Collectif – Les contes Rouges, Vol.1

Les Artistes Fous, 110 pages.

Collectif - Les contes Rouges, Vol.1Sous-titre : une collection à lire à cœur ouvert. Sept nouvelles de longueur et qualité inégales, le rouge est à l’honneur. Barbarie exacerbée, hémoglobine, grossesses non désirées, tripes mises à nues et corps violentés, le recueil cherche avant tout à soulever un haut de cœur – et à nous arracher…un sourire. De beaux textes, toutefois le lecteur pourra avoir l’impression de tourner en rond.

Il était une fois…

La présentation ci-dessus doit vous donner une idée suffisante du contenu de ce sanglant recueil. Comme d’habitude, je traiterai chaque nouvelle séparément et avec la plus criante mauvaise foi – dites-vous que ce n’est que de la jalousie. A tout hasard, quelques auteurs ici présents ont déjà sévi chez cet éditeur, néanmoins Le Tigre a fait comme s’il ne s’en souvenait pas.

Critique des Contes Rouges

Dédicaces des Contes RougesLe Tigre en profite pour vous montrer la charmante dédicace que Maniak a eu la bonté de dessiner – click to enlarge. Ce n’est pas le premier gribouillis fait à l’intention du félin, toutefois jamais autant de couleurs n’ont été utilisées. Et, glorieuse coïncidence, le gosse déglingué sur le dessin ressemble foutrement à mon filleul.

Les Damnés de la puer (bégayé par le jovial Julien Heylbroeck)

Juju a fait péter tous les clichés des teen gore movies des années 80 en mélangeant, avec allégresse et fluidité les ingrédients suivants : un patelin au milieu de nulle part aux States avec une famille typique, un voisin un peu bourru et un mystérieux savant ; une expérience génétique dégueulasse qui inclue des nains difformes ressemblant fortement à Staline ; des attaques nocturnes avec moults giclées de sang et quelques morts dans la famille ; la grosse explosion pour la galerie ; enfin la dernière scène qui laisse ouverte la porte à une suite. A ne pas prendre au sérieux.

Murabito (balancé sans ambages par le bon Gallinacé Ardent)

Dans un hangar anonyme, un animal (qui pense comme un humain) subit les outrages de ses geôliers qui l’utilisent comme mère porteuse (mais d’une autre espèce). Glauque et vaguement dérangeant, le vocabulaire est précis sans être excessif. Court et efficace, si après vous ne songez pas à devenir végétarien… [quant au mot Murabito, et connaissant l’auteur, ce doit être une référence vaguement japonaise/geek à un villageois tout mignon. Ce qui contraste bien avec les actes odieux du fermier]

Le Goût du sang (écrit en mode ninja par la mystérieuse Lila V.)

Il y a un peu du mythe du « Vagina Dentata » dans ce très court texte (une page, lolilol) qui se termine en eau de boudin (relol). Assez réussi, même si j’ai les boules de voir que 200 mots peuvent être publiés quand je sue comme un goret avec mes 1 000 pour le présent billet.

Au nom de la mère (droppé en toute simplicité Marie Latour)

Encore un texte qui installe un certain malaise avec une femme à qui il manque la lumière à certains étages. Le début est violent, terrible (un infanticide sur fond de douloureux souvenirs qui refont surface) ; le milieu est ennuyeux (mais fait l’effet d’un temps mort) ; et la fin est d’une tristesse infinie. Je me demande cependant si cette nouvelle a sa place dans ces Contes, la folie et le déni étant plus prégnants (pregnant, hu hu).

Crise de foi (mis en sonnet par le sonné Corvis)

J’ai trouvé mon texte préféré ! Le fond, parfait : le vin est le sang, et vice-versa. Le Christ ressuscite en zombie, ses ouailles mort-vivantes étant réduites à boire littéralement le fluide rouge de leurs semblables. Parallèlement, les survivants réfugiés dans les caves ne peuvent se pinter la gueule, le vin étant devenu sang. Quant à la forme, il s’agit de trois opus délivrés en poèmes (sonnets en alexandrins, s’il-vous-plaît) et dépeignant chacun, avec humour, un tableau de cette situation désespérée.

