Orson Scott Card - La stratégie de l'ombreSous-titre : la saga des ombres, tome 1. VO : Ender’s Shadow. Dans un futur proche, des instructeurs particulièrement retors forment des enfants à la guerre. Mais laquelle ? Première étape d’une épopée à forts relents bibliques (un peu too much parfois), un presque classique de la science-fiction qui allie profondes réflexions et stratégie militaire.

Il était une fois…

Elevé à la dure dans les rues malfamées de Rotterdam, Bean a pu s’en tirer grâce à un cerveau hors du commun. A deux ans, ça parle et même plutôt bien ! Son talent ne passe pas inaperçu et, grâce à la sœur Carlotta, le voilà rapidement catapulté à l’École de Guerre. La même école qui prépare Ender Wiggin, espoir de l’Humanité, à gagner la prochaine guerre contre les Doryphores qui ont auparavant tenté d’envahir la Terre. Toutefois, le passé de Bean est plus dangereux que les E.T.

Critique de La Stratégie de l’ombre

Le Tigre a rapidement attaqué cette saga consécutivement à la lecture du premier tome de la saga Ender (dont les suites sont décevantes), et vous enjoint de faire de même : le présent roman propose en effet la même histoire vue d’un autre protagoniste  qui emprunte beaucoup au héros de l’histoire originelle – notamment l’intelligence, la faculté de faire péter les conventions ou l’inquiétant ennemi intime, en l’espèce Achille pour Bean. Aussi, ne poursuivez pas la lecture de ce billet si vous souhaitez éviter de savoir le fin mot de l’histoire de La Stratégie Ender.

Comme à son habitude, l’auteur sort la tireuse à larmes en présentant un très jeune héros chétif évoluant dans une cité crade et dangereuse. Disposant de son sens inné de la réflexion pour survivre, Bean (aussi petit qu’un haricot) affrontera de nombreux dangers, sans les éliminer pour autant, jusqu’à entrer dans le saint des saints : la base spatiale où est formée l’élite militaire de demain. Là bas, entre l’intrusion dans le système informatique des profs ou les simulations de bataille, il fera vite des étincelles, jusqu’à être comparé à Ender. Ça tombe bien, car le protagoniste est censé être le plan B au cas où la fameuse stratégie Ender se ramasse la gueule – sans qu’Ender ne soit mis au courant.

Orson Scott Card joue dans ce roman sur plusieurs tableaux. Chaque début de chapitre se présente comme un dialogue très franc entre représentants de l’école (le colonel Graff, Dimak) qui se rendent compte que leur nouveau protégé a quelques gènes modifiés, ce qui explique sa confondante maturité. Ajoutez à cela une faculté d’analyse et de réflexion hallucinante du côté du petit héros, que ce soient sur la survie en milieu hostile, créer des alliances avec des gosses, la gestion des interactions humaines (ça confine à l’éthologie) ou l’art de mener une guerre spatiale,…bref ça titille la branche « Asperger » (ce terme n’est pas utilisé au hasard) de tout lecteur. Sans compter l’intensité qui va crescendo, avec la guerre approchant tandis qu’Achille, la Némésis de Bean, est admis à la même école.

Ce style plus dense et poussé que le premier tome relatif à les pérégrinations de Wiggin sert la même histoire, à savoir l’ascension d’un bon soldat qui, urgence oblige, se voit promu commandant (les parties du roman sont ainsi bâties). A l’exception des derniers chapitres, plus axés sur ce qu’il adviendra de l’équilibre des puissances terriennes. Il s’agit autant d’une œuvre dramatique qu’un bouquin d’anticipation mâtiné de SF militaire, ce qui explique comment on peut terminer 550 pages en moins d’une semaine.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

Bean pense d’ors et déjà à des problématiques qui seront largement mises en exergue dans les opus à suivre, et ça commence par le devenir de la F.I. (Fédération Internationale) qui a regroupé les armées de la Terre sous un commandement unique afin de lutter contre la première vague d’invasion extra-terrestre – avec succès. Sauf que la seconde vague tarde à venir, et la question de la légitimité de l’institution est clairement posée. Et Beau voit avant tout le monde ce qui risque de clocher : la mayonnaise de l’unification contre une menace éloignée n’a pas assez pris et certains États (Russie et Chine) se voient déjà comme gouvernant le monde – petite claque de l’auteur au passage pour le manque de réaction de l’Ouest qualifié de « morbidité ». Ainsi à qui seront fidèles ces jeunes commandants en formation ? A la F.I. ou à leurs états nations respectives ? Dès que la guerre est finie, une autre s’emballe rapidement. Hélas, la compétition instaurée dans l’Ecole de Guerre n’a pas aidé à créé une franche camaraderie.

Si le félin ne s’est pas épanché sur les caractéristiques génétiques de Bean, c’est parce que celles-ci constituent le gros de l’intrigue en plus d’avoir une connotation délicieusement biblique. Le héros est en effet l’unique spécimen vivant d’une expérience génétique destinée à accroître l’intelligence de l’Homme. Avec une clé génétique débloquée (la fameuse « clé d’Anton »), notre héros ne fera qu’améliorer ses capacités…même physiques. Oui, il va grandir sans arrêt jusqu’à ce que son cœur lâche. Vers ses 25 années. L’idée de l’intelligence tributaire d’une mortalité prématurée n’est pas nouvelle, et la référence avec la Genèse est évidente, lorsqu’un dieu avait laissé aux Hommes le choix de goûter l’arbre de la connaissance ou celui de la vie. Et la connaissance, chez Bean, est une logique froide et intuitive ajoutée à une mémoire eidétique de tout premier plan.

…à rapprocher de :

– Cette saga sait surtout se lire dans le bon ordre, voilà ce qui suit : L’Ombre de l’Hégémon, Les marionnettes de l’Ombre, puis L’Ombre du Géant (une tuerie celui-ci) – paraît que ce n’est pas fini.

– Je rappelle qu’il faut urgemment lire La Stratégie Ender en premier lieu. Et si cet univers post-attaque doryphore vous botte, je vous renvoie vers quelques nouvelles ayant lieu avant les deux sagas. C’est Ender : Préludes.

– Du même auteur, j’ai vite zappé Robota (pfffffuii) alors que Les Maîtres Chanteurs est une superbe pépite – encore des gosses innocents aux extraordinaires capacités dans les remous de la violence des adultes, tsss.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.

Millar & Gibbons & Vaughn - Kingsman : Services secretsVO : The Secret Service. Lorsqu’un agent secret de talent prend sous son aile son neveu issu des quartiers populaires, y’a moyen que ça étincelle dans les chaumières. Drôle et doté de nombreux clins d’œil sur l’univers fantasmé des espions, ça remplit son bon office. Un poil sage cependant pour le félin qui s’attendait à quelque chose d’un peu plus percutant.

Il était une fois…

Quant un éditeur souhaite faire simple et droit au but, ça donne à peu près ça :

« L’agent secret Jack London travaille sur l’affaire la plus passionnante de sa carrière. Mais en même temps, il s’occupe de son neveu Gary et le forme pour devenir le prochain James Bond. Ensemble, ils vont enquêter sur la disparition de nombreuses célébrités et découvrir une gigantesque conspiration ! »

Famille. 007. Complot. Voilà la sainte trilogie.

Critique de Kingsman : Services secrets

Difficile de traiter ce billet sans avoir les images de l’adaptation cinématographique en tête. Car, pour votre information, Mark Millar a ici été assisté de Matthew Vaughn, qui a revêtu la double casquette de scénariste et réalisateur. Je vais le dire de go : si le film m’a profondément ravi (cette esthétique de la violence, huuuum), le comics m’a à peine fait lever le sourcil droit. Je ne me suis pas emmerdé, loin de là, néanmoins je m’attendais à être plus soufflé par l’audace des auteurs.

Le scénar’ est plutôt novateur en dépit des nombreux emprunts à l’univers des espions. Ce qui met la puce à l’oreille du MI6 (et de son excellentissime agent Jack London) est le kidnapping de nombreuses stars, notamment Mark Hamill dont la libération se termine plutôt mal. Très vite, l’enquête mène à un riche jeune chef d’entreprise (accompagné d’un gros bras avec des jambes en fer) désireux d’aider, à sa façon, la planète polluée – en gros, dégager quelques milliards de personnes grâce à des ondes rendant les gens ultra agressifs. Parallèlement, Jack prend en charge le neveu délinquant et le fait progressivement passer de grossier banlieusard en une pépite d’efficacité au service de sa très gracieuse Majesté.

Tout se termine bien évidemment. Parlons du boulot de Dave Gibbons maintenant. Les illustrations ne m’ont guère enchanté, disons que c’est trop « propre » et sans vrai caractère – gentillet est le terme que je cherchais. Alors certes les personnages sont reconnaissables entre mille et les scènes d’action très bien rendues, mais le trait est désespérément net et les couleurs vives, ce qui tend à faire de Kingsman une bande dessinée qui ne se prend guère au sérieux. Et assume de livrer un divertissement efficace et brut, hommage à la littérature d’espionnage d’un certain genre.

Pour conclure, ces quelques chapitres m’ont paru trop bien paramétrés, une sorte de story-board pour blockbuster (ce que Kingsman est, en quelque sorte). Le résultat est un rythme d’une rare intensité qui a le mérite d’empêcher tout début d’ennui chez le lecteur avec quelques bonnes idées finement trouvées – une certaine théorie du « réchauffement climatique », les célébrités au premier plan, l’inquiétant jambe-couperet. Mais, à tout bien y réfléchir, on peut se contenter du film.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

Comme je le disais, les références à l’imaginaire de l’agent secret sont légion, un vrai plaisir de connaisseur. Comme je ne sais pas m’organiser, en vrac : la scène d’ouverture digne d’un James Bond ; le méchant un peu précieux assisté d’un inquiétant auteur de basses œuvres ; les bons alcools et les non moins bonnes nanas à sauter ; le vilain qui commet gaffes sur gaffes ; les joujoux technologiques (aussi bien chez les protagonistes que les antagonistes) ; le monde entier en péril sauvé au dernier moment, etc…avec quelques notables différences, que ce soit la provenance du jeune Gary ou un des héros bouffant les pissenlits prématurément.

