Encycatpedia Vol.XXVII : l’alcool et les chats

Le Tigre Editions, pas de pages.

EncycatpediaVotre animal de compagnie refuse de vous accompagner dans vos pérégrinations éméchées ? Ce petit ingrat boude le douze ans d’âge que vous mettez dans sa gamelle ? Ne pensez pas qu’il vous snobe, il a juste un peu de mal avec l’éthanol et ses dérivés. je vous propose de lui apprendre à bien lever le coude afin d’en faire le compagnon presque idéal.

Pourquoi les chats n’aiment pas l’alcool

Dans le cadre de ce brillant billet, j’ai décidé de respecté l’anonymat de mon alcoolique de chat en le nommant Haddock (nul besoin de vous dire pourquoi un tel sobriquet). Sachez également que Le Tigre, pour les besoins de l’expérience, a environ mis quatre années à transformer un innocent félin en une brutasse au gros pif réclamant, chaque matin, son dé à coudre de beaujolpif. Comme tout propriétaire de chats, je n’ai pas vu au premier abord pourquoi les félidés étaient méfiants vis-à-vis de l’alcool.

Premièrement, l’erreur est de penser qu’Haddock peut ingurgiter, sans broncher, la même quantité d’alcool que les humains. Le ravi de la crèche que j’étais opérait une savante règle de trois qui s’avère trompeuse : non, ce n’est pas que vous êtes capable de descendre un litron de vin en une heure que le minou, qui fait 5% de votre poids, boira 5 cL en ronronnant de satisfaction.

Déjà, Haddock n’a pas la même propension habitude que vous à se torcher. Il convient d’y aller par palier, un peu comme la sodomie. Ensuite, n’oubliez pas que l’animal est moins équipé que vous : œsophage qui récupère un peu d’éthanol ; estomac de belle facture qui vous permettra de mélanger la bouffe et l’alcool ; intestins agréablement longs et pourvus de matière pour le caca qui fouette (sauf si vous êtes à jeun depuis deux jours) ; foie de compétition, bref Mère Nature nous a pourvu d’atouts dont Haddock n’oserait même pas rêver.

Humains et félins ne jouent d’autant pas dans la même catégorie que nous avons derrière nous des milliers d’années d’évolution au cours desquelles notre corps a appris à tolérer l’alcool – du moins depuis qu’un idiot a eu l’idée de faire fermenter sa corbeille à fruits.

Deuxièmement, il y a fort à parier que les premières expériences d’Haddock avec l’alcool sont, en général, désastreuses. Pas parce qu’il s’est cuité le museau, mais à cause de vous. Au mieux, pendant une soirée arrosée, il n’est pas rare d’avoir de subits élans d’affection (certes maladroits) pour tout ce qui nous passe sous la main. Si le chat est dans le coin, c’est lui qui va morfler lorsque vous aurez décidé de prendre un être vivant dans vos bras en vue de lui rouler un patin.

Au pire, sous l’empire d’un état alcoolique, vos réactions pourront être excessives si Haddock fait une connerie. Je n’en suis pas forcément fier, toutefois il m’est arrivé, en rentrant pété comme une Polonaise et désireux de prendre une douche, de marcher dans les déjections de mon minou – en plein milieu de la cabine. Dans ce cas, je tire le responsable de son sommeil, le chope par le cou et lui fais bouffer ses selles tout en l’arrosant. Je peux vous assurer qu’il aime ça autant que moi nettoyer mes pieds merdeux.

Quoiqu’il en soit, Haddock, malgré son esprit étriqué, ne met pas long à faire le rapprochement entre vos exactions commises à son égard et votre haleine avinée mâtinée d’une démarche hésitante. Dès que j’ai bu, mon chat le sent et se carapate comme un pleutre dans sa boîte (d’où il sait que je ne peux l’atteindre).

Troisièmement, et je ne garantis pas la véracité de cette information dans la mesure où c’est le vétérinaire qui me l’a dite, mais il paraîtrait que les chats sont très sensibles au niveau des muqueuses près de la gueule (narines, yeux, etc). Du coup, dès qu’Haddock se penche vers sa gamelle remplie d’une excellente vodka, les vapeurs d’alcool lui sont insupportables et son réflexe naturel est de ne pas goûter.

D’ailleurs, je ne sais pas pour vous, mais le meilleur moyen de faire passer un verre de vodka pure est d’avaler un verre de lait dans la foulée. Ça glisse comme papa dans maman, toutefois je vois mal Capt’ain H. faire de même.

Comment faire boire son chat

Si vous m’avez à peu près suivi, l’erreur principale est de proposer un liquide qui relâche trop de vapeurs éthyliques. Je l’ai compris bien tard, car comme un con je tentais d’habituer Haddock à faire le gourmet : je ne le traitais qu’au champagne. Apparemment les bulles l’indisposent, ça lui piquerait ses petits yeux sensibles. Lopette va.

