J. G. Ballard – Sauvagerie

Tristam, 119 pages.

J. G. Ballard - SauvagerieVO : Running Wild. Ce court titre est un exemple basique du génie de Ballard : sous couvert d’une enquête, ce sont quelques travers de la société moderne qui sont exposés. La réaction explosive de certains protagonistes, bien qu’exagérée, laissera le lecteur dans un certain embarras. Premier livre à acheter pour découvrir cet Anglais si spécial.

Il était une fois…

Pangbourne Village est un « gated community » aux abords de Londres, ses résidents (une dizaine) sont aisés et ont tous réussi. Hélas tous les parents sont un beau jour trouvés assassinés, et les enfants kidnappés. Parce que le visionnage des vidéos ne donne rien, les enquêteurs font appel à un psychiatre, pour trouver ce qui a bien pu se passer. Et derrière ces crimes horribles se cache une réalité qui ne l’est pas moins.

Critique de Sauvagerie

James Graham Ballard, hélas décédé en 2009, serait un grand auteur de SF. Mais c’est surtout, selon Le Tigre, grâce à ses œuvres d’anticipation sociale qu’il a marqué son monde (à l’image d’un Chuck Palahniuk). Cette nouvelle remplit toutes les conditions du genre : bref, sec, sans concessions, horreur à tous les étages, phase final sublime et atterrante.

Sans spolier et priver le potentiel lecteur d’un plaisir bien légitime, disons qu’on peut prévoir la fin du roman à mi-chemin de celui-ci, mais cela n’ôtera en aucun cas l’intérêt de l’œuvre. On sent poindre la monstruosité des vrais responsables du carnage, et Ballard expose froidement les raisons d’une telle réaction. On en voudrait presque aux victimes pour ce qu’elles ont autrefois accompli.

Cette nouvelle, qui se lit en une bonne demi-heure, est tout simplement le syncrétisme (ouh le joli mot !) de ce que peut offrir l’anticipation sociale anglo-saxonne, en plus d’ouvrir le lecteur au génie de Ballard à moindre frais.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

La vidéosurveillance à outrance. Le petit village a un ratio caméras / m2 qui ferait rougir de plaisir Guéant (et Le Tigre reste poli). Hélas ce dispositif est tant inutile pour la prévention que pour l’élucidation des crimes de ce roman. Lorsque les malfrats sont familiers des outils de protection du citoyen, les contourner comme dans ce roman reste possible, même si c’est très retors. Quoiqu’il en soit, la vision des bandes d’enregistrement est plutôt bien rendue par l’auteur, les images s’imprimant naturellement dans l’esprit du lecteur.

L’organisation millimétrée de la vie de sa progéniture. Les habitants de la petite bourgade appartiennent à la haute. « upper crust » comme on dit là bas. Les activités qu’ils préparent pour leurs rejetons sont nombreuses et de qualité : équitation, musique, tennis,… Du coup le temps libre restant est quasiment nul.

[Attention SPOIL !]. Imaginez votre enfance sans pouvoir glandouiller tranquillement de temps à autre. Ou votre vie en général. De quoi devenir passablement dingue…et avoir des envies de meurtre. Pas le même niveau que les « sauvageons » dénoncés par un certain ministre en France. [FIN SPOIL]

…à rapprocher de :

– Des meurtres, des enquêtes, une fin surprenante, les romans de ce type sont légion, néanmoins peu parviennent au même tour de force. Agatha Christie parfois, Joe R. Lansdale souvent, ou alors les longues enquêtes de Greg Mandel (premier opus ici), par Peter F. Hamilton.

– De Ballard, il y a aussi de la SF, comme sa « tétralogie des catastrophes » : Le Monde englouti, La Forêt de cristal, Sécheresse, Le Vent de nulle part.

– Petit SPOIL attention : les actes assumés et froidement préparés des vrais tueurs m’a fait penser aux terrifiants protagonistes du Village des damnés. La reprise de 1995 est assez bien réussie à ce titre. Voire Monster, le manga. En vous priant de m’excuser pour ces indices sur la fin du livre.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez le trouver sur Amazon ici.

7 réflexions au sujet de « J. G. Ballard – Sauvagerie »

  1. Ping : Sauvagerie, de J.G. Ballard - Lorhkan et les mauvais genresLorhkan et les mauvais genres

  2. Bonjour,

    moi de J.G. Ballard, j’ai lu Concrete Island (L’Ile de Béton), IGH et Empire du Soleil. Je n’ai pas aimé du tout les deux premiers, par contre Empire du Soleil est vraiment bien.

    Son expérience de prisonnier dans un camp japonais durant la Seconde Guerre mondiale est passionnante et très bien décrite.

  3. Bonjour Tigre,

    De Ballard je te conseille I.G.H. et Super-Cannes, deux excellents romans d’anticipation sociale. Ballard n’a pas une vision très optimiste de la nature humaine mais c’est un écrivain brillant !
    Merci pour ta critique, je vais me ruer sur Sauvagerie que je ne connaissais pas.

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