Étonnamment, j’ai trouvé les premiers dialogues entre Jack et Gary assez provoquant. Pour faire concis, London pourrit son neveu et lui reproche de s’apitoyer sur son sort et de gâcher sa vie, insultant copieusement au passage ses contemporains d’infortune. Le discours est de facto ignorant de l’environnement sociétal du jeune et de la manière dont de peut conditionner son avenir. La « provocation » ne s’arrête pas là puisque la populace est dépeinte comme abrutie par l’alcool, les pétards et la télévision – regardez comment Gary, sur la couverture, tient son flingue comme un rappeur de la côte Ouest.

Le fauve a donc eu une certaine difficulté à déterminer si l’auteur plaisantait ou non dans ces propos quasiment manichéens. Puis je me suis dit que la synthèse réussie de la classieuse attitude du noble espion et de l’explosivité du jeune à problèmes répondait à la question, surtout quand Jack London se plaît à garder les couvertures du Sun (parfait exemple de la presse de caniveau) des jours où il a sauvé le monde.

…à rapprocher de :

– Le Tigre signe les yeux fermés quand y’a Millar depuis que j’ai lu son Superman : Red Son. Magique.

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Théodore Monod - L’Hippopotame et le PhilosopheRecueil d’interventions sur Radio-Dakar en 1940 et 1941 d’un des plus grands naturalistes que la France aie connu, le lecteur curieux aura de quoi pleinement satisfaire sa soif d’apprendre. Non seulement les sujets abordés sont nombreux, mais l’humour pince sans rire et la critique de l’époque guerrière/barbare sont prégnants.  Un petit classique d’humilité et d’humanisme à parcourir au moins une fois dans sa vie.

De quoi parle L’Hippopotame et le Philosophe, et comment ?

Parlons d’abord de Théo. Car le félin a été pris d’un double effroi. Terreur d’abord en découvrant si tardivement cet auteur – merci au lecteur attentionné qui a menacé de publier des photos du félin sur une plage nudiste s’il n’achetait pas ce bouquin. Admiration ensuite en lisant sa biographie, car le père Monod a un parcours aussi complet que son profil est multiple. Un scientifique certes, mais qui va bien au-delà de ses domaines de compétence pour rayonner dans d’autres. Une sorte d’intellectuel-aventurier, un guerrier des mots tellement fortiche que le régime de Vichy lui a gentiment demandé d’arrêter ses chroniques radiophoniques (il faut dire que les bellicistes, racistes et autres énergumènes en prenaient, non sans finesse, pour leur grade).

Ce joli pavé se décompose ainsi en une cinquantaine de chroniques qu’il est loisible de lire quand bon nous semble, même dans le désordre le plus complet puisque Théodore Monod parle d’absolument tout : des différentes espèces de fourmis ou de palmiers à l’histoire du pygmée trimbalé dans les cours d’Europe, en passant par les représentations de la faune ou de la flore sur les timbres émis en Afrique, je vous mets au défi de me dire qu’aucune chronique ne vous a pas laissé sur le cul.

Et c’est sans compter le style qui fait ressortir de ces pages un intervenant courtois, attentionné et désireux de transmettre, en toute simplicité, son amour de la nature et de la connaissance en général. Intervenant au vocabulaire extrêmement précis surtout, capable de s’arrêter sur un mot en particulier pour le décortiquer, expurgeant toute idée reçue et invitant le lecteur à faire preuve d’esprit critique – en plus de la curiosité d’en savoir plus. A coup de bonnes phrases et d’une certaine tendresse (qui confine à un savoureux humour), le félin imagine sans problème comment la populace pouvait rester scotcher aux mots envoûtants sortant du poste de radio.

A bien y réfléchir, seules deux aspects m’ont interpellé. Déjà, c’est parfois aride à lire, l’excès d’information (notamment les noms scientifiques balancés tels des confettis) peut fatiguer à la longue. Surtout quand on ne voit pas où Théo veut en venir – la pirouette intellectuelle arrivant dans les derniers chapitres. Enfin, l’utilisation continue du terme « race », qui, si à l’époque ne choquait point, provoque toujours un effet incongru (même si dans la bouche de l’auteur, la signification est bien différente que celle de nos jours).

Beauté de la langue, plaisir de l’apprentissage, thèmes inattendus qui m’ont ravi, je crains d’avoir passé un excellent moment.

Ce que Le Tigre a retenu…

J’ai appris énormément de choses, toutefois je suis certain d’en avoir oublié la plupart.

Cependant, les interventions au sujet de la linguistique restent particulièrement mémorables, car quand Théodore nous invite à imaginer une carte des langues en Afrique, celle-ci prend rapidement forme dans votre esprit. Langues sémitiques, nigériennes, indo-européennes, un substrat ou deux qui se balade, c’est passionnant en diable. Autant que d’autres textes sur les symboles trouvés dans différentes civilisations, certains étant similaires (alors que l’éloignement empêchait tout contact), par exemple le svastika utilisé dès les années 30 à d’autres fins…

Car il s’agit d’émissions radio qui, en période de conflit, étaient relativement subversives. Imaginez un scientifique de renom, à la culture immense et doté d’un esprit de synthèse à faire pleurer un énarque, dynamiter le fantasme de la race aryenne, catapulter dans la stratosphère l’existence d’une civilisation dite supérieure, et ce en insinuant, non sans malice, comment l’Europe en guerre est en train de se perdre.  Quelques chroniques présentent, a contrario, le comportement des « barbares » africains qui font montre d’un bon sens salutaire et de respect d’autrui (autrui = être vivant, animal ou plante) dont le Vieux Continent semble avoir fait son deuil.

Monod était la voix de la sagesse, et c’est pourquoi celle-ci se devait de la mettre en sourdine pour laisser entendre les éructations des canons et le doux bruit des discours des dictateurs.

…à rapprocher de :

– Monod a une impressionnante bibliographie, j’ai cru comprendre que Méharées, exploration au vrai Sahara (une méharée est une randonnée dans le désert) et Les Déserts se laissent lire.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver cet essai en ligne ici.

Ennis & Dillon - Preacher Livre 1VO : idem. Un prêtre, dont l’esprit est occupé par un être mi-ange mi-démon, taille la route pour fuir ceux qui le poursuivent – tout en recherchant Dieu. Scénar’ qui ne part pas en sucette, reste équilibré et continu malgré des passages « putain-c-est-quoi-ce-bordel » ; road trip religieux avec des relents d’éléments très western ; humour noir (bordées d’injures comprises) qui tâche mais interpelle ; dessin de plus en plus correct : c’est un presque sans faute.

Il était une fois…

Jesse Custer est un pasteur par défaut dans un bled paumé du Texas. La veille d’un de ses prêches (où quasiment personne ne vient), il irruptionne dans le bar de la ville pour insulter les habitants. Le lendemain, y’a nettement plus de monde à l’église. Ça tombe mal puisque Genesis, divin fruit d’une union interdite, s’abrite dans sa tête (et fusionne avec lui) après avoir échappé à une prison céleste tenue par des sous-fifres d’anges. Il s’ensuit un carnage qui attire les autorités (et les proches du héros). Accompagné de son ex et d’un vampire (oui oui), il devra autant protéger (et se protéger de) ses proches que comprendre ce qui se passe au Royaume des Cieux.

Critique du premier livre de Preacher

Il est passablement difficile d’exposer en quoi les douze premiers chapitres de ce comics sont une parfaite tuerie sans spoiler dans les grandes largeurs. En effet, l’impressionnant Garth Ennis pose dans ce premier tome les principales problématiques d’une histoire dont l’intérêt est régulièrement renouvelé. Ce qui signifie que les tomes à venir sont plus ciblés, s’attardant sur tel ou tel personnage.

D’abord, le fameux Genesis, rejeton d’un ange et d’une démone qui se sont oubliés en baisant comme des bêtes. Une telle monstruosité (aux dires des anges) possède forcément des pouvoirs, notamment celui de se faire obéir par la voix de son hôte (le prêtre donc). Mais ça ne fonctionne pas avec tout le monde. Quoiqu’il en soit, l’évasion de Genesis a foutu un certain bordel dans les Cieux puisque Dieu en personne a démissionné – cause ou conséquence ? C’est donc ce dernier que Jesse tâchera de retrouver afin notamment de lui présenter la note.

C’est sans compter les divers personnages gravitant autour du héros, bons ou gentils, chacun ayant un rôle particulier à un moment de la narration. Cela va d’un taciturne vampire sans âge à Tulip, l’ex au caractère bien trempé, en passant par un assassin divin ou encore face-de-fion, dont l’histoire d’une rare tristesse parvient tout de même à nous arracher un rictus de contentement. Sans compter la famille de Jesse (la grand-mère en particulier), grâce à quelques chapitres le lecteur pourra mesurer l’étendue de la folie et de la débilité de certains bigots vivant en vase clos – oui, y’a de la consanguinité et de la zoophilie dans l’air.

ellis-dillon-preacher1-extrait1Quant au dessin de Steve Dillon, je vous avoue avoir un peu peur dans les premières pages : couleurs relativement fades, mouvements des personnages passablement rendus, seules leurs gueules (et l’environnement particulièrement travaillé) trouvaient grâce à mes yeux. Néanmoins, Le Tigre s’est progressivement habité à ce trait un peu désuet, limite gentillet et qui tranche nettement avec les dialogues et le ton ouvertement déconneur.  Voici donc comment le félin a tout simplement pris son pied à tourner les pages d’un comics dont le style et le visuel détonnent plutôt bien. Presque 400 pages, et dire que ce n’est que le début ! Je recommande vivement.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

La religion est à l’honneur, avec une double approche assez subtile dans les premiers chapitres. D’une part, du côté des humains, la bassesse et la méchanceté au nom de Dieu et/ou Jésus sont hallucinantes. Notamment la jeunesse de Jesse qui, forcé à devenir pasteur, subit diverses tortures qui n’ont rien à envier à ce qui se passait à Guantanamo – passer des jours dans un cercueil au fond du lac, brrrr. Paradoxalement, il n’y a que le vampire, chose plutôt mal vue par les religieux, dont la moralité se rapproche (attention, c’est relatif) de quelque chose d’acceptable.

