Richard Morgan – Anges déchus

Milady, 606 pages.

Richard Morgan - Anges déchusVO : Broken Angels [on reproche souvent à Bragelonne de traduire que moyennement les œuvres, toutefois sur le titre c’est un sans faute…]. Après un premier tome satisfaisant, l’auteur augmente un cran dans l’action et la hardscience. Science-fiction militaire réaliste avec un héros qui part à l’aventure rechercher une relique martienne, que du bon.

Il était une fois

Quelques décennies se sont passées depuis les dernières pérégrinations de notre ami Kovacs. La situation géopolitique a pas mal évolué, l’ONU locale s’étant progressivement effacée face aux grosses entreprises. Cela occasionne quelques troubles, notamment sur une planète où, comme par un fait exprès, un étrange artefact a été découvert. Une boîte propose au héros de récupérer ce truc moyennant finances. Celui-ci, n’écoutant que riri (son morlingue), fifi et loulou (ses burnes), décide bien sûr de s’y coller.

Critique de Anges déchus

Waoww. De mieux en mieux, ou pire en pire (c’est selon) dans la mesure où l’intrigue se révèle encore plus complexe que Carbone modifié, premier opus de la saga de Takeshi Kovacs qu’il faut mieux lire d’abord.

Le héros récurrent de la série, que l’on retrouve plus pimpant que jamais, est mandaté par Mandrake Corporation et fait équipe avec un autre militaire (Schneider si je me souviens pas) pour sauver une pauvre archéologue emprisonnée sur Sanction IV. Cette planète dévastée par les bombes A regorge d’artefacts martiens, et en particulier un objet qui a l’air d’envoyer du lourd. Sans grossièrement spoiler, la chose tant recherchée semble être une porte vers un vaisseau qui serait le vestige d’une civilisation extra-terrestre que le lecteur va petit à petit découvrir.

A la différence de la première rencontre avec Takeshi K., c’est ici résolument porté vers la baston et l’aventure. Les dialogues sont toujours aussi enlevés, drôles et percutants. Cependant, ce n’est pas que gros bras et testostérone de taureaux sous amphèt’, l’auteur prenant à bras le corps quelques sujets pointus sur la politique ou la religion. On regrettera qu’il ne dévoile pas plus les dessous du quellisme par exemple, sorte de doctrine qui promeut le principe de « la révolution occasionnelle » (troisième tome en fait), ni le pourquoi ou le comment de ce que sont ces Martiens (même si on a un aperçu d’une rare violence).

Pour conclure, la logique implacable et terriblement noire de Richard Morgan a encore fait mouche, et à partir d’une petite opération pépère l’auteur a réussi à monter une problématique finement ciselée (enfin j’ai trouvé) avec quelques menues considérations (à la limite de l’éthologie certes) sur le fonctionnement du corps humain.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

Ce roman se situant une trentaine d’années après Carbone modifié, le lecteur se réjouira en apprenant que l’univers ultralibéral est devenu encore plus pourri. Le pouvoir est aux mains des « Cartels » (déjà le terme annonce la couleur), puissantes compagnies qui ont encore les moyens de faire la pêche aux artefacts. Le représentant d’une de ses sociétés, Matthias Hand, est fort bien rendu, on sent le mec qui sait ce qu’il vaut et n’hésite pas à écraser tout ce qui le dérange. Un homme comme Tigre les aime.

Attention, y’a pas que ces vilains conglomérats. Morgan évoque aussi la religion avec des fanatismes qui ne sont pas sans rappeler les jaillissements intellectuels contemporains, les États en déroute, la représentation de l’autre (l’alien), etc. Bref des concepts assez bien étudiés qui mettent en exergue l’insondable connerie humaine et notre esprit tordu.

Le félin a apprécié le degré de réalisme militaire de l’opération de sauvetage. D’abord, se mettre subtilement en congé de l’armée. Puis mettre en place une équipe, sélectionner les candidats et assembler les corps (sachant qu’ils vont être irradiés à mort sur Sanction IV). Ensuite, récupérer quelques financements et bien choisir sa compagnie, ni trop puissante ni trop petite. On rajoute les entraînements, briefings et combats sur place (petite mention aux nanomachines qui font de la merde), on s’y croirait. Surtout quand l’écrivain britannique décrit les armes, stratégies et scènes de façon si méthodique.

…à rapprocher de :

– Cette saga commence avec Carbone modifié et se termine avec Furies déchaînées. Le dernier tient la route, et je ne saurais trop vous conseiller de les lire dans l’ordre.

– Si vous avez peur d’être entraîné dans ces aventures, y’a un one-shot très correct du même auteur : Black Man. Sombre avec d’excellentes idées également.

– Pour des sagas qui partent dans tous les sens et sont autant « décomplexées », vous pouvez sans risque vous frotter aux Aux’, de Gunn. Tome 1 et tome 2 sur QLTL, joie.

– Les sociétés privées comme unique levier pour aller (et récupérer la mise de fond sans états d’âmes), c’est Dragon déchu de Peter F. Hamilton. Ooooh, oui, y’a le même adjectif. Vive moi.

– Autre techno-thriller saaaans prise de tête en version française, ça donne Incursion (en lien) de Pierre Brulhet. Court et pas sérieux pour un sou.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.

6 réflexions au sujet de « Richard Morgan – Anges déchus »

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