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Le « problème » des chats, selon mon véto encore, est qu’ils ne sont guère friands du sucré et préfèrent les saveurs acides. Considérant que le sucre se transforme en alcool, j’ai eu logiquement l’idée de faire boire à mon nouvel ami de beuverie des trucs forts et amers. Vodka, picon, rien à faire. Soit c’était trop fort, soit juste imbuvable, même pour Le Tigre – je ne balancerai aucune marque.

Après des mois de recherches acharnées (et quelques dégueulis à la va-vite, rien de très méchant), j’ai compris comment opérer. Déjà, jouer les doses et se plier au métabolisme chétif du félin. Aussi diluer le produit comme un dealer couperait votre cocaïne est susceptible de rendre la dégustation plus attrayante.

Ensuite, le choix de la marque. Le numéro du présent billet est un précieux indice : en effet, les liqueurs à base de menthe (à l’instar du Get 27) sont notoirement adaptées. Non seulement le taux de sucre tend à s’effacer devant la densité du breuvage, plus lourd, mais en outre les émanations d’alcool sont limitées. Ces foutues émanations seront d’autant moins fortes que vous verserez le tout glacé. Par conséquent, le fin du fin reste le limoncello, alcool italien à base de citron se servant très froid. Toutefois au prix de cette liqueur Le Tigre préfère inviter une tigresse au resto.

Enfin, la présentation. Verser dans une gamelle l’alcool est fortement déconseillé, la vaste coupole étant réservée à des mets plus basiques – en plus, les exhalaisons d’éthanol seront trop prononcées. Pour ma part, j’opte plutôt pour un système dit en « vase clos », voire insidieux : soit je mets à disposition l’alcool depuis un compte goutte qu’on réserve d’habitude aux hamsters (le chat a l’impression de boire au robinet, vous savez comme ils aiment cela), soit j’imbibe ses croquettes avec de la liqueur de citron.

Bah, croyez moi ou pas, depuis que ses boulettes sont aromatisées ainsi Haddock refuse tout autre type d’alimentation. Élever un alcoolo n’est pas si dur en fait.

Alcooclusion

Voilà, grâce au Tigre, Haddock est des vôtres, il a bu son ch’ti verre comme les autres Russes.

Petit mot final au sujet d’un autre animal, le chien. Milou qui se torche au Loch Lomond est, hélas, le digne représentant de cette stupide race. L’espèce canine, en effet, est considérée comme le meilleur ami de l’Homme puisqu’elle se prête, avec une docilité déconcertante, à nos doux travers. Faire boire un chien ne relève aucunement de l’exploit, le stupide cabot ne demandant qu’à vous faire plaisir.

En outre, je soupçonne les canidés d’avoir un sérieux penchant pour tout ce qui est boissons alcoolisées, ayant personnellement vu des clébards me réclamer du Baileys avant de marcher comme si un cheval leur avait dérouillé l’arrière-train. Le chat, vierge de tout vice (du moins de ce côté), représente un challenge autrement plus difficile puisque c’est sa nature même qu’il vous faudra modifier.

Quant à la gueule de bois qui guette Haddock, la solution du lendemain est la même que pour l’Homo Sapiens : boire une bonne bière fraîche. Mais là, faudra un peu le forcer. Avec bienveillance évidemment.

6 réflexions au sujet de « Encycatpedia Vol.XXVII : l’alcool et les chats »

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  3. Attention à la case prison!
    Il devient de plus en plus délicat de faire des expériences sur son animal familier favori et félin.
    Y en a qui ont fait des expériences félines (et youtubesques) et qui ont eu des problèmes, puis mal au cul en prison (les malotrus qui maltraitent les félins « jouissent » d’une considération à peine meilleure que les pédophiles).

    • Je pense que ce châtiment est dû à l’extrême souplesse de cette espèce.

      [Wikaka]
      @Souplesse.
      « La souplesse désigne la qualité physique permettant d’accomplir des mouvements corporels avec la plus grande amplitude (articulaire et musculaire) et aisance possibles, que ce soit d’une manière active (en mouvement dynamique) ou passive (sans mouvement dynamique).
      De nombreux facteurs interviennent dans l’établissement de la souplesse : les éléments articulaires et musculaires, l’âge, la température ambiante, le relâchement psychologique…
      « La souplesse est cette capacité et qualité qu’a le sportif de pouvoir exécuter des mouvements de grande amplitude articulaire par lui-même ou sous l’influence d’une force extérieure » Weineck. »
      [/Wikaka].

      Pour ces individu là, qui en fait jalouse secrètement le fait que les chats retombent toujours sur leurs pattes (il est écrit que de mener des expériences félines, pourrait aboutir à la découverte d’une essence qui permettrait à cette personne de toujours marcher droit).
      Qui a dit coin coin ?

      Il est donc tout naturel, à mon sens, de s’assurer de la véracité de ces propos, en menant ce genre… d’exploration…entre quatre barreaux (ou plus, toujours en famille).

      Cependant le cas de la langue rapeuse me laisse pends-toi.

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