Contre nature (Schweinhund hat es geschrieben)

Double narration avec, d’une part, une femme enceinte qui sent que son rejeton est en train de pomper son fluide vital (après avoir « absorbé » son jumeau), et d’autre part le fœtus en question qui se repaît des douleurs de sa mère et ne fait rien pour arranger son état. Le vocabulaire utilisé est riche, spécieux, aussi ai-je eu l’impression que l’auteur tenait sa bite dans sa main pendant qu’il délivrait son verbalisme fait de jeux de mots et autres astuces linguistiques – heureusement que les phrases courtes scandent le style. Le résultat est un texte qui émeut, certes, mais laisse une impression de bric-à-brac d’expressions à double sens.

Wolf Rock (imaginé par Diane, avec qui j’hésiterais à prendre un verre en tête à tête)

L’éditeur vante la communion du lecteur avec l’esprit d’un serial killer, pour ma part cette dernière nouvelle (la plus longue du recueil) n’a pas rempli cet office. En revanche, même si les péripéties sont hautement improbables (l’auteur ne se penche guère sur la logistique, l’anti-héros ne se faisant pas gauler), celles-ci sont réjouissantes – on se laisse aisément porter. Le dénouement, en forme de résurrection, ajoute une dernière touche de poésie (et de répit) à un texte torturé dont je craignais une fin obligatoirement tragiquissime. [à tout hasard, le titre renvoie à un phare perdu qui représente énormément pour le protagoniste]

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

A mon humble avis, les premier et dernier textes comportent globalement toutes les allégories de la couleur objet du présent recueil. Le sang bien sûr, un peu de sexe (les allusions avec le petit ami de l’adolescente, Billy, et la tuerie consécutive à l’adultère), et puis la révolte – que ce soit la lutte finale contre les petits suppôts du communisme ou un homme seul qui vomit son époque. Cependant, le félin regrette de ne rien avoir trouvé de joyeux dans cet ouvrage, qui traite de manière négative le rapport au rouge. Il n’est question que de douleur. Je ne dis pas que ce n’est pas intéressant, néanmoins la palette de la couleur est désespérément monochrome. Parler des bienfaits d’une bonne saignée ou de l’utilisation créative de la matière sanguine, avec espoir et optimisme, n’aurait pas été de trop. Dommage.

Sinon, deux textes (sur sept quand même) évoquent une certaine forme de vampirisme du fœtus, avec un chérubin en gestation dépeint comme un monstre avide de pomper le fluide vital d’une maman, laquelle basculant dans la folie (ou l’étant déjà). Or, ces problématiques m’ont déjà rappelé un ou deux textes précédemment lu chez l’association/éditeur, de là à annoncer que Les Artistes Fous ont un léger problème vis-à-vis de la maternité (voire de leur môman), il n’y a qu’un pas…[que Le Tigre ne franchira pas, étant trop poli pour cela].

…à rapprocher de :

– De cet éditeur doux-dingue, les hostilités ont été ouvertes avec Fin(s) du monde. La suite intitulée Sales Bêtes ! est d’une rare qualité, et Folie(s) est globalement correct. Les Contes marron (premier volume), sont un réjouissant appetizer. Quant aux Contes roses, petite déception hélas. Même topo avec L’Homme de demain, mitigé.

– Un auteur réussit à se mettre à la place des serial killers, et c’est Keith Ablow. Notamment dans Psychopathe (en lien). Voire Neil Gaiman, dans La maison de poupée (un opus du héros Sandman).

Enfin, si vous souhaitez juger de la chose par vous-même, c’est disponible sur le site de l’asso (en lien, et normalement le téléchargement sera bientôt gratos).

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