Sophie Hénaff – Poulets grillés

Albin Michel, 345 pages.

Une brochette (sans jeux de mots) de flics déchus qui, en un temps record, résolvent une enquête fort sensible ; des personnages déglingués et attachants ; un style simple un peu familier ; bref un roman sans prétention qui sait se lire dans un Paris-Marseille en train (ou une autre destination d’un peu plus de trois heures).

Il était une fois…

La commissaire Anne Capestan a eu la gâchette facile de trop. Après six mois de suspension, le boss du 36, quai des Orfèvres lui annonce la sentence : elle sera à la tête, dès la rentrée, d’une brigade composée des policiers les plus placardisés des alentours. Officiellement, pour faire péter les statistiques de la police : que des effectifs efficaces…à l’exception de la brigade de Capestan. Officieusement ? A voir… Fera-t-elle d’une telle bande de branques ce qu’on attend d’elle ?

Critique de Poulets grillés

Offert par un membre de la famille (qui ne doit pas me lire, ça tombe bien), cela faisait longtemps que le félin se disait qu’il fallait rapidement parler de ce polar comique/haut en couleur. Loin de représenter le thriller de l’année (voire du mois), Poulets grillés est à l’image de son titre : facile, sans grosse surprise, et un poil caricatural.

En effet, en évoquant les flics cramés, Sophie a envoyé du lourd (je n’ai pas dit du pâté, ce serait indigne de moi) : le Torrez qui porte une phénoménale poisse (au point que tous tendent à l’éviter) ; l’ancien de l’IGS trop zélé ; le bavard rencardant les médias (pour la bonne cause) ; la Rozière, flic écrivain/scénariste de série policière pleine aux as et dont les goûts laisseraient à désirer ; les fous du volant ; et last but not least, l’alcoolo fini qui s’assume. Il n’y a que la protagoniste qui a l’air à peu près normale – si ce n’est faire montre d’un manque de patience préjudiciable.

Et que fait tout ce beau monde ? Ils trouvent, parmi les dossiers non résolus, les deux seuls meurtres. Lesquels ont forcément un lien entre eux. L’enquête reprend, et on s’aperçoit que le travail avait été à l’époque fort bâclé. En parallèle, le lecteur aura droit à quelques chapitres, plus énigmatiques, sur des personnages dont on ignore tout dans des contrées loin de nos héros. Tout ceci pour joindre les fils narratifs de manière assez invraisemblable, pour un mobile qui peut surprendre – sinon décevoir.

Au moins, les femmes sont à l’honneur.

Thèmes abordés (du moins  selon Le Tigre)

L’air de rien, l’auteur lâche, de façon certes grossière, quelques travers de la maison poulaga – attention, ça ne s’applique pas qu’à l’univers de la police, la plupart des organisations sont concernées. En vrac : le flic homo qui perd son compagnon (et est muté quand son orientation sexuelle est dévoilée) ; la femme qui règle ses comptes (avec les magistrats, puis ses collègues) en écrivant des scénarii où chacun se reconnaît ; le gars avide de justice, qui en bossant chez les bœufs carottes dénonce quelques collègues (à raison certes, mais ça ne passe pas) et est gentiment remercié. Autant d’accidents de la vie, associés au manque de soutien de la hiérarchie, qui créent des cas sociaux soigneusement remisés dans un placard.

Comme beaucoup d’histoires où les morts s’accumulent sans raison apparente, il y a un lourd secret qu’un individu tâche par tout moyen de cacher. [Attention minispoil] Du genre étonnant, qui implique une opportunité brusquement saisie pendant un naufrage, une sale histoire de famille avec plus de témoins que prévu. [Fin spoil]. Sauf que dans notre cas d’espèce, le but poursuivi par le meurtrier (protéger un proche) semble bien excessif, à tout du moins disproportionné par rapport au risque final – surtout eu égard son statut.

…à rapprocher de :

Pas grand-chose dans la bibliothèque tigresque à part quelques autres romans de gare.

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