Julian Jackson - ArcadieVO : Living in Arcadia: Homosexuality, Politics, and Morality in France from the Liberation to AIDS. Essai dense et exigeant, vous saurez tout sur Arcadie, premier mouvement homosexuel dans la France d’après-guerre. Trop fourni et long sans doute, Le Tigre n’a pu hélas le finir.

De quoi parle Arcadie, et comment ?

Premièrement, c’est quoi « Arcadie » ? D’abord une revue, ensuite un mouvement, Arcadie doit tout à son père, André Baudry, la trentaine au début des années 50. Dédé a de la volonté et a porté pendant des décennies son mouvement malgré les obstacles (censure de la presse, énorme amende pour outrage aux bonnes mœurs), jusqu’à prendre du recul au cours des eighties.

Deuxièmement, parlons rapidement de Julian Jackson. Le monsieur, Anglais de surcroît, est une sommité de la sociologie de la France depuis les années 40. La guerre perdue face à l’Allemagne nazie, les Français et l’occupant, le personnage de De Gaulle, rien ne lui échappe. Même pas la France homosexuelle d’après guerre et avant la dépénalisation de l’homosexualité. C’est donc avec toute la rigueur (et une pincée d’humour très british certes) de l’historien qu’Arcadie s’est écrite.

Troisièmement, l’ouvrage à proprement parler : pas du tout inintéressant, j’avais peu qu’on ne cause que de l’Arcadie, mais il y a pas mal de mises en perspective dudit mouvement avec ce qui se passe en Europe et dans le monde. En outre, l’immersion dans la France post WWII est quasiment parfaite, le lecteur appréciera. De même, l’ouvrage est plus que documenté, disons que la bibliographie est cauchemardesque par sa taille. Jackson est un pro, cela ne fait pas de doute.

Hélas, c’est long, sans doute trop puisque je n’ai pu aller au-delà de la 300ème page. C’est dommage, certes il en restait environ quatre-vingt, mais Le Tigre pensait avoir lu la substantifique moelle. Le style est plaisant, sur ce point rien à dire, c’est juste que le sujet est traité avec une démoralisante (je ne sais pas si c’est l’adjectif adéquat) exhaustivité.

Pour conclure, cet essai semble bien être l’unique référence sur l’univers homosexuel français dès les années 50, étudié au prisme d’un de ses représentants les plus illustre. Comprenez donc que Le Tigre n’a pas de raisons particulières de terminer Arcadie, si ce n’est sa curiosité (pas assez puissante apparemment).

Ce que Le Tigre a retenu

Le vécu d’une sexualité considérée comme « anormale » à l’époque pour la majorité est assez bien rendu de la part de l’auteur. Beaucoup d’individus la vivaient comme une profonde honte, l’abonnement à la revue de Baudry ou ses réunions se font souvent la tête bien enfoncée dans le chapeau. Mais quel refuge pour ces personnes ! Heureusement que le mouvement a bénéficié d’appuis assez conséquents, que ce soit un Michel Foucault ou un Jean Cocteau, avant d’être « normalisé » par la libération des mœurs de la fin des années 60.

Ensuite, Le Tigre se remémore surtout le ton général de cette association. Ni coup d’éclats ni revendications agressives, mais la volonté de présenter les couples gays comme des gens ayant la même respectabilité que n’importe quel autre couple. C’est ce qu’on a reproché à Arcadie, promouvoir la « sexualité à la papa », entendez pépère voire chiante, à l’image de beaucoup de couples hétérosexuels. Ainsi, lorsque d’autres mouvements pro-gays et lesbiens plus radicaux ont essaimé dans l’hexagone, l’influsence d’Arcadie fut considérablement et durablement touchée.

Au final, Arcadie, par sa vision que certains ont trop vite jugé « désuète » de l’homosexualité, a surtout contribué à débroussailler le chemin de la dépénalisation (donc l’acceptation) de l’homosexualité. Avant de laisser la place aux mouvements LGBT.

…à rapprocher de :

– Autre temps, autres moeurs : ce sont Les perversions sexuelles, de Magnus Hirschfeld. Premier auteur à réfuter la place de l’homosexualité dans le cadre des perversions, ça mérite d’être souligné.

