VO : What Simon does. Un jeune homme simplet en apparence, dont le corps semble être le résultat d’assemblages de différents corps, peut-il sauver Gotham d’une terrible menace ? Il est des comics particuliers et déconcertants à leurs débuts, et qui révèlent progressivement leurs potentiels. Ce que fait Simon en fait partie.
Il était une fois…
Gotham City n’est que violence et corruption. Et pourtant, les habitants du Village (un quartier de la ville) semblent plutôt peinards : un jeune homme affublé d’un masque et habillé de haillons les protège. Les rares qui le voient l’appellent Simon Dark. Personne ne sait d’où il vient, de quoi il est capable et ses motifs. Personne. Pas même Simon.
Critique de Ce que fait Simon
Tapi dans l’ombre au fond du Parc,
Simon, Simon, Simon Dark
Si t’es gentil il te touche pas,
Si t’es méchant il te tuera
Cette chansonnette gazouillée par les habitants d’un quartier de Gotham résume (presque) tout. Y’a un drôle de loustic qui hante une partie de la ville de Batman (lequel ne sera jamais aperçu), et il occis les méchants. Du moins Simon refuse que des crimes soient commis dans sa zone, et tout contrevenant s’expose à une résistance déterminée quoique éthérée – les premières pages montrent un individu plutôt impersonnel, au vocabulaire simpliste mais apparemment doté de pouvoirs peu communs.
Voilà pour le héros. A part lui, deux personnages feront avancer une narration relativement classique : Beth Granger, Médecin légiste compétente et dont la plastique demeure agréable ; ainsi qu’un flic dont j’ai déjà oublié le nom mais dont on sent qu’il n’est pas tout à fait net dans ce qui se passe. La doctoresse, connaissant bien la ville, recueille dans le cadre de son travail la dépouille d’un Simon, abattu par les policiers (par erreur), qu’elle pense dûment décédé. Sauf que ce dernier revient d’entre les morts et, plus que dérouté que jamais, se réfugie dans son repaire où traînent un chat noir et quelques livres classiques.
A partir du second tiers de la BD, ça devient nettement plus corsé. Sans que cela ne nous avance (pour l’instant) sur la provenance de Simon, voici que s’affirme une organisation underground dont les membres semblent avoir recours à la magie noire. Aussi le cachet « fantastique » du comics se décline vers un aspect bien plus lourd et angoissant auquel certaines autorités semblent impliquées. Par contraste, la nature intrinsèquement bonne de Simon et la douce normalité des gens avec qui il interagit naturellement (un emprunt de livre par là, une aide par ci) donnent l’illusion d’un univers clément où le fantastique n’est que bonhommie.
Quant aux illustrations, le félin vous renvoie (encore une fois) à la couverture : le protagoniste, dépeint à l’envers, renvoie à l’état de son esprit. La confusion du héros parvient à se faire ressentir dans certaines cases qui, sous couvert d’une rare banalité, ont ce petit quelque chose de peu amène…comme si l’horreur allait surgir – ce qui n’arrive qu’une fois, et encore dans la dernière page. Ville de Gotham oblige, il est à noter des éléments résolument gothiques (voire satanistes), que ce soit l’ambiance générale (extrêmement froide) ou des personnages qui ne semblent pas avoir vu un rayon de soleil depuis des lustres.
Que faire donc de ce comics ? Franchement, le fauve était moyen emballé par les premiers chapitres. Un héros sans réelle personnalité doté de cicatrices peu communes, certes. Des vilains en costard à peine bizarres, mouais. Sauf que l’intrigue se décante (tardivement il est vrai) suffisamment pour donner le frisson nécessaire à l’envie de poursuivre l’histoire. A suivre donc.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Le titre n’est pas con. Vraiment. En s’intéressant à ce que fait Simon, le lecteur découvrira un être foncièrement bon qui, par exemple, ne supporte pas d’emprunter un livre sans le rendre ou laisser un petit biffeton – rien à voir avec votre serviteur. Un être soucieux de la vie d’autrui, homme ou animal. Un protecteur dont les tenants psychologiques semblent être d’irrésistibles automatismes qui font du héros une sorte de robot sans âme. L’âme, voici certainement une des clés de cette prometteuse série…car, en tournant les pages, le lecteur pressent que le rôle de Simon va s’affiner et ce dernier se découvrir un but – ce qui ne manque pas dès lors que le héros tombe sur un vieux grimoire.
En effet, ce tome décrit le travail de construction d’un personnage qui s’ignore autant que le lecteur est dans les choux. Si on sait Ce que fait Simon, en revanche la question « qui est Simon ? » est laissée en suspens. D’une certaine manière, Steve Niles et son compère Scott Hampton soulèvent la sempiternelle question de l’existence d’un phénomène, laquelle précède son existence (et sa dénomination). Simon agit, mais rien d’autre ne le définit. Jusqu’à ce que quelques bribes de souvenirs s’invitent dans la narration, connaissances qui font l’effet d’un « empowerment » sur le jeune recousu, lequel prend la mesure de sa puissance et acquiert une impressionnante confiance en soi. Et cela ne sera pas de trop face au monstrueux danger qui se profile…
…à rapprocher de :
– Dans la catégorie des héros un peu dérangés à l’allure surprenante, le félin pense notamment à Baron Samedi, de Dog Baker. Attention, très glauque.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce comics en ligne ici.
Ping : Dog Baker – Baron samedi | Quand Le Tigre Lit