut aller chercher tout ça. L’exemple que j’ai en tête est le passage dans la salle des professeurs d’une école. Le narrateur y débarque avec une autre personne, et là une rumeur se propage parmi le corps enseignant : il s’agit d’un inspecteur de l’éducation ! Et là, tout part en sucette, les profs courent dans tous les sens tels des poulets décapités, en proie à la plus reptilienne (je parle de la zone du cerveau) des paniques. A lire et à relire ce chapitre.

…à rapprocher de :

– De Witold Gombrowicz, Le Tigre a adoré Cosmos (plus récent), mais est resté pantois devant Les Envoûtés.

– Autre auteur polonais (plus récent), Marek Krajewski et Les fantômes de Breslau. Thriller, avec un tout petit peu de fantastique. Satisfaisant.

– Le terme « culculterie » semble également utilisé par la jeune femme héroïne des Tours et détours de la vilaine fille de Llosa. Culcul, ici dans le sens bêtement romantique.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.

2 réflexions au sujet de « Witold Gombrowicz – Ferdydurke »

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