– Peut d’autre essai lu sur ce thème, Le Tigre peut néanmoins vous renvoyer vers Amours blessantes, de Nananan, où l’homosexualité a toute sa place.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez le trouver en ligne ici.

Martin Amis - Train de nuitVO : Night Train. Martin Amis, chantre de l’anticipation sociale, est bien plus qu’un auteur de ce genre. Train de nuit l’illustre, avec une de ses histoires les plus accessible et courte. Sur fond de mort mystérieuse, c’est toute une philosophie sur le sens de la vie et de la mort qui est à portée de mains.

Il était une fois…

Tom, commissaire de police dans une petite ville des Etats-Unis, est au désespoir : Jennifer, sa fille, a été retrouvée décédée. Aussi fait-il appel à Mike Hoohkihan, policière dont il est le mentor. Cette dernière conduira son enquête non sans un certain acharnement, et il va apparoir que Jennifer s’est suicidée, pour des raisons qui dépasseront l’entendement.

Critique de Train de nuit

Martin Amis est grand. Et ce livre est un de ses plus percutants, considérant que celui ci ne dépasse pas 230 pages. Quoique… En effet, si le style est parfois bizarre à suivre, le suspense est très bien géré au cours de ces pages. Hélas j’ai eu affaire à quelques passages proprement imbitables. A moins que Le Tigre ne fût pas assez concentré.

Le scénario est génial, et une fois le roman terminé plus d’un lecteur restera sur le cul. Pas autant qu’un Chuck Palahniuk, mais presque. Une demoiselle magnifique, fille du commissaire de la ville, est retrouvée morte. Suicide ou autre ? L’héroïne mène l’enquête et dénoue (déroule plutôt) petit à petit la vie de la belle.

Là où Mister Amis mérite ses gallons, c’est quand il parvient à distiller les surprises les unes après les autres concernant la vie de la défunte. La plupart étant contradictoires de surcroît. Et on arrive progressivement vers une horrible vérité, assez choquante pour un lecteur non averti. Quant à la fin des dernières pages, légère l’impression de n’avoir pas compris grand chose tellement c’était perché.

Un roman exigeant d’un point de vue de la mobilisation des ressources intellectuelles, mais qui reste une excellente entrée en matière du sieur Amis.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

Les faux semblants à la pelle. Martin A. prend un malin plaisir à diriger le lecteur, du moins son protagoniste Mike, vers de fausses directions. Pas loin d’une misdirection digne d’un grand magicien. Ce principe d’écriture nous tient particulièrement en haleine, surtout quand derrière ces nombreuses révélations il y a un père qui demande des comptes au flic en charge de l’enquête.

La vie, la mort, le grand contraste. Déjà, l’héroïne n’est pas une policière comme les autres. Alcoolique sur la voie de la rédemption, petit ami particulier, elle est sur le fil du rasoir. N’ayant plus grand chose pour elle, son cas tranche nettement avec celui de Jennifer, magnifique créature qui attirait, en plus des regards, la lumière. Et sur la fin, sans spoiler, l’héroïne fait un choix (qui semble définitif) vers une des options citée ci-avant.

Heureusement pour nous, l’auteur, par le biais de l’héroïne, fait montre d’un certain humour (cynique, forcément) qui tend à rendre l’œuvre plus agréable à parcourir.

…à rapprocher de :

– Sur une histoire encore plus bizarre, du même auteur, vous pouvez halluciner devant La flèche du temps.

– Sur la femme parfaite, du moins en apparence, dont l’enquêteur va décortiquer la vie, Le Tigre vous indique le très bon Vierge de cuir, de Joe R. Lansdale.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman via Amazon ici.

Les Sutras du TigreLubrique lecteur, j’ai bien compris que tu t’en foutais royalement de mes résumés. Seule compte la débauche, si possible saupoudrée de hautes considérations littéraires. Hélas tu es bloqué entre deux stations de métro, et l’inconnu(e) aux beaux atours va sûrement se tailler. Voici quelques conseils pour ne pas passer pour un bonimenteur de huitième zone.

Pourquoi ?

Tout d’abord, la décharge habituelle : les techniques foireuses dont je vais vous entretenir ont été rarement utilisées. Le Tigre est fort timide et surtout heureux en amour. De même, je ne saurai être responsable de réactions imprévisibles que vous pourrez essuyer, ni de votre cœur brisé par un(e) malotru(e) qui s’est sans conteste inspiré(e) de mes bons mots. Lecture vaut signature (je viens de l’inventer).