D’autre part, force est de constater que ce n’est pas plus glorieux au « Paradis ». Les auteurs décrivent cet endroit en apesanteur et au décor très S.F. comme n’importe quelle entreprise en crise  qui tente de trouver des parades – moralement sujettes à caution. Rajoutez le Très-Haut qui se fait la malle sans prévenir les anges de sa destination ; les créatures célestes qui en punissent d’autres sans une once de pitié, il est délicat de distinguer qui est le gentil dans cette affaire. Ainsi naît l’idée sous-jacente que la différence entre l’enfer est le paradis n’a rien à voir avec la notion du bien et du mal.

Enfin, il est également question de blasphème dans le fond (Dieu qui lâche l’affaire) et la forme (les dialogues). Pour la forme, Ennis ne semble pas respecter grand-chose, et pour ma part ça m’a fait marrer. Mais pas hurler de rire dans la mesure où les gens parlent et s’envoient des vannes comme vous et moi, sans faire montre d’une inventivité particulière. Il s’agit d’un réalisme ordurier, ni vulgaire ni gratuit. De l’humour noir, sec et sobre. Pour ceux que ça intéresse, Dillon et son compère livrent, entre deux chapitres, les correspondances qu’ils ont eues avec certains lecteurs. Certains choqués, d’autres en demandant plus, les réponses apportées valent le détour.

…à rapprocher de :

Le Deuxième Livre (en lien) est décevant dans la mesure où beaucoup de dialogues jugés inutiles tuent le rythme. Mais c’est toujours une tuerie. Le troisième est presque pire, même si le premier tiers est à se damner.

Tigre a découvert Garth Ennis grâce à son impressionnante maîtrise du Punisher, héros renversant s’il en est : Au Commencement (somptueux redémarrage du perso) ; Mère Russie (putain de claque) ; Kitchen irish (sobre et un poil décevant).

– Je ne sais pas pourquoi, mais mon cerveau irrationnel a fait le rapprochement avec Le Chanteur de Gospel, de Harry Crews. Sans doute la puissance de la religion et les belles apparences derrière une violente réalité.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce comics en ligne ici.

Vincent Virgine - Marvin, saison 2 : La Collection des mortsDeux personnages torturés, deux êtres seuls dans la morne cité parisienne, deux mecs prêts à partir en orbite, voilà pour nos héros qui dépassent les bornes de la bienséance. Texte amer et parfois aride, violence hallucinée dans un Paris d’un glauque achevé, l’ambiance n’est définitivement pas au youpi-tralala – plus de noirceur, moins d’humour.

Il était une fois…

Dans la première saison, Marvin zigouillait tranquillos des connards qu’il croisait dans le métro tandis que Miles, ex-flic porté sur la bouteille, recherchait activement l’assassin de son épouse. Ces mêmes personnages reviennent, plus dérangés que jamais, chacun ayant ses penchants pendables – genre séquestrer son père et son patron dans une cave ou prendre des photos de cadavre. Qui est le pire des deux ? [suis pas mécontent de savoir que c’est une fiction, même si je pressens que des types de cet acabit sont autour de ma frêle personne en prenant les transports en commun]

Critique du La Collection des morts

A l’instar de la première saison de Marvin, le fauve porte à votre attention l’existence d’un auteur inclassable qui, pour la seconde fois, a osé frappé à la porte de ma modeste tanière pour m’apporter le présent roman. Même format, à savoir six chapitres censés se lire en autant de temps qu’il faut pour mater six épisodes télévisuels de 20 minutes chacun. C’est le format « série » appliqué au genre Pulp, sec et violent.

Le retour dans l’univers bipartite Marvin/Miles fut assez délicat dans les premières pages, se replonger dans l’atmosphère visuellement peu descriptive (mais intellectuellement riche) m’a causé quelques prises de tête. Sans compter que les deux premiers épisodes, empreints de rage, n’aident toujours pas à savoir qui prend la parole entre cette paire de fous. En rajoutant un vocabulaire fait d’abréviations et de prises de liberté avec notre belle grammaire (le décalage avec certains passages plus oniriques est remarquable), comprenez qu’il faut parfois s’accrocher sec.

Toutefois, il faut reconnaître que l’histoire (et la lisibilité) se décante agréablement dans la seconde moitié du roman. Le lecteur découvrira les terribles petits penchants du meurtrier et du flic qui plongent, un peu plus bas chacun, dans leur propre noirceur – entre séquestration et voyeurisme morbide. Leurs problématiques les distinguent davantage puisque Miles commence à sérieusement gamberger sur l’identité du tueur de femmes, Marvin continuant allègrement ses séances de torture. Heureusement que cette différentiation dans leurs buts s’étoffe d’ailleurs, puisque j’ai eu l’impression que ces deux personnages tendent à se rejoindre dans leur état d’esprit (paranoïa et haine du monde qui les entoure).

Enfin, j’ai comme eu le sentiment que Vincent Virgine, du haut de son talent, a pris pendant quelques chapitres une pause que je qualifierais de « sociétale ». Car les monologues intérieurs des personnages prennent le pas sur une intrigue qui parfois semble piétiner jusqu’à ce qu’un évènement relance tambour battant la machine littéraire. Quoiqu’il en soit, les saisons mises bout à bout méritent de s’y attarder – si vous supportez les longues saillies, confuses mais non dénuées de poésie, s’en prenant à notre civilisation.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

La morbide collection est, dans ce deuxième tome, une constance. D’un côté, on découvre l’odieux Marvin qui garde son papa (que lui reproche-t-il donc ?) dans son sous-sol, le nourrit sporadiquement et allume des ampoules de milliers de watts (au moins) dans la gueule à intervalle plus ou moins régulier. La collection démarre lorsqu’il décide de s’en prendre à son patron, personnage pour qui le félin ne miserait pas un kopeck. Double meurtre en préparation donc ? De l’autre côté, l’ancien policier collectionne quelque chose de plus bizarre : les photos de femmes assassinées qu’il « prépare », avant l’arrivée des poulets, pour leur faire prendre un pose presque érotique. Car ça lui rappelle feue sa tendre moitié, force est de constater qu’il tente de reproduire sur d’autres la dernière image qu’il a de sa bien-aimée – jusqu’où ce fétichisme amènera ?

Enfin, l’auteur traite, après le meurtre pur et simple, cette noble activité qu’est la torture. Celle des corps vivants, évidemment, grâce au héros de la saga. Si Virgine se garde de trop décrire par le menu les exactions commises sur des quidams pris au piège d’un fou, le malaise n’est jamais loin. Torture des esprits également, avec les deux narrateurs qui paraissent irrémédiablement basculer dans un état de stress ultime qui ne les quitte plus. Entre l’acerbe nervosité entretenue par l’alcool et la solitude amenant à un réflexe de misanthropie sans précédent, nous voilà face à deux cerveaux qui ont tout d’une poudrière. Merde, j’ai hâte de savoir ce qu’il adviendra quand Miles et Marvin se rencontreront – peut-être est-ce déjà arrivé…

à rapprocher de :

– Il est vivement conseillé de commencer par la première saison, en lien.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici. Ou, mieux, via le site de l’éditeur – qui propose même les épisodes un par un, en numérique

Les Voyages du TigreAprès avoir posé les bases de l’addiction du félin aux tailleurs asiatiques (et les trop nombreuses possibilités de se vêtir, en lien), voici l’épisode le moins glorieux de mes aventures costumées. Hélas, ma mémoire sélective a tendance à minimiser l’ampleur du désastre. C’est pour ça que je laisse ici la parole à l’ami qui m’a accueilli le temps d’un week-end.

Call me Jin

Hello, the name’s Jin Herbert Wayne Jr. – Jin pour les intimes. Y’a votre tiger qui m’a demandé de vous explain son fin de semaine à Hong-Kong. Globaly, ça représentait two days avec myself, arrivée le Friday au soir, flight retour le dimanche. I will tâcher de faire suffisamment short pour que vous ne sleepiez pas en cours de route, nevertheless some effort de votre part est bienvenu.

Firstly, you shall remember que le français n’est pas du tout my mother langage. Mon père, Californien en business trip à Shenzhen, avait rencontré ma mère née dans le mainland China. And here I am (come and take me, UB40 style) ! I grew up a Frisco, you know. There’s donc a gros risk que je mélange avec des mots anglais à chaque fois que je n’ai plus le bon en français in my head – c’est-à-dire very often. Indeed, je n’ai appris votre langue que lors d’un échange avec ma university, et ai fait la connaissance de votre pal avec qui je me suis bien entendu.

On suivait le same cours d’econometry et, sans me vanter, je lui ai saved son big ass plus d’une fois. In particular quand fallait sortir les bonnes équations et les résoudre à l’aide de logarithmic tables. Yeah, le tiger, il boast off dès que ça touche à la littérature et la culture, mais as soon as y’a des mathématiques dans le landscape y’a nobody ! A genuine quiche, je me demande encore comment il a pu entrer dans sa business school avec such a pityful level en maths. I wonder même how many meter of cocks du jury il a du sucké pour y être admis.

