Éric-Emmanuel Schmitt – L’enfant de Noé

Le Livre de Poche, 122 pages.

Eric-Emmanuel Schmitt - L'enfant de NoéÉnième roman du « cycle de l’invisible » de Schmitt, il faut lui reconnaître quelques belles réussites. Le catholicisme et le judaïsme face à une grande tragédie du 20ème siècle, une grande histoire d’amitié plutôt touchante. Et ce en moins de 100 pages, douche comprise (jeu de mots justifié par rapport à une scène du livre).

Il était une fois…

En ce début de Seconde guerre mondiale, le petit Joseph Bernstein vit dans une Belgique occupée où il fait de moins en moins bon être juif. C’est pour cela que ses parents le confient à la comtesse de Sully. Cette dernière ne peut le garder plus longtemps (la version ne tiendrait pas longtemps face aux gestapistes) et fait appel au Père Pons qui tient la Villa Jaune, école/internat. Joseph « Bertin » y rencontrera d’autres camarades de même confession et un lien très fort se tissera entre l’homme d’église et l’enfant.

Critique de L’enfant de Noé

Depuis le temps que je me « tape » les œuvres du sieur Éric-Manu, je commence à très vite repérer quand ça ne va guère me plaire. Et là, dès le début, j’ai su que L’enfant de Noé allait correctement remplir son office. Ce n’est certes pas une thèse de théologie (Tigre a un doctorat en théologie asiatique, si vous ne le savez pas), mais le bagage intellectuel accompagnant le roman est plus que satisfaisant.

L’histoire est belle et fait référence à l’abbé André (qui est un Juste) qui a accueilli une belle flopée d’enfants destinés à faire un aller simple vers les camps. Le protagoniste raconte une période autant difficile qu’exaltante de son enfance (le narrateur est âgé, on l’apprendra plus tard) dans un pensionnat en Belgique. Si Le Tigre ne parle pas de « héros », c’est qu’il y en a beaucoup (cf. infra).

A l’instar d’Oscar et la Dame rose (essentiellement porté sur le catholicisme à mon sens), j’ai bien failli lâcher un sanglot sur un ou deux passages. Toutefois, le style est plus étoffé que d’habitude (eu égard le nombre de pages). Malgré le fait qu’en une heure ce sera lu, l’auteur français est étonnamment disert sur les descriptions de l’environnement (odeurs, étoffes, architecture, etc.).

Au final, une ode à la tolérance grâce à un savant mélange entre deux religions qui n’hésitaient pas à se regarder en chien de faïence. Pendant que Joseph fait tout pour devenir catholique, le Père Pons apprend comme un fou furieux l’hébreu et les enseignements de la Tora. Ces deux individus semblent avoir le même Dieu, et la différence peut se résumer à ce dialogue :

– Alors, un chrétien, c’est un juif qui a cessé d’attendre ?

– Oui. Et un juif, c’est un chrétien d’avant Jésus.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

La différence et la tolérance. Parce qu’à un moment faut bien expliquer le titre du petit roman : Jo aime se considérer comme l’enfant du très biblique Noé qui, avant le déluge, a eu la bonne idée de garder quelques espèces dans son misérable radeau. Ici, le savant Pons garde, dans un endroit très caché, tout ce qui fait la culture judaïque, car étant en danger. Plus tard, ce sera quelques éléments de la culture russe. La phrase « Je fais une collection » est aussi simple que puissante, normal que ce soit « l’exipit » du livre.

Comme beaucoup de titres se situant dans l’Europe en guerre, la résistance à la barbarie est très présente. Le gentil prêtre, une partie de la population qui sait tenir un secret, une infirmière « bouffeuse de curetons », Schmitt en serait presque à faire une affiche type Benetton de la Résistance. C’est ainsi que, de manière aussi attendue qu’émouvante, on aura même un officier SS qui se mettra à sauver les enfants.

…à rapprocher de :

– D’Eric-Manu S., il faut rapprocher ce roman des autres qui font partie du Cycle de l’invisible (sur les religions) : Milarepa, Oscar et la Dame rose, Monsieur Ibrahim et les Fleurs du Coran, Le Sumo qui ne pouvait pas grossir, Les Dix Enfants que madame Ming n’a jamais eus.

– En plus long et plus bon, il y a La Part de l’autre, L’évangile selon Pilate ou Lorsque j’étais une œuvre d’art.

– Un film m’avait bien retourné les canaux lacrymaux, avec des ficelles assez proches du présent bouquin. C’est bien sûr Au revoir les enfants, de Louis Malle.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce titre en ligne ici.

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