Le ciel est prêt à tomber sur la tête de nos illustres moustachus, heureusement qu’un sachant se trouve dans le coin. Prolix, un homme aussi devin que Le Tigre, la gouaille et les menaces en plus, pourrait-il sonner le glas de la résistance gauloise ? Quiproquos, parties de dés, conteurs d’aventures, une belle aventure (la 19ème je crois) intellectuelle à défaut de faire voyager.
Il était une fois…
Au cours d’un orage nocturne filant une correcte pétoche aux pas-si-fiers Gaulois, un individu tout en grandeur et en éloquence débarque dans le village. Celui-ci se dit devin, ce qui ne manque pas d’impressionner la populace – à l’exception notable d’Astérix. Le devin du dimanche tente alors d’en profiter pour passer quelque temps aux frais de ses hôtes. Si vous rajoutez les Romains souhaitant ardemment tirer profit de la situation…
Critique du Devin
Encore une bande dessinée qui traînait dans la bibliothèque de grand-père-ours. Relue en un quart d’heure, et il est toujours plaisant de relever, ici et là, quelques bons mots et/ou situations totalement oubliées par votre serviteur. Et Le Devin en regorge, chaque page apporte son petit lot d’humour bon enfant, ce qui permet de pardonner quelques lourdeurs – notamment lorsqu’il est question, pour le devin, de démontrer que c’est un charlatan.
Pour faire simple, l’histoire se décompose en deux parties. D’abord, Prolix (dénomination pas si judicieuse de la part des auteurs) arrive, trempé comme un mouchoir sis à côté du lit de votre serviteur lorsque la tigresse est de sortie, chez le village des irréductibles. Il commence son boniment sous le regard goguenard (voire torve) d’Astérix qui flaire l’arnaque. Notre héros est hélas bien solitaire dans son jugement, et en moins de deux Prolix occupe en catimini la forêt tandis qu’il reçoit, de la part des habitants, des mets toujours plus raffinés – en échange de fables bien accomodantes.
Et puis les Romains débarquent. Du moins le centurion d’un camp avoisinant. Le devin, fait prisonnier, risque la mort à cause de la politique devinophobe de César. A moins que…et pourquoi ne pas faire en sorte que ces satanés Gaulois quittent (fuient même) leur village en lançant une pseudo malédiction ? Dès que l’envahisseur met son grain de sel, forcément la situation prend une ampleur satisfaisante, en particulier quand se présente un émissaire de Jules C. en personne, lequel est colère de constater que le village résiste – après une courte odyssée pas bien méchante.
Les illustrations restent plaisantes avec une petite touche grandiloquente lorsqu’il s’agit de montrer la force de Dame Nature et les postures avant-gaullistes du devin (même si celles-ci tombent souvent à plat). Le lecteur n’aura certes pas l’opportunité de contempler de beaux paysages (l’histoire se cantonnant aux villages et ses environs) mais sera rassuré par une bataille finale qui a tout du feu d’artifice habituel. Bref, un ouvrage à mettre entre toutes les mains – sauf entre celles de sa voyante peut-être.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Évidemment, le rapport des Gaulois à la religi…euh à la superstition est au centre de l’intrigue. Dès le début, Goscinny et Uderzo s’amusent à dresser (sous la forme d’une conversation de pleutres) le panthéon des divinités occupant leur esprit. Car il n’y a pas que Bénélos ou Toutatis qui sont aptes à foutre le bordel dans les cieux… Et il appert que, face au devin, nos amis sont très enclins à épouser de nouvelles croyances, pourvu que ça leur profite. Comment est-ce possible ?
En fait, le félin a sciemment omis un détail : Panoramix, l’équivalent gaulois du grand chef des schtroumpfs, était absent pendant une bonne partie de l’aventure. Sans ce garde-fou, cet être capable de canaliser la connerie de ses contemporains, les désirs (et surtout les peurs face à l’orage) des autres ont pris des proportions suffisantes pour qu’un beau parleur leur donne une leçon de manipulation. Et que je te parle de ton avenir à Paname, et que je t’évoque une rencontre amoureuse, tous (sauf Astérix et Idéfix hein) tombent dans le panneau – les femmes veulent une situation et les hommes le pouvoir.
Le plus drôle reste que l’occupant romain, pourtant plus averti et qui s’estime moralement « supérieur », s’y fourvoie également. Le centurion ne débande plus de l’aventure dès lors qu’il contraint le faux devin à conter des prophéties auquel le premier est le seul à croire : prendre la place de César et se taper Cléopâtre, en toute simplicité. On est au-delà d’une mignonne naïveté dans la mesure où le « croyant » pousse sa chance et créé, par lui-même, sa prophétie en utilisant un Prolix (dénué de personnalité) qui fait ici office de miroir parlant.
…à rapprocher de :
– Pas mal d’histoires du fier Gaulois sont sur le blog, dans l’ordre de publication s’il vous plaît : Astérix en Corse ; le correct La Grande Traversée ; le minable Astérix et Latraviata ; Le Papyrus de César (ça aurait pu être pire).
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver cette BD en ligne ici.
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