Well. Let’s go back au voyage hongkongais du félin.

Exactement le genre du félin

Exactement le genre du félin

As a perfect guest, j’avais concocté un programme oignons-oriented pour mon favorite little cat. Car H.K. ne manque pas de leizures. Oh que non. On aurait commencé le vendredi par un nightclub fréquenté par des students qui n’ont pas froid aux eyes, puis fat matinée in order to decuvate. Peut-être même finir avec une poule dans un love hôtel – je m’étais rencardé sur les prices des hostels à proximity, c’est dire. Le lendemain, brunch dans un panoramic restaurant, puis visite du Victoria Peak. Then le plus grand foodcourt de l’île Kowloon avant de se finish dans les différents bars des environs. Eventualy lever quelques expat’ à qui le mighty félidé aurait rappelé ce qu’est une Occidental love affair.

Et le last day, scandalously enormous cherry on the gâteau : Ocean Park Hong Kong, the cream of la crème des amusement parks in Asia. Such a beautiful program.

Je lui avais donc writté un email some weeks before avec mon programme de promène-couillon, just for his own information.

Sa réponse fut total surprise.

When classic tourism turns into tailors’ tour

Ci-joint l’answer du Tigre, in extenso :

Salut ma couille !

Alors, toujours en train de niquer les investisseurs avec tes calculs de geek ? Merci pour ton mail, j’ai en effet hâte de dérouiller de l’autochtone et leur montrer qui c’est Raoul (et ses deux petits frères rondouillards, if ya know what I mean ^^). On en profitera pour se réapproprier l’île des mains de Pékin et la revendre pour 99 années supplémentaires à ces pédés d’Anglais.

Concernant ces deux jours, je me demandais si on pouvait discrètement switcher ton trucmuche à Victoria pour aller voir un tailleur qu’on m’a recommandé. Je crois qu’il s’appelle Dongjiadu et est situé pas trop loin de ta piaule. Si t’as d’autres bons plans de tailleurs, n’hésite pas à rescheduler le dimanche. Je n’ai rien contre les parcs d’attrape-fion (tente de piger ce calembour espèce d’inculte), mais je ne serais pas contre me faire faire un petit costard pour mes entretiens de VIE.

A très vite mon coco !

Inutile de vous dire que j’étais sacrément confused. Le first paragraph est typical de mon pote, rien à dire. En revanche, ce qui suit m’a laissé coi (coi. Such a joke this word. Means nothing). Déjà, where Dongjiadu comes from ? Je ne lui ai never spoken about mon tailor favori, qui a pu lui recommand cette holy reference du Hong-Kong branché ? Ensuite, first time que je le vois décliner an invitation to have fun dans un amusement park. Le tiger, c’est le genre à se lever à six o’ clock le matin pour être le premier à utiliser une ukrainian grue transformed pour faire du saut à l’élastique on the school’s parking. Bizarre.

Enfin, y’a un truc qui ne colle definitly pas. Soit il se fout de mon face, soit il cache something pretty dirty. Des « entretiens » ? Volontariat International in an Enterprise ? I know le Tigre well, il voulait rentrer en France faire son droit, pas signer for another year and half en Asie. Ça pue l’excuse à deux cents.

Thus, as requested, je me suis rencardé sur un autres tailleur, en l’espèce WW Chan & Son Tailors, qui at this time était le must de la coquetterie. Il voulait se faire confectionner un beautiful costume ? He’s gonna en avoir a lot pour son wallet.

Nous voilà donc on Friday night, I was waiting at the fauve à la metro station de Wong Tai Sin. Le brouillard était wonderful, la pollution exquisite. La bouche d’entrée charriait ses tourists, l’air hagard, qui peinent à trouver leur way. A FFA (fucking fatty American), some hard workers, another wonderful woman, three ouvriers, a parrot, a couple…what ?!? Le perroquet…le guy avec sa multicolor shirt…oh God…ce serait…?

Et oui, that was him. Terrible chemise, pantalon X-large à carreaux (I believed it was a pyjama), casquette à l’effigie des Sisters of Mercy, my copain s’était transformé en un psychedelic nightmare à l’agressivité confirmed. Il fut delicate de ne pas se moquer de cette chose rigolarde marchant towards me en roulant du cul. Les accolades faites, je l’installais dans mon modest 30 m2 in the heart of the city – if you have any idea of le marché immobilier hongkongais, then you shall respect me more.

Le premier diner fut so bizarre. Curiously, after the first glance ses habits ne me choquaient plus, comme si my eyes avaient fait preuve de tolérance…résilience is a best word here. Pendant que nous mâchions nos noodles froides à la spicy chinese gravy, le félin orientait always la conversation vers ses chemises. Je ne dis pas qu’I didn’t give a shit about his shirts, but I’d rather taper la discute au sujet de ses sexual affairs. Et lui parler de mes last conquests dans ce domaine.

Une alléchante rue de la soif version H.K.

Une alléchante rue de la soif version H.K.

Car j’étais en mode fucking-everything-that-wears-a-dress. If you really wanna savoir, I got a nette préférence pour les early/mid-thirties qui hangaient around les bars de la City. I develop une totale expertise pour ces almost old single ladies qui avaient un je-ne-sais-quoi les rendant uniques. Like a volonté de se caser quickly pour procreate, qu’at this age la family pressure est too much big pour rester seule. Je les spottais par le smell qu’elle dégageait, cette « odeur de l’urgence » légèrement acide (almost rance) qui pour moi avait this only meaning : let me be your wife, even pour une nuit – as far as I feel désirable.

Hélas Le Tigre n’était alors pas dans ce sweet kind of spirit. Recently il avait une petite amie (I hardly believed it) qu’il me disait visiter once in a week. Du coup, nous étions very wise pendant la first night : bar à jazz classy avec que des cougars, le félin being more interested par la music que par les aguicheuses forties years old women. Maybe le problème venait de là : il n’avait pas dû « visiter » sa girlfriend (clinc clinc) for days, et comme il sait être faithful to her, he expulsed le trop-plein d’unused testostérones en achats compulsifs à HK. Et ça a envoyé du very nasty.

Let’s talk about the first day. Oh my god.

The taylorism of awful taste

Saturday, 9 a.m. :
Tiger was waking me up. So early ? Je l’envoyai donc chier. Pire qu’un cat miaulant dans mon oreille réclamant son milk, il souhaitait right now voir le premier taylor, Dongjiadu. No way, je voulais surtout dormir until the brunch. Moreover ça pleuvait dehors, aussi my motivation wasn’t so sharp as yesterday. Pour le faire patienter pendant que je finished my night, je lui avais indiqué l’emplacement du TV remote controller et le number de la channel qui passe du porn all the day long. Après s’être lavé et dressed (pour une fois, il était casual), lunch pris on the thumb, et direction les boutiques.

poorly-dressed-mariage-hkQue dire de cette visit chez le first tailleur ? Hum… In all my career, avais jamais vu a guy montrer autant de mauvais goûts. Pink or cream colors, rayés, stupid initials brodées à même le tissu, je vous avoue que votre blogueur m’avais gravement disappointed. Rien à voir avec l’idea que je me fais d’un littéraire classieux et à peu près bien dans son head. Total opposite from me.

As far as I’m concerned, je suis plutôt regular dans mes choix, voire sobre, un peu comme les coupes des gangsta dans les films hong-kongais – those from John Woo are my préférés. A mon sens, plus t’es dark et sans artifices, plus le respect s’impose autour de ton body. And some studies ont prouvé que la color black est intimement related à l’intelligence et le sex appeal. Quelque part, ça match well avec mon job d’algorithm killer qui brasse des billions de dollars avec une perfect décontraction.

Alors que tiger, c’était une mother fucking other paire de manches. Holy shit, rien que les manches are worth an entire paragraphe :

N’importe quel boy normaly constitué opte pour des manches avec one or two buttons. Au pire, des little holes pour faire passer les boutons de manchette. Considering the extremity, you have only two choices : square ou légèrement curved. Votre pote, il a tellement tout mixé que j’ai pouffé out of laugh in the middle of the magasin : en sollicitant four (yes : QUATRE) buttons jusqu’au coude avec des pointes dentelées au bout de la manche, il a provoqué some suées au taylor en plus de se voir charged another ten dollars pour la bizarrerie de sa request.

Worse, c’t’e frenchy andouille faisait en sorte que ses achats en appellent d’autres. You see ? Manches roses qui ne peuvent matcher qu’avec des boutons de manchette de la même couleur ? Okay, let’s buy some ! Pantalon en lin qui ne peut s’épanouir qu’avec une belt en tissu apparent ? No problem, y’a qu’à se procurer une fucking ceinture de carnaval ! Fuck, je ne vous parle pas des chaussettes qu’il voulait at the same color and tissue que ses pantalons…And that was only le début.

J’ai vite stoppé de tenter de comprendre son main purpose here. A la question « but, tiger, why ? », il m’assénait avec un tremendous aplomb que son dresscode était the perfect filtre à bitches. Que seuls les cœurs purs et dignes d’intérêts iront beyond l’apparence et décèleront la pépite derrière le purin (I confess I didn’t catch a single word of this last expression). Pour ma part, j’aurais plutôt parlé d’une damned waterproof-girl couche instead of a filter.

Last example histoire que vous realize ce qui clochait : around 6 p.m., on est allés chez un énième magasin, Jantzen. Lorsque le groom lui a demandé ce qu’il voulait question col, bah le tiger a répondu un truc doublement weirdo. Not only il a requis un col club, le modèle furiously amidonné avec les pointes arrondies, totalement business inappropriate, mais il a requis la girly version, à savoir le col claudine ! Un col claudine, mais what the fucccckkk !? Le tailor pensait au début que son customer était en train de se payer sa yellow face, sauf que l’air fiévreux et stubborn du fat cat l’a convaincu du contraire. Et que ce n’était pas le moment de lui donner some advice.

