Jean-Bernard Pouy – Nous avons brûlé une sainte

Folio Policier, 216 pages.

Jean-Bernard Pouy - Nous avons brûlé une sainteAttention petite pépite ! D’une part l’image de couverture est fort réussie et annonce la couleur. D’autre part le titre, aguicheur, promet de grandes choses qui se présenteront au lecteur. Suivre quatre jeunes doux rêveurs qui vont mettre une région à feu et à sang, avec un relent de « british bashing ». Très sympathique.

Il était une fois…

Victime d’une tentative de viol, un genou explosé par ses bourreaux, merci les touristes anglais…il en fallait moins que cela pour transformer la timide Anne en sainte. Une sainte qui va s’entourer de trois anges vengeurs pour l’aider à mener son combat : bouter les Rosbeefs hors de France. Ils signent « Arthur Rimbaud ». Les autorités sont larguées.

Critique de Nous avons brûlé une sainte

Une jolie réjouissance, tant sur le style que l’histoire. Le scénario est bien trouvé : Anne et sa fine équipe sont sur le pied de guerre. Le premier protecteur est son frère, lequel embrasse autant la cause de la vierge hallucinée que les jolis garçons. Le second, La Hire, est son ami d’enfance : sa passion pour la guerrière enragée va le pousser à épouser son épopée meurtrière. Le troisième joue un rôle dans cette odyssée par amour non pour la pucelle mais pour un rêve de totalité de déraison et d’absurdité qu’il peut poursuivre à travers elle.

Et s’il faut pour ce quatuor de choc bouter les anglais, encore faut-il le faire avec classe et élégance, par exemple en étant habillé de cottes de maille. Ce qui ne manquera pas d’intriguer les enquêteurs en proie à une panique grandissante. L’enquête va être longue.

Le style littéraire est savoureux, les personnages attachants, tant les doux tarés que les flics abasourdis par autant de violence au premier abord irrationnelle. Ne vous trompez pas par le nombre de pages (à peine plus de 200), il n’y a pas à proprement parler de chapitres et les « blancs » sont dans cet ouvrage inexistants.

Pour conclure, excellent ouvrage de Pouy, avec un drame progressif qui finit en pure apothéose de plaisir. Ses personnages sont assez invraisemblables mais le tout fleure bon la contestation des années 70 en France. Bref, du style et du rire.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

Le poète Rimbaud. Nos compères se plaisent à envoyer des missives à la police, signant Arthur Rimbaud avec des citations intelligemment sélectionnées dudit poète. Lequel s’étant reconverti en trafiquant d’armes et ayant eu la mauvaise idée de mourir d’une infection du genoux, miroir du genoux déchiqueté de la Jeanne d’Arc 2.0.

C’est là que les clins d’œil se multiplient autant à la poésie du sieur Rimbaud qu’à l’histoire de Jeanne (Je Anne dans certaines annonces de chapitre). Les compagnons de la pucelle, comme Gilles de Rais sont bien présents dans notre monde contemporain. Appliquer une épopée historique à des personnages un peu loufoques (ça pourrait être n’importe qui) est bien trouvé ; aussi le style passionné forme au final un bel ode à la vie et un ironique hommage à tout ce que le quotidien renferme de drôlerie potentielle.

Pouy, en plus d’aimer ses personnages (le ton s’en ressent), parvient à entraîner le lecteur dans un épisode anti anglais malgré nous fort amusant. La poésie qui ressort de l’œuvre est comme une invitation à le suivre dans une équipée révolté et enragée. Mais surtout délirante. Certes en France nous avons une certaine propension à sourire lorsque l’Anglais est chassé, mais de là à se réjouir d’un tel acharnement ? Ce n’est que de la belle littérature un peu délirante me direz-vous. Avec raison.

…à rapprocher de :

– Le réjouissant « délire » de Pouy se retrouve bien dans Spinoza encule Hegel, suivi de A sec !. Si Suzanne et les Ringards passe pas trop mal, hélas La clé des mensonges peut être évitée.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.

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