Suivi de La mort est anonyme. Un duo de romans fonctionnant dans un jeu de miroirs, le principe est séduisant en diable. Dommage que l’auteur rate se perd dans des dialogues stériles et des pétées de considérations plus ennuyeuses qu’utiles à l’avancée de l’intrigue. Le résultat fut loin d’être plaisant à lire – euphémisme.
Il était une fois…
Sylvain est un psychologue qui exerce en tant que bénévole dans une antenne SOS-suicide sise en Suisse. Entre les appels des nombreux désespérés et ses propres inquiétudes, son existence n’est pas très youpi-tralala. Sa confusion monte en flèche à mesure qu’un mystérieux interlocuteur lui parle de tout et n’importe quoi, et semble zigouiller quelques hères à l’autre bout du fil.
Dans le second tome, les réponses à toutes ces questions [en théorie hein]
Critique de Anonyme est la mort et La mort est anonyme.
Ce n’est pas le premier ouvrage lu de cet auteur canadien qui, auparavant, avait pondu une pièce de théâtre à laquelle le félin était gravement resté imperméable. Hélas, mille fois hélas, ce n’est pas ce thriller qui a arrangé mon opinion sur De Greef. C’est infiniment dommage dans la mesure où l’idée de départ était plutôt géniale : imaginez deux romans intimement liés qui, chacun, constituent une clé de compréhension pour l’autre. Un roman policier en deux parties qui invite à lire et relire des chapitres ici et là puisqu’une même scène est délivrée sous deux points de vue. Voilà pour l’intention. Le résultat ne fut guère à la hauteur.
Le premier tome s’attarde sur une année dans la peau d’un homme d’âge indéfinissable, divorcé, dont le cerveau est progressivement rongé par les harcelants appels d’un quidam qui souhaite taper la discute. Quant au second titre, changement de narrateur qui devient le fameux interlocuteur dont on espère en savoir plus. Cependant, rien de bien révolutionnaire qui donne envie de comparer (j’ai essayé, et ne fus pas plus renseigné) les deux versions des scènes vécues par deux individus qui ne sont pas suffisamment développés pour qu’on puisse bien les distinguer.
Car l’écrivain déballe un style opaque qui ne fait rien pour aider la compréhension de son œuvre. Verbeuses et ne parvenant que trop rarement à susciter l’intérêt, les phrases couchées par De Greef desservent une intrigue qui aurait pu constituer un polar haletant et d’une correcte noirceur. Il n’en est toutefois rien à cause notamment de dialogues surréalistes d’autant plus frustrants que pas une seule seconde la possibilité de tout simplement raccrocher ne prend forme dans l’esprit du héros. La seule fois où j’ai cru être en phase avec le roman fut lors d’un retour d’une soirée lorsque mon alcoolémie présentait un taux m’interdisant de conduire le métro dans lequel j’étais avachi – le félin ne tient pas particulièrement à se flinguer la santé pour apprécier un roman.
Malgré des chapitres assez courts, je n’ai pu m’empêcher de trouver le temps atrocement long. Des passages entiers sont dispensables et ne font rien avancer, ce qui empêche de savourer quelques pépites de paragraphes assez forts qui en toucheront plus d’un – jeux de mots à foison et autres monologues désabusés. Mais le second opus, que j’imaginais lever le voile sur l’intrigue, ne fait qu’ajouter à la confusion générale, que l’excipit du roman ne lève point. Un diptyque qui semble plus tenir du drame psychologique que du thriller, mais sans les qualités de ce premier.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Bien évidemment, publier deux ouvrages de la sorte amènent à s’interroger sur une certaine forme de morbide dualité. Un dialogue ayant pour sujet la mort entre deux objets littéraires incarnant chacun un acteur : le donneur et le récepteur unis (puis mélangés, mais je n’ai sûrement pas dû comprendre) tel un serpent se mordant la queue. En rajoutant un joli brin de folie hallucinée, je dois vous avouer avoir cru à la fin du premier roman que le protagoniste était atteint d’un léger désordre de personnalité multiple – avouez que ça aurait eu de la gueule. La fin n’est pas de cet acabit, en fait je n’ai aucune idée de ce que comptait révéler l’auteur – et regrette par conséquent d’être allé au bout du second tome.
Tant qu’on parle de dualité, le félin n’a pas totalement saisi le principe consistant à vendre deux ouvrages sachant qu’on ne peut lire l’un sans l’autre – peu importe l’ordre. Un seul livre, certes partagé en deux parties, aurait eu plus de sens et aurait permis au lecteur de passer d’un titre à l’autre sans difficulté, parce que tenir dans entre ses pognes deux bouquins et devoir relever les subtilités de narration est pour le moins peu pratique.
Enfin, La mort est anonyme/est la mort parle avant tout (à mon humble sens) de la grande faucheuse qui revêt les oripeaux de la solitude. Sylvain, divorcé, est terriblement seul et c’est peut-être la raison pour laquelle il n’envoie pas chier le con à l’autre bout du fil. Aussi seul est sa Némésis qui, paradoxalement, en vient à occire un vieil homme qui attend cet instant comme une délivrance. Cependant, l’absence de description prenante, participant à un cruel manque d’immersion ne permet pas de rendre compte de la douleur des intervenants.
à rapprocher de :
– De cet écrivain, j’avais buté sur Le chemin d’Heming. Au moins c’est plus court à lire et il y a comme une atmosphère que certains pourraient trouver point désagréable.
Un bouquin neurasthénique et de plus a double dose, c`est juste ce qu`il me faudra pour me calmer quand j`aurai gagné a la loterie et que j`aurai réussi a emballer la nouvelle voisine qu`a des cuisses qui remontent jusqu`au septieme ciel (mon mari!). Suis en train de lire « Les cavaliers » de Kessel et je me dis qu`on a pas fait mieux depuis.
Punaise ce jeu de mot au milieu du commentaire…bonheur. Je note pour Kessel, faudra que je m’y mette.
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