Paul est de retour, voici quelques mois de sa presque tendre adolescence dans une ville qu’il apprend à connaître. Avec son personnage toujours aussi attachant, des saynètes dans l’ensemble très sympathiques et un trait varié qui emplit autant les yeux que l’âme, l’auteur canadien a visiblement gardé les clés de ce qui faisait son succès. Sans plus.
Il était une fois…
Années 70, Canada (le pays accueille les JO d’été, si ça peut vous donner une idée de la chronologie). La famille de Paul quitte Rosemont pour s’installer à Saint-Léonard. Cela n’est pas du goût de Paul qui ne connaît personne dans le quartier et craint passer une belle année de merde. Toutefois, cette année sera celle de l’émancipation : l’indépendance, les cuites, l’amour, les joints, le rock, etc.
Critique de Paul dans le Nord
Voici un roman graphique dense qui respecte presque les trois règles du théâtre : un temps limité, à savoir une année de l’existence de Paul, personnage autobiographique au centre de la narration, dans un Canada que le lecteur visitera avec intérêt à force de pérégrinations du héros.
Paul arrive donc dans un quartier inconnu doté d’une nouvelle école dont il ignore tout. En ajoutant un début de crise d’adolescence (il doit avoir moins de quinze piges), on obtient un ado boutonneux et passablement bougon sujet à quelques colères loin d’être homériques. Grâce à l’intéressant Ti-Marc, jeune plein de vie et fana de musique, Paul vivra quelques moments d’anthologie : voyage en auto-stop pour aller dans un endroit qui ne semble exister (les personnages croisés, sans doute exagérés, sont dépeints avec humour) ; longues veillées autour d’un feu avec quelques amis ; sans oublier le premier amour…
Pour ceux qui connaissent l’auteur, rien à dire de nouveau sur les illustrations si ce n’est une planche haute en couleur (exceptionnel pour cet auteur qui n’en utilise jamais) qui dresse, de façon très juste, ce qui peut vous passer par la tête une nuit de forte fièvre – éléments qui se mélangent de façon déjantée, impression de faire du surplace, traits grossis, etc. Les personnages ont ce quelque chose d’enfantin qui ravit, quelques cases sont de petits joyaux d’architecture et Michel Rabagliati confirme son sens du détail qui confine à la mémoire eidétique – intérieur des maisons et vision d’ensemble.
Néanmoins…ni grands éclats de rire ni larmichette en tournant les pages. Pour avoir lu la plupart des aventures de ce personnage, je dois vous avouer que cet opus n’a répondu que de justesse à ce que j’attendais légitimement de l’auteur québécois. La découverte de la culture franco-canadienne est certes abondante (notamment le vocabulaire), mais le félin n’a pas retrouvé ce « petit truc » qui fait une œuvre d’exception.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Paul dans le Nord, c’est l’autonomie, voire l’indépendance. Le protagoniste, désormais assez âgé pour acheter une moto (il se rabattra sur une mobylette, mais l’idée y est) et passer la nuit avec des amis, peut enfin découvrir le vaste monde. Cela commence par se lier avec de nouvelles connaissances, faire de nouvelles activités sans les parents (parfois ça se termine en gerbant derrière un talus) et foncer tête baissée dans l’inconnu. La jeunesse est alors l’occasion de tâter ses limites et créer d’intenses souvenirs. Suffisamment en tout cas pour en rendre compte avec précision quelques décennies après.
Découverte de l’autre sexe, enfin, avec la pétillante Nadia – c’est plus sexy Roger, le vieil homo adorable croisé sur la route. Le dernier quart de l’ouvrage est centré sur la rencontre et l’intense flirt entre Paul et la gentille blonde. De façon naturelle et appropriée, l’auteur conte l’émoi de sortir avec quelqu’un, du bécotage en règle à la tentative de rejoindre le lit de sa dulcinée (mauvaise idée au passage). Avec honnêteté, Michel R. développe également la transformation, attendue, en premier chagrin d’amour. Le genre à se ridiculiser pour garder à tout prix sa copine, découvrir qu’elle est avec un autre, penser ne jamais pouvoir s’en remettre, pour ensuite se redresser. Tout ceci est raconté sans pathos ni pudeur excessive, l’auteur reste sobre et efficace et se permet de terminer par une scène symbolique confirmant que la tristesse du héros est derrière lui.
…à rapprocher de :
– Rabagliati a une jolie collection avec le fort sympathique Paul : Paul à la campagne, Paul a un travail d’été, Paul en appartement, Paul dans le métro, Paul à la pêche, Paul à Québec, Paul au parc. Pour l’instant j’espère.
– Tigre se répète, mais visuellement on n’est pas loin de Guy Delisle (Pyongyang, Shenzhen, etc).
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman graphique en ligne ici.
Rien d’autre a ma connaissance.
Voila, comme tu dis, ouais mais « sans plus ». J’ai pourtant une affection toute particuliere pour cet auteur que j’ai rencontre mais bon… Paul commence un peu a se fatiguer; ses gentilles aventures pleines de nostalgie perdent en fraicheur et ne gagne pas en scenario. Il manque effectivement un petit plus quelque part mais je ne saurais dire quoi. Ou alors c’est le Paul maussade qui deteint sur le lecteur.
Ce n’est pas le genre d’auteur avec lequel le « binge reading » est recommandé, en effet. Faut que je vérifie si Michou fait autre chose que de parler de ses souvenirs d’ailleurs.
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