Harry Shapiro – Waiting for the man

Camion Blanc, 544 pages.

Harry Shapiro - Waiting for the manVO : Waiting for the Man: the story of drugs and popular music. Titre ambitieux, gros pavé, voilà un essai édifiant et qui ne semble jamais être hors d’actualité. Bien écrit, prenant, le lecteur même néophyte musical sera comblé. Le Tigre n’écoute plus ses classiques de rock de la même façon maintenant.

De quoi parle Waiting for the man, et comment ?

C’est quoi ce titre ? Waiting for the man, c’est une célèbre chanson des Velvet Underground (sortie en 1967). The Man en question, c’est le dealer que le chanteur attend à Harlem pour qu’il lui vende sa dose d’héroïne à 26 $. Déjà cher à l’époque.

Harry Shapiro, c’est une bonne demi-douzaine d’essais sur les drogues et la musique. Quelqu’un qui s’y connaît, un essayiste anglo-saxon (britannique pour être précis) donc ne vous attendez pas à avoir une interview de Johnny Hallyday (il y aurait sans doute de quoi pondre une encyclopédie). Ça n’empêche pas que le lecteur francophone en a pour son argent, car l’auteur traite de groupes et genres musicaux bien connus, il n’y a presque aucun dépaysement.

A la différence de ce que Le Tigre peut lire chez l’éditeur Camion Noir, ici aucune image pour étayer les dires de l’auteur. Plus de 500 pages brutes, descriptions et analyses d’une finesse assez fascinante : quels sont les liens entre musique et drogues ? Qui appelle qui ? L’essai se décompose en trois parties, de type chronologique, avec les petits « plus » chimiques que chaque type d’artistes musicaux utilisera, et leurs résultats toujours cocasses (des anecdotes savoureuses), souvent tragiques.

Ce que souhaite souligner Harry Shapiro, c’est l’intime connexion entre drogue et musique. Le chanteur d’Aerosmith (ou un autre groupe dans le même genre) qui n’entend dans un de ses albums que le résultat du LSD, la trance psychédélique qui ne deviendrait que réellement « écoutable » sous ecstasy, la techno mixée par des DJ sous amphèt’, et derrière tout ça les hommes politiques qui ont quelques wagons de retard et dont les réactions sont plus inadaptées que jamais.

Bref, n’ayez pas peur de sa taille, ce n’est pas si long si on considère l’aération générale de l’essai : nombreux chapitres et notes de fin de chapitre, dialogues qui se lisent comme autant d’articles à sensation, ça passe bien vite.

Ce que Le Tigre a retenu

Les premiers musiciens bien accrocs, ce sont quand même les jazzmen blacks des années 30 et d’après-guerre (Ray Charles notamment) qui carburaient avec des drogues jugées propres à leur groupe ethnique : marijuana, opium et surtout héroïne, plus tard certains useront et abuseront du crack, bien plus dangereux. Vint ensuite le rock, et les membres de groupes illustres au comportement suicidaires. Elton John qui se faisait un rail de coke toutes les demies heures, Sid Vicious ou Kurt Kobain qui terminent pitoyablement leurs carrières, etc. Sans oublier le reggae et la ganja bien sûr. Enfin les nightclub et la danse music, avec ses drogues de synthèse qui permettent de danser des heures à plus de 120 bpm.

Ce qui a en outre marqué Le Tigre, ce sont les citations à chaque début de chapitre. Y’a du très très bon. Florilèges, avec leurs auteurs respectifs :

Le crack, c’est le génocide des noirs (Oscar Jackson). Quand j’étais pas défoncé, j’étais devant une cours de justice…T’essaies 25 fois de dire : « coupable votre honneur » à Marlborough Street et de garder un air sérieux…C’était un jeu, rien à voir avec la justice ou la loi. (Keith Richards). Citez-moi un groupe de rock qui n’a pas dans son répertoire des hymnes au LSD ou à la marijuana. (Timothy Leary). Il nous faut faire une fois de plus de la joie un crime contre l’État. (Barney Hoskyns, éditeur et chroniqueur musical). Older a pas mal été enregistré sous cannabis. Je ne buvais pas : j’étais trop défoncé. (Georges Michael). Ils peuvent te le sortir du corps, mais ils ne peuvent pas te le sortir de la tête. (Charlie Parker, sur l’héroïne).

…à rapprocher de :

– Une drogue en particulier, c’est la méthamphétamine, traitée dans un autre essai made in Camion Noir : Accroc au speed, de Mick Farren.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez le trouver sur Amazon ici. Ou via le site de l’éditeur.

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