Sur-titre : une aventure des Petits Hommes. Je n’y connais que goutte aux p’tits hommes, et pourtant cet album fut une délicieuse lecture. Plus haut, plus loin, plus fort, Pierre Seron sort des sentiers de la BD strictement franco-belge pour nous livrer une délicieuse dystopie mâtinée de science-fiction apocalyptique. Bienvenue dans un monde en noir et blanc.
Il était une fois…
Dans une aventure précédente, Cédille, Renaud et Vendredi revenaient de leur épopée sur la Planète Ranxérox. Sauf que leur vaisseau est entraîné dans un objet particulier : un trou blanc – voilà pour justifier le titre. Au-delà du fameux trou, ils trouvent une terre assez différente de la nôtre : tout est en noir et blanc et des robots tueurs en plastoc sillonnent la planète.
[hélas oui : c’est la suite d’une histoire déjà bien entamée. Mais ne vous inquiétez donc point, je n’ai pas lu les opus précédents et c’est passé comme une lettre à la poste.]
Critique du Trou blanc
Le Tigre a, une fois de plus, abordé une bande dessinée en ignorant tout des héros et de l’univers attaché à la série. Pour faire simple, j’ai cru comprendre que les Petits Hommes sont devenus minuscules à cause d’un mystérieux météore aux propriétés fascinantes. Comme si la petitesse était associée à une intelligence grandissante, les protagonistes ont su développer une technologie supérieure.
Les héros de cet opus sont au nombre de trois (Lapoutre apparaissant tardivement) : le beau gosse de base, à savoir Renaud (malgré son prénom) ; la belle blonde un poil nunuche qui gueule dès qu’elle a peur ; et le black finaud avec un accent à couper au couteau et une gouaille plutôt savoureuse. Voilà pour les personnages. Quant à l’univers où ils atterrissent, il faut avouer que le scénariste s’est fait plaisir : le lecteur se retrouve dans un monde en pleine guerre dans un style de la saga Terminator.
Par de nombreuses (quoique bien dosées) péripéties, nos gentils petiots vont découvrir que l’endroit est extrêmement dangereux et qu’une guerre sourde fait rage. Des militaires peu subtils (qui les capturent dans un premier temps) sont aux prises avec des robots qui semblent dompter la gravité. En remontant l’origine de cette menace, Renaud et ses potes vont faire la connaissance d’une immense cité faite de blocs de plastique au sein de laquelle se planque la solution à quelques un de leurs problèmes – en particulier comment rejoindre leur monde originel.
La première chose qui m’est venue à l’esprit, concernant les illustrations, est que l’auteur ne s’est définitivement pas foulé le pouce droit : presque tout est en noir et blanc ! Mais plus les planches déroulent, notamment à partir de la seconde moitié, plus le dessin se fait léché : outre la gueule bien travaillée des soldats, l’architecture de la ville de robots est une petite pépite qui vaut à elle-seule le fait d’ouvrir la BD. A bon entendeur…
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Pierrot Seron a su nous faire entrer dans un monde suffisamment intriguant pour vouloir continuer la lecture. L’absence de couleurs (et ce depuis toujours dans la planète parallèle) est associée à des blocs de plastique qui ne sont pas sans rappeler des Lego – une mer faite de cet assemblage, il fallait y penser. L’atmosphère se fait alors plus oppressante. Tout ceci participe à l’impression d’être dans un environnement à la fois fade et comme pixelisé (regardez l’image de couverture), ce qui ajoute une touche de malaise. Franchement, personne ne souhaiterait habiter pareil endroit.
A mon humble avis, l’intrigue relève de la dystopie la plus pure et, pour un album datant du milieu des années 80, le scénariste était dans l’air du temps. Il est question d’une apocalypse terrible qui a sévi sur la planète, et consistant à la prise de pouvoir par les machines. On aurait pu s’arrêter là, toutefois la cité en plein milieu de l’océan révèle quelque chose de plus terrible : [Attention SPOIL] le créateur, l’être humain responsable de tout ce bordel est décédé depuis des lustres, et les robots ont su s’épanouir sans lui. Et oui, il est tout simplement question de la survenance de la singularité. Chapeau. [Fin SPOIL]
…à rapprocher de :
– Franchement, aucune idée pour l’instant.
J’avais lu (plusieurs fois) cet album en librairie étant gosse. Il me plaisait moins que son prédécesseur (« La Planète Ranxérox ») où Seron abordait déjà une histoire de monde en noir et blanc, là encore matinée de dystopie, mais sans doute plus compréhensible pour le jeune public auquel s’adresse la série. Je dois dire que le propos sur la singularité m’avait alors échappé à tel point que je n’y aurais pas pensé en évoquant cet album dans mon souvenir – mais à ma décharge, à l’époque je n’avais que onze ans…
À rapprocher, outre de « La Planète Ranxérox » pour la raison sus-citée, d’un album ultérieur qui, bien qu’en couleurs, était lui-même très noir puisque l’auteur n’hésitait pas à évoquer la fin de ses personnages et de leur univers : « Le dernier des Petits Hommes ».
J’avais l’album sous les yeux, pipoter est plus aisé. Il va falloir que je rançonne mon vieil oncle pour récupérer les suites alors…ou plutôt filer dans une bibliothèque. Merci pour ces indications Anudar !