Votre guy (yeah, je commence à nettement me désolidariser de cet individu), je voyais bien qu’il ne s’arrêterait jamais s’il n’y avait pas son flight back to S’pore. Et, at this precise moment, je dois vous avouer n’être pas fâché qu’il reparte avec ses lubbies. Pour tout dire, son billet du retour à 17 heures dimanche avait more value than all the inavouable stuff qui était planqué dans mon coffre-fort à la HSBC.

Sauf qu’on n’était que le samedi. Il restait sunday. By jove, j’ai du mal à m’en souvenir without trembl…euh shivering – pour le peu que je remember by the way.

Sweet Hong Kongese Hangover

It was around 1 p.m., et tiger repartait dans quelques heures. Un last tailor qu’il voulait. Je n’avais plus les balls de le suivre. Etais à bout, I just wanted to cry naked au fond de ma douche. Après le tardif wakeup, on est allés à un food court pas loin de Rashmi Custom Tailors. I was tellement scared de la suite des évènements que j’ai bu pour me préparer – I learnt that World War I soldiers faisaient the same thing avant de partir au fight. Et pas qu’un little. Je me la suis seriously collée. Three Harbin Biers, five shots d’alcool de riz, alors que I hardly supports l’alcool. De son côté, le félin est resté sober comme un bird, souriant et m’encourageant tandis qu’il ingurgitait a solid rice porridge with bœuf émincé, taiwanese style.

Et c’est à ce moment que le magic a opéré : nous étions dans un state of communion comme never. Il faisait beau, the humidity in the air était supportable et j’étais fin bourré. Et je l’ai aimé as a friend. Moreover j’ai feelé son entire logic. Tout n’est question que de « let it go », a kind of libération totale, comme si mon sur-moi was deleted et que je laissais ma native essence s’exprimer en toute frankness. Et elle s’est exprimée, la little catin !

I already told you que je tiens mal l’alcool ? C’est sûrement à cause des gênes de ma mother. The worst part must be le blackout qui peut durer jusqu’à six heures. Je n’ai donc gardé que de tiny souvenirs de ce qui s’est passé between 2 p.m. and the departure of my friend. A peine si I remember la bise qu’il m’avait faite dans le H.K métro quand on s’est séparés, j’étais too much éthéré. I recovered mes esprits around 11 p.m., nu sur mon sofa avec un toblerone entamé et en train de bugger devant une brazilian novella sous-titrée en Cantonais – optimal déchéance, I admit.

Total eclipse of le bon goût

Total eclipse of le bon goût

Except je n’avais absolutly aucune idea de ce qui s’est passé pendant ces quelques hours. I am fully ashamed de la semaine qui a suivi. Pour faire short, j’ai retrouvé dans ma jacket half a dozens de tickets de banque pour le même taylor. Et je ne savais pas à quoi ça correspondait. Poor me. Now, just imagine un guy qui se réveille after a terrific party et a oublié ce qu’il a fait la veille. He’s in his bed and découvre l’étendue des dégâts en ouvrant les yeux. Like me during the week. And here is the comparaison :

1/ Tu te réveilles near a fat whale qui ronfle avec le noise d’un british dreadnought = monday, I was delivered a big colis with two pink chemises, dont une à col polo (dit « américain ») avec green nacre buttons.

2/ Then, en tournant la tête de l’autre côté, you see au bas de ton bed trois condoms qui baignent dans une mare de vomi = wednesday, le postier brought me a frightening veste en flanelle jaune (made with organic wheel) avec intérieur cousu curry color.

3/ Direction les WC, obviously tapissés de vomi = thursday morning, I found a package containing a very (too much) large pant en polyester et almost transparent. Dès que je sweat dedans, je vous jure que mes poils pubiens sont visibles.

4/ Endly, you go to your bathroom and swear to god que tu arrêteras l’alcool et les filles faciles. Sauf que tu entraperçois, in the mirror, a tiny white string dépassant de ta bouche Et là tu espères qu’il s’agit d’un sachet of tea (en fait non) = saturday, je recevais un useless paréo de two mètres carrés, à carreaux marrons sur fond verdâtre, et coupé avec la finesse d’un parang (a kind of sword).

Fuck. Fuck. Fuck. I blame him every day since. Avais dépensé pour one thousand bitchy dollars pour des trucs que je ne porte qu’aux soirées déguisées. Et aussi pour des jeux sexuels. I got some pictures, mais don’t rely on me pour vous les montrer. His maladie must have been contagious, je ne vois que ça.

Last rule : the taylor’s end has no end

Après cette périlleuse journey je crois que le fauve s’est calm down. Il a compris à quel point il avait été odious et que son behaviour était borderline. M’a même écrit une very long missive où il m’expliquait avoir expurgé de son spirit malade le poison distillé par les successive tailors. Dans son letter, il y avait des termes plutôt savants such as « catharsis » or « kierkegaardienne parenthèse ». Bref.

Finally our guy returned to Europe. Alone but happy. Apaisé. Away from the Asian textiles fioritures, il se pensait sauvé. Voire blessed by the Lord of bon goût qui l’a repris en main. Mais il avait oublié a little detail. Il avait oublié que lors de son passage, il avait passé deux heures à taper un chat avec Gary, de chez McLarry Fashions. Il avait oublié que, under euphoria, il a avoué habiter Paris et leur a proposé de passer. Il avait oublié que he gave them its own email.

He was screwed, mais il ne le savait pas encore. Car Gary et son associate passent reguliarly in the French capital pour prendre some commands auprès de leur plus fidèles customers.

Aux dernières news que j’ai eues, le cat a été effectivement prévenu de leur passage in Paname – yeah, I am familiar with French slang. Je sais aussi qu’il y est allé. Just for say « hi ». That’s what il a m’a assuré. Whatever, it’s not my pigeon anymore.

Vous ne savez pas the best part of this story ? Il y est allé et a embarqué un de ses collegues. Such a jerk le félidé. Maybe faudrait demander à son colleague comment ça s’est déroulé. Lukas qu’il se nomme. I warn you : Lukas est German, and even if il parle un peu mieux le French que votre serviteur, son teuton style may furiously hurt your eyes. Rien à voir avec moi. My job s’arrête là anyway, Tiger forbade me from écrire more than 3.000 mots.

Et puis je dois vous let down : y’a une erreur dans la suite harmonique du dernier trading software I implemented dans le Chinese Stock Options. My ass va violently chauffer si les autorities apprennent d’où ça provient.

[la suite avec Lukas est ici]

Jean Teulé - Charly 9Au milieu du 16ème sévissent en France quelques troubles notoires entre Catholiques et Protestants. Et ce n’est guère un Roi dont le lait coule encore du nez qui va apaiser la situation. Encore moins Catherine de Médicis, sa mère, ou sa Cour. Style excessif et humoristique mais potentiellement ennuyeux, j’ai eu un mal de chien à en venir à bout – malgré les aérations du livre.

Il était une fois…

Voici un feignantissime copier-coller du quatrième de couv’ :

« Charles IX fut de tous nos rois de France l un des plus calamiteux.

A 22 ans, pour faire plaisir à sa mère, il ordonna le massacre de la Saint Barthélemy qui épouvanta l’Europe entière. Abasourdi par l’énormité de son crime, il sombra dans la folie. Courant le lapin et le cerf dans les salles du Louvre, fabriquant de la fausse monnaie pour remplir les caisses désespérément vides du royaume, il accumula les initiatives désastreuses.

Transpirant le sang par tous les pores de son pauvre corps décharné, Charles IX mourut à 23 ans, haï de tous.

Pourtant, il avait un bon fond. »

Critique de Charly 9

J’aime bien Jean Teulé. Celui-ci a offert au félin d’inoubliables moments de lecture, entre rires aux éclats et grincements de dents, le tout en se cultivant suffisamment pour ne pas avoir l’air du dernier abruti dans les galas parisiens. Et l’excellent début de Charly 9 augurait d’un agréable moment : un Roi de France à la ramasse à qui les proches lui conseillent de zigouiller deux-trois Protestants en pleine festivité, ces assassinats ciblés se transformant au fil des dialogues en un impitoyable massacre qui a encore sa double page dans nos livres d’histoire.

A l’instar du titre de l’œuvre qui tend à faire du protagoniste une pop star, un détachement rigolard se fait sentir dans la narration d’un personnage historique qu’on découvre au jour le jour. Et ce n’est guère reluisant : Charles IX, qui passe plus de temps à éviter ses obligations et niquer sa maîtresse qu’à prendre les rênes du pays, commence à somatiser le massacre qu’il a, par paresse, ordonné. Au point d’être en proie à de savoureuses hallucinations (l’entraînant dans de grandes parties de chasses imaginaires) et à transpirer du sang – mon ami docteur me glisse le terme « hematidrose » à l’oreille. La tragédie laisse vite la place à la comédie, qui néanmoins fait preuve de résistance.

Néanmoins, si certains paragraphes sont réjouissants à dévorer, force est de reconnaître que ça gave à la longue. C’est même parfois très confus. Comme si Jean T., point mécontent des saillies verbeuses de ses protagonistes, décide d’en remettre des couches, quitte à perdre une partie de ses lecteurs en cours de route – dont votre serviteur. Aussi, le rendu du phrasé de l’époque auquel se mêlent quelques bons mots contemporains ne fait pas souvent mouche. Teulé a de la sorte progressivement flingué son roman qui, au fil de ses nombreux chapitres aérés, devient paradoxalement plus lourd à suivre.

