Ugo Bellagamba – Tancrède : Une uchronie

Folio SF, 384 pages.

Ugo Bellagamba - Tancrède : une uchronieFolio SF, vraiment ? Utopie, ah bon ? Malgré un packaging trompeur, Tancrède reste une sympathique aventure dans un univers original et ici plutôt bien rendu, les Croisades. Épopée instructive, uchronie subtile, trop sans doute. Au moins, un auteur français s’est essayé au style.

Il était une fois…

En l’an de grâce 1096, peu de temps après l’appel de Clermont, le bon Normand Tancrède de Hauteville s’apprête à délivrer la ville sainte en accompagnant son oncle, Bohémond de Tancrède. Marcher sur Jérusalem, en passant par Constantinople, Tripoli,…le jeune chevalier se réjouit de l’aventure à venir, autant spirituelle que physique. Néanmoins l’Orient mystérieux est bien plus complexe et multiple qu’il n’aurait pu l’imaginer ; aussi ses préjugés et croyances vont progressivement tomber, un par un. Jusqu’à l’uchronie.

Critique de Tancrède : une uchronie

Si Le Tigre a résumé l’histoire en prenant (tentant de prendre plutôt) un glorieux style moyenâgeux, c’est parce qu’une grosse partie du livre est ainsi écrite. Bellagamba s’est attaché à écrire « à l’ancienne », et si au début c’est déroutant (voire chiant), on s’y fait à la longue.

A partir d’archives retrouvées par erreur (du moins c’est ce qu’il fait croire au lecteur), l’auteur revisite la croisades lancée par Urbain II à la fin de l’année 1095 en imaginant pour le héros, Tancrède de Hauteville, un tout autre destin. Le jeune Tancrède, dégoûté par le comportement des Croisés et remarquant que les « Infidèles » ne sont pas si barbares que prévu, va peu à peu lutter contre son propre camp (première partie de l’ouvrage) avant de rejoindre la très underground confrérie des Assassins (deuxième partie).

380 pages, c’est passé plutôt vite et la lecture fut (en fin de compte) agréable. Disons que le lecteur sera bien plongé dans le sombre environnement de la première croisade. Totale immersion dans les luttes toujours plus politiques que religieuses, souvent intestines entre les forces en présence : Arabes (Sunnites ou Chiites), Chrétiens, Turcs, Grecs (Byzance, l’Empire), et tout un tas d’autres factions. N’ayez pas peur si, comme moi, vous êtes de temps à autre largué.

L’histoire est plutôt bien menée, considérant qu’on ne sait pas vraiment où Bellagamba nous mène. Les ficelles sont parfois grosses mais le final parvient à laisser une impression générale assez bonne. Hélas si Le Tigre note négativement cet ouvrage, c’est pour ce que le roman annonce mais n’offre guère : l’uchronie (cf. infra), ou un peu de SF.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

Le Tigre s’imaginait de grand art de l’uchronie en effet différemment. Comme Le Maître du haut-château de K. Dick, ou les Blocks 109, le principe est qu’on pose un moment où l’histoire dévie, puis l’auteur imagine un futur alternatif (qui n’est pas forcément dans notre futur). Dans Tancrède, le point de « déviation » n’apparaît pas tout de suite, et le non connaisseur de l’histoire des Croisades sera perdu sur ce qui relève de la réalité et de la fiction. Bon, les machines à vapeur imaginées grâce à la bibliothèque d’Alexandrie, on se doute être en plein dans l’uchronie.

La tolérance. Notre croisé de héros va découvrir les charmes de l’Orient, et bien évidemment renier jusqu’à sa foi en voyant comment celle-ci est invoquée pour provoquer tout un tas d’horreurs. Tancrède rencontrera des philosophes, des émirs, l’empereur des Grecs, des califes, des gens du peuple, et s’apercevra que ces contrées sont bien plus complexes qu’il n’y paraît. Curieusement (logiquement en fait) il épousera la cause, jusqu’à être leur chef, des Assassins, entraînés à tuer dans la Montagne afin d’éviter qu’une partie ne prenne définitivement l’avantage en Orient.

Les prix douteux dont l’éditeur n’enorgueillit. Attaché au roman, une « banderole » annonçant Le Prix Rosny aîné et le Prix européen Utopiales des Pays de la Loire. Sans doute des prix prestigieux, mais en matière de SF, Le Tigre ne connaît que le prix Hugo, Nebula voire Locus. Le prix des utopies d’une région où certes le Futuroscope n’est pas loin, désolé ce n’est pas pour ça que j’achèterai ce roman. Au contraire même. En sus, publier ce roman dans la catégorie des « Folio Science-Fiction » n’est pas vraiment pertinente, de SF il n’est question.

…à rapprocher de :

– L’uchronie, la vraie, c’est K. Dick qui a ouvert les hostilités avec Le Maître du Haut Château. Period.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.

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