Augusten Burroughs – Déboire

10/18, 349 pages.

Augusten Burroughs - DéboireVO : Dry [à sec, en quelque sorte]. Une excellente surprise, cette histoire d’un alcoolique notoire en plein repentir. New-York City gay et excessive, le monde de la publicité, l’aspect autobiographique de Déboire n’empêche nullement l’auteur de livrer des passages très marrants. En moins de 350 pages, il n’y a pas de quoi se plaindre.

De quoi parle Déboire, et comment ?

J’avais lu ce roman comme tel, et ce n’est qu’après l’avoir terminé (l’envie d’en savoir plus était très forte alors) que je me suis aperçu que la charge autobiographique de Déboire était bien plus importante que prévu. Et ça donne à ce titre une saveur encore plus douce amère, disons que l’impact est différent.

Augusten, presque trentenaire et au talent certain dans son travail, bosse comme publicitaire à Big Apple. Hélas notre jeune ami se tape, plus souvent à lui qu’à son tour, de sévères cuites comme pour oublier son passé trouble. Et ça se voit. Si bien que ses collègues décident de faire une « intervention » et de le placer dans un centre de désintox’ particulier : uniquement fréquenté par des gays, aux méthodes peu orthodoxes et à la population déjantée. Va-t-il s’en sortir ?

Comme c’est américain et donc plutôt porté sur le happy ending, bien évidemment que Burroughs va s’en tirer avec les honneurs. Mais pas sans être d’abord passé par un joli paquet de phases plus ou moins heureuses. Dépression, renouveau, perte d’un ami, amour naissant, la vie (sans doute romancée) de l’écrivain U.S. est aussi variée que passionnante. Et Augusten B. a réussi l’exploit de verser à la fois dans le « touchant » (sans sensiblerie excessive) et l’humour, avec des situations cocasses et autres descriptions (des autres, mais surtout de lui-même) drolatiques et tendres. Bref, ça m’en a touché une.

Ces 350 pages, plutôt denses, se lisent au final à une vitesse étonnante. Le lecteur est vite happé par les pérégrinations de l’Apollon déchu sur la voie de la rédemption. Attention, Le Tigre imagine bien que toute personne ayant un sévère penchant pour l’alcool trouvera le texte assez dur, toutefois porteur d’espoirs.

Ce que Le Tigre a retenu

Déjà, l’alcoolisme est bien au centre du roman, avec les raisons qui font que le héros s’en sort. Faut dire qu’il commence bien difficilement le roman, avec un rendez-vous de clientèle dans un musée alors qu’il s’est gracieusement chargé la gueule la veille. Et le client comme ses collègues remarquent que ça pue autour de lui. Et il continue, chaque nuit, à se faire servir une dizaine de cocktails dans les bars. S’ensuit la lente reconversion, avec ses soucis quotidiens, notamment l’envie d’un « dernier pour la route ».

Ensuite, l’auteur ne se limite pas au désastre de l’alcool. Son ex-petit ami contribue à aborder le thème des MST, en particulier le VIH (le traitement de ce sujet, pudique, est presque parfait). Et lorsque cette personne décède du SIDA, la drogue se retape la cloche de bois dans l’œuvre. Mais à des niveaux plus élevés, puisque Augusten, au désespoir, reprend non seulement sa consommation d’alcool, hélas mâtinée de coke et de crack. La grosse rechute. De quoi remettre les pieds dans un centre Betty Ford.

Heureusement le roman termine sur une délicieuse note d’espoir, avec notre ami qui a repris sa vie en main et en vient même à aider son prochain dans ce genre de périple. La situation finale peut alors expliquer l’intelligence générale (la profonde humanité, ai-je envie de dire) et la lucidité de l’écrivain quant à cet épisode de sa vie. En étant généralement sobre et heureux (l’amour et des proches attentifs y étant pour beaucoup), il est alors plus aisé de décrire, avec un tel ton parfois humoristique et sans concession, sa propre histoire avec l’alcool et les drogues.

…à rapprocher de :

– Ça vaut sans doute le coup de lire Courir avec des ciseaux, qui est axé sur une période antérieure de sa vie. Dans ma PAL.

– Il y a un peu des héros de Bret Easton Ellis, mais la comparaison s’arrête là.

– En revanche, Augusten m’a souvent fait penser à notre Beigbeder national. Notamment ses Nouvelles sous ecstasy ou 99F. Ou alors le Will Self britannique, par exemple avec The Sweet Smell of Psychosis (plus court, plus déjanté).

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver cet autobiographie via Amazon ici.

8 réflexions au sujet de « Augusten Burroughs – Déboire »

  1. Ping : Frédéric Beigbeder – 99 francs | Quand Le Tigre Lit

  2. Ping : Louis Lewin – Phantastica : Une encyclopédie des drogues | Quand Le Tigre Lit

  3. « Courir avec des ciseaux » est vraiment génial. J’ai appris à la toute fin que c’était autobiographique et ça rend le roman encore plus incroyable.

    En tout cas je ne connaissais pas celui-là et ça me tente bien d’essayer 🙂

  4. Ping : Frédéric Beigbeder – Nouvelles sous ecstasy | Quand Le Tigre Lit

  5. Ping : Will Self – The Sweet Smell of Psychosis | Quand Le Tigre Lit

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