Quant à ce qui aurait pu sauver l’œuvre, savoir une certaine exactitude historique, à peine si j’ai pu me sentir plus cultivé en refermant le bouquin. Sans compter que, en présence des nombreux délires de l’écrivain, on ne sait pas vraiment dans quelle mesure telle ou telle anecdote retranscrit fidèlement la réalité (des préparatif d’assassinats de Coligny à l’invention du poisson d’avril, en passant par les frasques du monarque comme frapper des pièces en fer pour les distribuer au bon peuple). A lire en tant que fiction avant tout.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

Je suis un poil excessif : Charly Nine permet d’avoir un chouette aperçu de la nuit du 24 août 1572 et des jours aussi sanglants qui suivirent lorsque la Seine charriait ses milliers de corps gonflés. Même si les causes peuvent paraître peu claires, le retentissement dans le Royaume (et chez les voisins) est aisé à décrire. On passe d’un pays qui est à-peu-près parvenu à apaiser les conflits religieux en une poudrière en chaleur où même le jeune suzerain, mal entouré (même sa Médicis de mère préférerait qu’un autre aille sur le trône), ne sait pas comment rattraper le bordel. Et ça gronde au niveau de la populace.

Par conséquent, il est un terme qui m’est souvent venu à l’esprit : la maladie. Maux dont est affublé Charles IX certes, le jeune homme n’assumant pas ses décisions et son esprit prenant plus d’une fois la tangente – c’est compréhensible eu égard la responsabilité qui pèse sur ses épaules. Hallucinations, sautes d’humeur, gentillettes adultères, on dirait que le bon Roi incarne en personne ce qui ne va pas dans son pays. En outre, le peuple (paysannerie ou noblesse), à quelques exceptions près fait montre de la même fièvre qui habite son potentat.

Du coup, une question se pose : Charles est-il le produit de son époque (chuchotements de palais, consanguinité des Cours d’Europe) ou le principal artisan des massacres réalisés sous son règne ? Pire, est-ce qu’à cette époque le peuple avait également les gouvernants qu’il méritait ?

…à rapprocher de :

– Jean Teulé squatte correctement le présent blog : L’œil de Pâques ; Darling (coup de cœur) ; Longues Peines ; Les Lois de la gravité ; Ô Verlaine ! ; Le Magasin des suicides (bof bof) ; Le Montespan ; Mangez-le si vous voulez (terrible).

– La malédiction des rois français me rappellent…non pas Les Rois Maudits de Druon mais L’année des quatre dauphins, d’Olivier Chaline. Bien documenté et plaisant à lire. Attention c’est un essai.

– Ce pauvre C.9 me rappelle Lady MacBeth qui passe le plus clair de son temps à se laver frénétiquement les mains qu’elle pense pleines de sang.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.

Atilio Gambedotti - Cercle intimeVO : Cercanias (ça veut dire proximités, mais dans l’idée la traduction du titre en français est plus proche de l’esprit de l’auteur). Une bande de copains se fait plaisir en baisant à tout va. Petites histoires mignonnes, tout ceci reste frais et adorable (notamment les illustrations, presque enfantines) même si l’adjectif « pornographique » se doit d’être maintenu.

Il était une fois…

Voici les aventures sexuelles d’amis de longue date ici présentés (commençons par ces mesdemoiselles) : Claire, la rousse qui a le feu au derche et est toujours partante ; la brune Rachel désireuse d’accompagner Claire dans ses divagations ; le gros sentimental Adrien secrètement amoureux de la seconde ; et enfin le beau gosse Joshua adepte des plans cul un peu bizarres.

Critique de Cercle Intime

Enfin une bande dessinée pornographique au premier abord gentillette avec de délicats dessins (façon de parler) ! Ce tome se décompose en six saynètes, la plupart terminant sur une petite surprise qui renforce un humour qui ne mange pas de pain (à l’exception de la dernière histoire). Missionnaire, double Péné, éjac’ faciale, cris de plaisirs, adolescents qui s’envoient en l’air après deux minutes de parlotte, l’univers imaginé par Atilio G. est léger et sans prise de tête.

atilio-gambedotti-cercle-intime-extrait1Niveau illustrations, deux remarques : 1/ l’auteur espagnol a un certain sens du détail avec des corps bien détaillés (poils, lèvres charnues) et des décors plutôt complets – sauf quand ça nique, les gros plans oblitérant souvent les alentours. 2/ Les couleurs sont vives et plaisantes à l’œil, c’est comme si Le Tigre se retrouvait dans un épisode de Barbie avec certes un Ken surmembré prêt à lui déglinguer les amygdales. Cette impression kawaï est en outre renforcée par les mimiques angéliques des protagonistes à qui on donnerait cent fois le bon Dieu sans autre forme de procès.

Aussi, il n’est pas impossible que le lecteur ressente un certain malaise. Je m’explique : déjà, difficile à donner un âge aux protagonistes. 18 ans ? 25 ? Les héroïnes ont des visages d’adolescentes mineures, des corps de belles salopes de 21 ans et un comportement sexuel d’une femme trentenaire. Dur de s’y retrouver. Ensuite, ça n’utilise pas de capotes. Les MST n’existent pas dans ce monde, c’est fabuleux – mieux que Singapour. Enfin, les dernières planches sont tristes (voire dérangeantes), tout être normalement constitué aura de la peine pour le pauvre Adrien lorsque [SPOIL] sa promise s’offre à deux mâles en rut juste pour calmer les ardeurs de son prétendant.

Bref, peu de choses à reprocher à ce titre qui mélange érotisme, humour et camaraderie avec une certaine finesse. Toutefois, le fauve a du mal à déterminer à qui est destinée pareille BD. Si le scénario et l’ambiance générale est toute érotique, le dessin n’en reste pas moins pornographique – les gros plans risquent de déplaire à certaines.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

atilio-gambedotti-cercle-intime-extrait2Cercle Intime fait évidemment référence au cercle d’amitiés liant les protagonistes, et auquel s’ajoute l’intimité d’une vie sexuelle bien remplie. L’air de rien, Gambedotti parle de la façon dont s’articule ces deux composantes (amour c/ amitié) qui nous habitent. Et la frontière paraît claire : ils sont potes mais ne baisent pas ensembles – le frère de son amie, pas de problème toutefois. Sauf qu’Adrien, la fleur bleue du groupe, n’est pas dans cet esprit en étant terriblement amoureux d’une des filles, la réciproque étant bien sûr fausse. Ce tome joue tellement sur cette problématique que la dernière historiette est faite rien que pour lui.

L’image de couverture n’est (à mon humble avis) pas anodine dans la mesure où celle-ci (le selfie) tend à dire « voilà comment la génération sexuée des années 2010 peut vivre ». Et c’est en effet moderne, à savoir le sexe décomplexé où le danger n’a plus sa place. A la limite d’un monde de bisounours : instants charnels avec des personnes dotées d’un handicap (qui d’une chaise roulante, qui d’une aveugle) et se terminant par une pirouette humoristique, soirées gentiment déguisées, absence de violence (à l’exception d’un ou deux « salope »), bref c’est le sexe joyeux et soyeux – et où les sentiments sont rarement présents.

…à rapprocher de :

Le second (donc dernier) tome est sur le blog, évidemment. Un régal également.

– Dessin plus brouillon (noir et blanc mais finement esquissé) et histoires moins linéaires, c’est Nymphomaniaque, de l’Espagnol CoaX.

– Le dessin agréable aux couleurs acidulées et les historiettes assez marrantes me font furieusement penser à la série des Pêchés mignons, d’Arthur de Pins.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver cette bande dessinée en ligne ici.

Maryse Rivière - Tromper la mortUn tueur en série qui ne fait pas vraiment peur, une traque dans une Irlande de carte postale, un ouvrage rapide à lire du haut de ses cinquante chapitres (pour moins de 400 pages), une histoire d’amour insignifiante et inutile, ce roman a un nom : la médiocrité. Sans doute l’antagoniste principal a trompé la mort, mais l’auteure n’a pas trompé l’ennui du félin.

Il était une fois…

Yann Morlaix, ancien libraire ayant tué quelques personnes en France, avait été laissé pour mort suite à un effondrement lors de ses recherches. Cependant le mecton est vivant et s’est réfugié en Irlande où il fait coursier pour la pègre locale – en plus de buter quelques jeunes Irlandaises aux prénoms celtiques. Et lorsque des échantillons ADN prélevés sur une des victimes le confondent, la PJ de Paris et les collègues irlandais sentent le vent du boulet passer au-dessus de leurs têtes.

Critique de Tromper la mort

Qu’est-ce que j’ai pu bailler. Rien que la double narration première personne avec le gentil policier / narrateur omniscient qui se met dans la tête d’un tueur (qui l’est devenu à la suite d’une mauvaise chute dans sa jeunesse) est lourde à suivre. Que dire en outre de tous ces personnages impossibles à se représenter et dont certains auraient pu être interchangeables ? Tout ceci manque de sérieux et de profondeur, à un tel point que Le Tigre est infoutu de vous susurrer le nom du personnage principal. Et je n’ai pas commencé à évoquer le scénario.

D’une part, on aurait dit que l’écrivaine voulait à tout prix caser les thèmes classiques d’un thriller avec ce qu’il faut comme suspense salement dosé (alternance entre l’enquête et les pérégrinations du méchant) tout en assurant un happy ending aussi improbable que décevant. Maryse R. s’est même fendue d’une histoire d’amour qui ne sert strictement à rien avec la belle brune Alexia. Alors que le héros sort fréquente déjà une certaine Bérangère, ce personnage étant au passage aussi vivant qu’un marcassin écrasé sur le bord de l’autoroute,

D’autre part, il y a une ambiance qui se veut mystérieuse en mode « brume irlandaise » saupoudrée de références moyenâgeuses relativement triviales. Hélas, cent fois hélas, la mayonnaise ne prend pas : Tromper la mort se lit trop vite et les chapitres sont trop nombreux pour qu’une certaine ambiance s’installe, du coup les métaphores (de piètre qualité en outre) tombent à plat. L’immersion étant faible, le lecteur aura un certain mal à prendre l’enquête au sérieux, que les protagonistes crèvent la gueule ouverte ne m’aurait pas plus bouleversé que ça.

