Jérôme Monti – Le Spectateur

Aux Forges de Vulcain, 63 pages.

Jérôme Monti - Le SpectateurCourt roman numérique d’une cinquantaine de pages, c’est la petite cerise sur le gâteau des titres numériques proposés par l’éditeur. Spectateur, le protagoniste l’est incontestablement. Mais aussi acteur plus ou moins engagé de sa propre déchéance, d’une vie que peu envieraient. Acide, drôle, bien écrit, on en redemanderait.

Il était une fois…

Le héros n’en est pas vraiment un : la trentaine, séparé de sa femme, petit fonctionnaire qui n’en glande pas une au service culturel de Mâlons-sur-Charme (une pitoyable ville en Champagne-Ardennes apparemment), ce sont quelques jours de sa misérable vie qu’il va nous conter. Avec un cynisme et une ironie qui dépassent les bornes.

Critique du Spectateur

Cet ebook est proposé par l’éditeur Aux forges de Vulcain avec trois autres dans une clé USB. Et Tigre l’annonce : en plus du court roman Avec l’assentiment du reptile, c’est le second texte qui mérite que cette fameuse clé soit achetée (non pas que les autres soient mauvais).

Jérôme Monti est un homme de théâtre (il a d’ailleurs fondé une compagnie) et cela se remarque. En effet, le narrateur procède à une rétrospective très dure de ce qui l’a amené à exercer un métier presque inutile ; en plus d’analyser, tel un metteur en scène intransigeant, ses pérégrinations (qui semblent s’étaler sur une bonne semaine). Et ce n’est tellement pas glorieux que Le Tigre a décidé d’en faire un thème (cf. infra). Entre remarques assassines du pauvre hère sur sa ville (sa région en prend plein la gueule aussi) et petitesse humaine, on hésitera souvent entre la tristesse et le rire.

Car sur le style, l’auteur est bon, très bon même. Il a un sens de la formule certain, à des phrases bien tournées s’ajoutent quelques termes familiers qui arracheront plus d’un sourire au lecteur. Fin du fin, les 14 chapitres sont plutôt courts et se lisent en moins de cinq minutes. Tigre a donc bien aimé la courte œuvre de Monti, et regrette presque que l’auteur n’aie pas continué dans cette voie. Y’a du potentiel.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

La lose, la vraie. Le narrateur (Nicolas de son prénom, il se présente rapidement au deuxième chapitre) est loin d’être un chevalier servant. Pas beaucoup de thunes, à ce titre le début sur son passage à la station service est une savoureuse entrée en matière ; célibataire et branleur (glandeur et adepte de l’onanisme) ; fumeur (pas que des clopes) et presque alcoolo, bref c’est le mec en dehors du coup. Notamment lorsqu’il se tâte pour savoir quel groupe rejoindre pendant un pot de départ. Au final il restera à l’écart des bonnes blagues de ses collègues, l’alcool aidant il draguera lourdement la pétillante Sorraya avant de terminer piteusement dans son vomi sur un des sièges de la salle.

Hélas, ses proches (enfin ceux qui restent) renvoient une image encore plus pathétique de sa situation. Son meilleur (enfin le seul) pote Cyril a l’air d’avoir réussi et se permet de lui prodiguer moults conseils. En outre, la femme de ce dernier, Natacha, a les formes que son prénom inspire. Alors que dire de son boss infâme ? Notre ami en profite pour les descendre (en pensées) méthodiquement, seulement rien ne viendra combler le vide. [Attention petit SPOIL] Et oui, il a un sévère manque d’amour depuis Marianne, son ex compagne qui s’est barrée, en plus d’un vide laissé par un frère décédé trop tôt. [Fin SPOIL]

…à rapprocher de :

– Sur l’anti-héros un peu méchant sur les bords, avec François Szabowski et son Le journal d’un copiste (premier opus) se laisse lire. Style plus sobre.

– Dans ce même média original, il y a en outre Avec l’assentiment du reptile, de Grégory Mion, qui est une petite tuerie,  Silhouette minuscule (glauque et correct) coécrit par Szabowski et Streese. Et Une larme de porto contre les pensées tristes, du même François Szabowski (de très bons passages).

10 réflexions au sujet de « Jérôme Monti – Le Spectateur »

  1. Merci Le Tigre pour cette critique sympathique et pour ton engagement à promouvoir tous les livres ! Petite remarque : le héros s’appelle Nicolas Zanni et n’a pas d’enfants. Ton appétit de tigre t’a fait avaler quelques pages…

    • Ha ha, je suis grillé ! Sur un écran d’ordi, je fais preuve de plus de goinfrerie il est vrai. Et à ma décharge, le nom du héros n’est pas si important. Et j’ai été induit en erreur à cause des souvenirs de Noël avec le petit Maxime qui se prend un délicieux aller-retour de la part de Santa. Ce devait être le fils d’un convive. Merci des deux corrections Jérôme, c’est un honneur d’accueillir de tels auteurs.

      • Tu es tout excusé…Ces petites remarques étaient avant tout l’occasion de te remercier pour le travail considérable que volontairement tu t’infliges. Et j’adore ton site qui mélange culture, sous-culture et contre-culture sans distinction aucune. Une point de désaccord entre nous cependant : question comics je serais plutôt marvel que DC. Mais je reconnais que ça se discute…

      • Jusqu’ici je t’appréciais…puis tu me parles de Marvel. Je plaisante, je suis d’ailleurs en train de rattraper mon retard Marvel. A part les Batman (que je suis régulièrement), je vais taper du côté des Avengers (Iron Man, Thor, etc.). Et sur la culture, un beau jour Tigre va s’infliger quelques Zola.

    • En fait on a le choix. Soit directement via le site de l’éditeur Aux forges de Vulcain, soit la clé usb qu’ils vendent dans tous les salons où ils sont présents (si je ne me trompe pas). La clé fait un nombre correct de Go, ce qui est fort utile. Et les romans sont au format epub (qu’on peut même lire depuis un navigateur), et sans DRM ni autres métadonnées confiscatoires. Leur idée est finement pensée, je regretterai presque de ne pas l’avoir eue avant eux !

      • Pas de DRM? Faut les mettre en ligne alors!!!
        😉
        je vais aller faire un tour sur leur site. Histoire de.

  2. Ping : François Szabowski – Une larme de porto contre les pensées tristes | Quand Le Tigre Lit

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  4. Ping : Grégory Mion – Avec l’assentiment du reptile | Quand Le Tigre Lit

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