Chester Himes – Couché dans le pain

Folio Policier, 247 pages.

[VO : A Jealous Man Can’t Win]. Dans un Harlem d’après-guerre peuplé de créatures iconoclastes, deux flics vont chercher à élucider un meurtre assez étrange. Polar poussif avec des dialogues parfois durailles à suivre, il y a pire certes. Hélas, le feignant félin a été incapable de finir les cinquante dernières pages.

Il était une fois

Harlem, fin des années 50. Dans la nuit, un voleur est témoin d’une brève rixe au cours de laquelle un homme se fait tuer. Et est laissé dans une vaste corbeille de pains frais. Le lendemain, devant cette même corbeille, une maison accueille des funérailles. Le révérend Short (beurré comme à l’accoutumé) tombe malencontreusement du deuxième étage. Et atterrit comme par miracle dans la corbeille….où git déjà un homme tout ce qu’il y a de plus mort.

Critique de Couché dans le pain

Voici un des premiers romans de Chester Himes, écrivain afro-américain qui semble avoir eu son petit succès dans les années 60 (notamment en France). Il y en a d’autres qui trainent dans ma bibliothèque, hélas je ne suis pas vraiment certain de poursuivre avant quelques mois.

Il s’agit du premier opus introduisant deux flics que le lecteur pourra retrouver dans d’autres œuvres : Fossoyeur Jones et Ed Cercueil sont deux hommes plutôt bons limiers et connaissant suffisamment le quartier d’Harlem pour pouvoir s’y balader et y faire régner un certain ordre. Curieusement, ces deux personnages apparaissent peu dans l’histoire, on suit surtout Johnny et la clique gravitant autour de ce gangster (des pépées violentes, d’autres malfrats dépensant leur fric à des jeux de cartes, et les parents de tout ce joli monde).

Sauf que votre serviteur s’est acharné à tenter de rentrer dans un roman qui ne lui parlait guère. Soit Himes avait un vocabulaire propre à son milieu, soit la traduction a été réalisée à la truelle, mais dans tous les cas les dialogues et certaines descriptions ne passent pas. On s’ennuie ferme, et savoir qui a tué le pauvre hère ne m’a que moyennement intéressé – si cela se trouve la fin est sublime.

Au surplus, les individus décrits sont certes truculents, mais question crédibilité y’a quelque chose qui rend le tout peu cohérent, tel un rêve alcoolisé sous une chaleur accablante – avec des protagonistes que j’ai souvent confondus. C’est comme si l’écrivain, qui a tant de sujets et de caractères à décrire, aurait eu envie de tout coucher dans ces 250 pages. En vrac. En fin de compte, un univers que Le Tigre maîtrise peu et rendu par l’auteur comme une évidence, un meurtre guignolesque et des personnages barrés difficiles à se représenter.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

Le lecteur attentif et patient pourra se faire une petite idée de ce que pouvait être Harlem pendant les années 50. Des restaurants mal fréquentés avec des menus à étouffer une armée de Chrétiens ; des processions funéraires à n’en plus finir (rien à voir certainement avec celles dansantes de la Nouvelle-Orléans) ; des usines à préparer les poulets où les employés sont payés à la journée ; des hommes d’église mystiques et postillonnant des injures alcoolisées ; des petites frappes vivant au jour le jour, etc. Il est souvent délicat de situer la part d’exagération dans tout ce fatras.

Chester Himes n’est pas un écrivain noir lambda qui évoque au premier abord le racisme qui sévit à New-York. Il est ici surtout question de la terrible violence que s’inflige la population noire. Meurtres de sang froid, échauffourées constantes, menus larcins, tout ceci entretient une tension constante au sein d’un groupe dont le taux de mortalité est plus élevé que la moyenne. En revanche, pour ce que j’ai lu, l’auteur se contente de décrire une situation inquiétante sans aller plus loin dans l’analyse des causes (à part peut-être l’alcool que s’envoient derrière le gosier la plupart des protagonistes).

…à rapprocher de :

Dans le style hard boiled, je peux vous conseiller d’autres titres plus marrants :

– James Hardley Chase, notamment son Vipère au sein (en lien) ou Pas d’orchidées pour Miss Blandish.

– Dashiell Hammet avec Le sac de Couffignal (très marrant).

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