Je crois savoir ce qui cloche dans ce roman. Celui-ci a été « proclamé » (oui c’est le terme utilisé) au Prix du Quai des Orfèvres 2015. Je n’ai rien contre ce prix qui a le mérite du vote anonyme (assez rare), toutefois il semble que le réalisme policier a été ici plus récompensé que les qualités littéraires – sans compter que, niveau crédibilité, j’ai plus d’une fois toussé. Enfin, lorsque des flics/magistrats décernent un prix, ne vous attendez pas à voir des policiers fumer/boire au boulot, encore moins prendre quelques libertés avec la loi. Ce qui les rend aussi lisses que leurs pantalons qu’on imagine trop bien repassés.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

Voici les dernières phrases du quatrième de couverture :

Maryse Rivière est habitée par l’histoire douloureuse et généreuse de l’Irlande. Elle maîtrise les procédures de coopération internationale entre polices.

Ha ha, voilà qu’on me prémâche mes thèmes.

La généreuse quoique douloureuse histoire de l’Irlande, c’est la lutte entre Unionistes et Républicains, la survivance d’un mouvement indépendantiste mouais. L’auteure insiste également sur la crise économique qui a suivi une période de croissance effrénée pendant laquelle beaucoup se sont considérablement enrichis tandis que d’anciens activistes se sont découverts des talents de dealers de drogues dures. Hélas, sous la plume de Rivière j’ai surtout eu l’impression de lire une version bas de gamme qu’un guide touristique ânonnerait en ponctuant son discours de termes locaux pompés sur internet. Déception donc.

Quant à la coopération internationale (européenne plutôt), je cherche encore où se trouve cette fameuse maîtrise. Apprendre qu’il existe des officiers de liaison dans les capitales européennes afin de faciliter la coopération entre services ? Découvrir qu’il faut une commission rogatoire internationale pour pouvoir enquêter sur telle ou telle affaire à l’étranger ? Savoir que chacun garde jalousement son pré carré ? Montrer que la politique et la diplomatie sont prépondérantes ? La belle affaire. Surtout le sentiment renouvelé de lire un documentaire à l’intention d’étudiants de première année mâtinés de différents clichés à proscrire.

…à rapprocher de :  

– Ce titre est la suite d’un premier roman, Sous le Signe de la Souris, publié en 2009. On y retrouve notre flic et Morlaix pour se rendre compte que les deux loulous se connaissent intimement Vous n’imaginez pas à quel point il ne me tarde pas de le lire.

– Un roman policier plus « sociétal » avec des personnages crédibles serait plutôt Bien connu des services de police, de Dominique Manotti (attention, roman de gauchistes).

– Si vous voulez vraiment brouter du polar irlandais, allez plutôt lire les titres de Ken Bruen. Y’en a plein sur l’auguste blog (dans l’ordre de parution) : Delirium Tremens, Toxic Blues, Le Martyre des Magdalènes, Le Dramaturge, La Main droite du diable.

– Et si l’histoire souffreteuse de ce pays vous intéresse, je vous rappelle qu’il existe un certain Robert McLiam Wilson qui a notamment sévi avec Ripley Bogle (son meilleur), Eureka Street (très bon aussi) ou La douleur de Manfred (assez poignant).

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.

DodécaTora« Salut puissant félin ! Dans une vie antérieure j’ai fait ma petite impression en grand vampire inquiétant et séduisant. Hélas je sens que cet art se perd. Tu ne pourrais pas nous rappeler quelques titres indispensables pour qu’on les reconsidère ? Signé : Christopher L. PS : je te transmets en pj la recette de boudin à base de sang humain. »

Douze romans mettant en scène des vampires

Aaaah, les vampires, morts-vivants et autres goules aux crocs acérés prêts à croquer le cou d’une victime (jeune et belle de préférence), toute une institution ! Peur de cet être humain plus mort que vivant, correctes doses d’hémoglobine versées sur le parquet d’une chambre, romantisme effréné qui vire parfois à l’érotisme, mais également solitude de ce pauvre hère qui, d’une certaine manière, est terriblement discriminé par une bande de grenouilles de bénitier.

Avant de parcourir quelques exemples littéraires, je me dois de vous rappeler ce que ce billet ne contiendra pas : d’une part, il s’agira exclusivement de romans, les illustrés ou autres formes littéraires seront étudiés ailleurs. D’autre part, je tâcherai de prélever des titres qui ont, majoritairement, des chances de survivre dans l’esprit de nos contemporains. Ainsi, aucune (enfin presque) connerie bit-lit ne sera abordée – pour rappel, le bit-lit est un genre littéraire caractérisé par sa propension à phagocyter le rayon « science-fiction » de toute librairie qui a décidé de ne plus se respecter.

Pour ma part, je ne saisis pas vraiment l’effroi provoqué par quelqu’un qui aime boire un peu de sang. Quel est le problème ? Je préfère ça que l’eau croupie de ma douche. D’ailleurs, lorsque j’avais encore le droit de donner mon sang, une fois l’infirmière de l’EFS s’était plantée dans le marquage et avait du jeter le demi-litron de liquide prélevé. Ne pouvant supporter tel gâchis, j’avais demandé qu’elle me le mette dans une bouteille d’eau qui a fini dans mon frigo.

Bah à part l’amertume, ce n’est pas si dégueulasse que je l’imaginais. En revanche ça salit les dents, avoir sa brosse à dents à proximité est vivement recommandé. J’en parlerai un autre jour, parce qu’il est temps de passer aux choses sérieuses

Tora ! Tora ! Tora ! (x4)

1/ Bram Stoker – Dracula

LA référence par défaut, la fondation d’un mythe responsable d’hectolitres d’échappées d’urine dans les lits d’Occident et d’Orient. Sous la forme épistolaire, l’auteur anglais conte l’histoire de Mr Harker aux prises avec un Comte de Transylvanie venu faire de belles emplettes à Londres. A ma grande honte je ne l’ai pas lu, mais pressens que ce brave Dracula est autant à craindre qu’à plaindre.

2/ John William Polidori – Le Vampire

Un jeune richard british fait la rencontre du mystérieux Lord Ruthven, aussi beau que taciturne. Accessoirement, ce dernier tue la petite amie du héros, meurt mais revient épouser sa sœur (au héros hein, pas de ça dans ma tanière). Nouvelle inspirée notamment par Lord Byron lors d’une soirée que j’imagine bien alcoolisée, ce texte est un des premiers à coller aux vampires les oripeaux d’un romantisme écorché. Eros et Thanatos sont dans un bateau, devinez qui tombe à l’eau ?

3/ Anne Rice – Les Chroniques des vampires

LA référence contemporaine des suceurs de sang, ici des êtres aux pouvoirs non excessifs et contre lesquels utiliser ail ou balles en plomb est passablement inutile. Une bonne douzaine de titres à se mettre sous la canine, avec le personnage récurrent de Lestat de Lioncourt, Français de son état. Assez plaisant dans l’ensemble, même si Ma’m Rice a fait péter la psyché torturée des personnages à des niveaux stratosphériques.

4/ Stephen King – Salem

Vous pensiez vraiment que le maître de l’épouvante allait zapper goules et autres joyeusetés ? Un homme qui revient dans la ville de son enfance, quelques décès subits (et subis), des revenants relativement agressifs, une ville progressivement infectée, bref les vampires sont présentés sous leurs pires aspects La jeunesse, la mort, la survie, la peur, c’est du King pur jus. Fin du fin, y’a même le père Callahan qui pointe le bout de son nez (et qu’on retrouve dans le cycle de La Tour Noire).

5/ Théophile Gautier – La Morte amoureuse

Il ne doute de rien notre Gautier national, imaginez en 1836 l’auteur et son scénario de jeune cureton qui fait la connaissance d’une belle vampiresse qui l’éloigne de Dieu. Pour faire simple, Romuald s’éclate avec la bandante Clarimonde malgré les conseils d’un vieil abbé. Comme nous sommes au 19eme siècle, bien évidemment que l’immonde succube sera butée (dans son sommeil qui plus est) et notre ami retrouvera la voie de la félicité – c’est-à-dire celle qui ne croise pas de femmes. Tristesse, parce que Clarimonde ne faisait que boire un peu de son sang.

6/ Lucius Shepard – L’Aube écarlate

A mi-chemin entre le fantastique et le polar, suivons les aventures d’un flic vampire (il l’est depuis peu) chargé d’enquêter sur l’assassinat de la douce femme censée être offerte . Huis-clos dans un lieu d’exception (un très gros château), ce roman est également une plongée dans les arcanes de la société vampyresque. Magouilles, luttes de pouvoir, sexe à tous les niveaux, en fait les suceurs de sang ne sont pas si différents de nous.

7/ Charlaine Harris – La Communauté du Sud

Du bit-lit, le fauve est pris la main dans le sac ! Le lecteur suivra, sur plusieurs tomes, les pérégrinations d’une jeune femme dans le Sud des States. Les goules ont fait leur coming-out depuis que du sang permettant de les nourrir a été synthétisé. Le félin n’a que parcouru le premier opus, après ça part dans tous les sens (loups garous, ménades, fées, sorcières) pour que le plaisir perdure…plaisir retrouvé en revanche avec la série TV, visuellement (hum) intéressante.

8/ Richard Matheson – Je suis une légende

Un homme, seul, fait face à une Humanité transformée. Entouré de vampires, il va tenter de survivre tout en cherchant un vaccin. Matheson renverse la vapeur en nous mettant à la place de ceux pour qui la légende est, en fait, le dernier humain restant. D’ailleurs, ça se termine mal. Rien à voir avec l’adaptation cinématographique donc.

9/ Angela Sommer-Bodenburg – Le Petit Vampire

Suis tombé sur ces albums en parcourant la bibliothèque de neveu-lion pour vérifier qu’il ne planquait pas quelques bandes dessinées de Manara. Il s’agit de charmantes histoires publiées dès les années 80 pour les petiots : le petit Anton fait la connaissance d’un gentil vampire (et sa famille, dont certains membres le sont moins) qui dort dans le caveau familial que recherche activement le gardien du cimetière pour en finir avec les « monstres ». A ne pas confondre avec la série écrite par Joann Sfar.

10/ Terry Pratchett – Carpe Jugulum

24eme roman des Annales du Disque-Monde, bienvenue dans le royaume de Lancre où le bon roi, plutôt libéral, est sur le point de se faire chiper le pouvoir par une famille de vampires. Lesquels s’aperçoivent que toutes les concoctions contre eux (ail, eau bénite, etc.) n’auraient qu’un effet psychosomatique. Prenant à rebours (et avec humour) les croyances sur ces êtres, Pratchett livre toutefois un roman assez sombre dans son dénouement.

11/ Dan Simmons – L’échiquier du mal

Avant-dernier de la liste parce que le vampirisme est ici d’ordre psychologique, à savoir accaparer l’esprit d’autrui et en faire son pion. D’ailleurs une partie d’échec à échelle humaine assez savoureuse a lieu. C’est bien la seule chose intéressante dans la mesure où Dan Simmons, qui voulait écrire un roman d’horreur pure, s’est à mon sens planté sur toute la ligne. Long est chiant, je m’étonne encore (et en profite pour me féliciter) d’être parvenu à terminer cette dilogie.

12/ Stephenie Meyer – La Saga du désir interdit (putain ce titre…)

Et une belle connerie pour terminer…c’est plus fort que le fauve, faut qu’il parle de ce truc (l’avais déjà pourtant fait ici). Fascination, Tentation, Hésitation et Révélation (et Putréfaction, ajouterais-je), les titres se suffisent à eux mêmes. Tigresse m’avait forcé à aller avec elle au cinéma regarder le premier opus, j’étais le seul mec dans la salle. A la fin je soupçonne que les spectatrices avaient ensemble synchronisé leurs cycles menstruels en l’honneur d’Edward. D’ailleurs, vous connaissez l’histoire du vampire qui arrive dans un bar avec un tampon usagé ? [je crois qu’il faut que j’arrête le billet ici]

Mais aussi :

– Le sujet vous intéresse ? Allez donc lire Le livre des vampires, de Jacques Sirgent. Si avec ça vous ne brillez pas pendant le déjeuner dominical (et familial), je ne sais plus quoi faire de vous.

– Si je n’ai pas mis Leonor de Gottfried Bürger et La Fiancée de Corinthe de Goethe (XVIIIeme siècle), c’est en raison de la forme des textes, à savoir respectivement une ballade et un poème. Pas des romans donc.

– De même, je n’ai pas indiqué Vampire, de Thierry Jonquet, ce roman étant inachevé et quelques modifications substantielles devant sûrement être faites par ce maître du polar français.

– En outre, L’étranger des Carpathes de Herr Von Wachsmann a été zappé, puisque publié entre les romans de Polidori et Stocker (respectivement 1819 et 1897). Me disais que ça redondait un peu trop dans les chaumières.

– Quant à La Lignée (et la suite de la trilogie) de Chuck Hogan et Guillermo Del Toro (virus qui transforme les gens en vampires), la prépondérance télévisuelle m’a dissuadé de le mettre dans le corps de l’article – la série The Strain vaut le visionnage.

– Il y a également Le Livre sans nom (d’un auteur anonyme), qui réserve une surprise en rapport avec le thème dans le dénouement.

– Ai failli oublier Leandro Ávalos Blacha et son Berazachussetts, cependant l’héroïne est plus « zombie » que vampire à mon sens.

Sinon, je compte sûrement un jour splitter ce billet avec d’une part les romans, d’autre part les nouvelles. Puis faire les BD/poèmes/etc.

Spurrier & Stokely - Six-Gun GorillaVO : idem. Dans un futur bordélique et passablement immoral, des soldats sont envoyés au feu avec des caméras dans les yeux – l’audimat, y’a rien de mieux. Lorsque l’un d’eux survit et est protégé par un gorille parlant qui maîtrise son six-coups comme personne, c’est que rien ne sera comme avant. Western déglingué, futuriste et halluciné, voilà une sacrée pépite mes amis. 

Il était une fois…

XXIIème siècle. Bleu-3425, ancien bibliothécaire récemment largué, réagit comme n’importe quel chiard capricieux : il s’engage dans l’armée pour aller botter le cul de rebelles dans une planète colonisée par l’Humanité. On y va grâce à un portail et l’endroit (le Blister) n’obéit pas aux mêmes lois physiques que sur Terre – l’électricité est inopérante. Et là, surprise ! Au lieu d’avaler son bulletin de naissance dans les premières minutes à l’instar de ses camarades, un gros singe protège notre ami. D’où sort ce truc ? Qu’est-ce que fait Bleu-3425 maintenant qu’il est accompagné par un être surpuissant ? Comment réagissent les producteurs de la TV ? Et qui est donc ce mystérieux tueur qui siffle ses « s » tel un anaconda ?

Critique de Six-Gun Gorilla

Bordel à queue ! Cela faisait longtemps que je n’avais pas pris un tel panard ! Merde, un comics qui parvient, en 150 pages à peine, à traiter tant de thèmes, à retourner autant de fois le cerveau. Magie. Non, sorcellerie ! Et dire que Simon Spurrier était inconnu du félin, comment ne pas admirer un auteur avec une telle imagination ? Car il en faut un beau paquet. Pardonnez les idées que je balance en apparence en vrac, mais il est dur de résumer un tel scénario :

Imaginez un pauvre type sur qui les regards de milliards de téléspectateurs se posent. Un gars qui n’a rien d’exceptionnel et dont l’épopée et le destin vont ravir (et faire flipper) une planète entière. Il est la clé, mais ne sait pas à quoi ressemble ce qu’il doit ouvrir ni qu’est-ce qui se trouve derrière – tout ça à cause d’un pendentif que lui remet un gradé. Surtout qu’il est accompagné par une monstruosité génétique et que l’environnement est plus qu’inquiétant : entre le Brasier qui menace (plantes/animaux sortant de terre) et les rebelles menées par une énorme matrone, en passant par une guerre absurde où on peine à trouver les gagnants, c’est à se demander comment Bleu-3425 tient encore debout.

Pour tout avouer, j’étais moyennement fan du dessin. Du moins aux débuts. Personnages à têtes carrées limite caricaturaux (sauf le singe, étonnamment bien esquissé), violence graphique exacerbée avec d’abondants bruitages, couleur dominante jaunâtre, bref ce n’est pas forcément fluide. Mais ça colle parfaitement à l’ambiance western futuriste décontractée où les protagonistes (à l’exception notable du héros) font montre d’un humour noir qui provoque plus d’un rictus chez le lecteur. En outre, Jeff Stokely, qui ne s’embarrasse guère de gros tableaux, semble aimer les illustrations à l’ancienne (on ne distingue pas l’assistance par ordinateur).

Mieux, je n’ai pas parlé du fin mot de l’histoire, qui mélange ésotérisme sur fond de rédemption avec des considérations terriblement matérielles (abjectes même). En fait, il n’y a quasiment rien à jeter dans cette BD, même si la fin peut paraître improbable et tirée par les cheveux. Toutefois, on est au-delà de la SF : c’est du fantastique (entendez : ça ouvre plein de possibilités) avec de solides notions d’anticipation sociale, tout ceci sur fond de guérilla à la Sergio Leone.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

La première chose qui frappe est l’ambiance révoltée d’un monde où TOUT est connecté. Jusqu’aux yeux des soldats dont le but est d’offrir aux téléspectateurs la plus belle mort en direct – les premières pages donnent le ton, un début pareil ne peut qu’obliger à finir la suite sans s’arrêter. Or, c’est cette connexion (et la possibilité de stocker des informations dans le cerveau) qui sera déterminante dans un univers (la colonie humaine) où justement l’électricité et la technologie ne fonctionnent pas. C’est pourquoi la psyché du héros prend le relais, et que la science fiction bascule dans quelque chose de plus ésotérique – hallucinations, cauchemars et souvenirs en veux-tu en-voilà.

En outre, Six Gun Gorilla plonge le lecteur dans ce que le capitalisme peut faire de pire. Marx (ou un autre) disait que l’ultime stade est la guerre. On n’a jamais été ici aussi proche de la vérité. [Attention SPOIL] Il apparaît que le bijou donné au héros, à son insu, imprime les plans des prochaines attaques. Plans destinés à être livrés à l’adversaire afin que la guerre ne s’arrête jamais. Bah oui, ça rapporte aux annonceurs un conflit. Si vous rajoutez ces messages codés qui se mélangent à l’histoire d’amour du héros, dont le gorille n’est qu’une émanation de son imagination, je vous laisse imaginer la puissance narrative des derniers chapitres [Fin SPOIL].

…à rapprocher de :

– Le capitalisme futuriste dégueulasse et rigolard en BD, c’est l’indispensable Transmetropolitan, d’Ellis et Robertson.

– Dès les première pages j’ai brièvement pensé au film The Truman Show. Normal.

– Ensuite, le fameux Brasier (et la forme prise) m’a grandement rappelé le flippant Gritche dans la saga Hypérion de Dan Simmons.

(oui, rien ne ressemble à Six Gun Gorilla. Mais il emprunte le meilleur des meilleurs).

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce comics en ligne ici.