Ensuite, le but premier de l’exercice : avant de conquérir l’autre, faites lui d’abord passer un bon moment de lecture ou de rigolade. En sus, le métro et la vie étant trop courts, ne perdez ni de temps à être lourd ou chiant. Humour et légèreté, je vous présente votre nouveau credo.

Pourquoi le Sutra .15 enfin ? Parce que, dans le métro parisien, après la ligne 14, la seule ligne qui vaille est celle dictée par Le Tigre. Pour des raisons de commodité, la personne que vous tenterez d’approcher s’appellera la « cible », ou tout autre synonyme.

Comment ?

Voilà, voilà, on y vient. Pas d’impatience. Le Tigre, qui est entre autres docteur en droit, est naturellement attaché aux (sempiternelles) deux parties, chacune ayant deux sous-parties.

I. La voie active

Vous avez le livre entre les pognes : vous jouez à domicile.

I.A. L’étalon de Troie

…Hélène, ne vois tu rien venir ? Si si, le fier métro de Pâris.

Cheval de Troie, car vous allez introduire dans l’univers de votre cible un objet qui affaiblira considérablement ses défenses. Un étalon, d’ailleurs, plutôt qu’un chétif cheval qui va s’écraser face au premier obstacle.

L’idée est de quitter la cible en lui laissant un item qui va donner une très flatteuse image de votre personne. Il y en a qui laissent un téléphone portable qu’ils appellent plus tard, Le Tigre trouve cela audacieux quoique risqué : imaginez que la personne ne vous le rende pas (ou pire, alors son/sa compagnon/compagne le fasse pour elle). Ou trouve votre démarche tellement déplacée qu’elle vous rende de suite le téléphone comme si c’était une patate chaude.

Non non, le but est de laisser un ouvrage à la cible, et un qui sera par votre comportement auréolé d’un pouvoir suffisant pour avoir envie de le lire. Comment accorder un tel pouvoir à quelques chapitres ? En riant bruyamment (ou faisant les gros yeux) pendant sa lecture, suffisamment du moins pour être remarqué. A ce moment vous devez capter le regard (forcément interrogateur ou amusé) de l’objectif et présenter, comme signe d’excuse, la raison de ces éclats de rire. Sans lui laisser le temps de réagir, expliquez rapidement de quoi il s’agit et enviez la personne de n’avoir pas eu la chance de découvrir l’ouvrage.

Le but est de lui laisser l’ouvrage, juste avant de filer à l’anglaise. Bien sûr votre numéro (ou mail, c’est mieux) y sera bien visible : si la cible vous demande quand le rendre (et ainsi vous contacter), faites discrètement comprendre que ce n’est pas nécessaire. Juste qu’elle vous contacte pour dire si ça lui a plu. Et attendez.

Quel livre laisser ? Je pencherai pour le rire (même l’humour noir), quelque chose que la cible ne serait pas susceptible d’avoir lu. En vrac : un Chuck Palahniuk (la plupart sont bons), ou Vice-versa de Will Self. Pourquoi pas Et ça vous fait rire ?, désopilants dessins d’Hugleikur Dagsson ? L’anticipation sociale marche plutôt bien. Bref un titre qui ne laisse pas indifférent, et associe longueur raisonnable et style résolument moderne. Ne lâchez pas un Umberto Eco, ça peut faire désordre.

Avantages : c’est rapide, si vous vous débrouillez convenablement la cible n’aura pas le temps d’en placer une, voire mettra un certain temps avant de saisir qu’elle vient d’être draguée.
Inconvénients : vous pouvez perdre un livre dans l’histoire. En sus, tout psy ayant correctement fait ses devoirs vous parlera de geste phallique d’une rare intensité.

I.B. Le romantique cryptologue

…ça te dit un petit 1000101 ? Allez file moi ton zéro un-un-zéro.

Laisser un bouquin ne vous dit pas grand chose parce que (au choix) : vous êtes un joli radin ; votre bibliothèque ne possède pas d’ouvrages dignes d’être votre wing-man ; la technique vous semble un peu éculée ; vous voulez surprendre avant tout. Don’t worry, même avec le plus insignifiant Guillaume Musso, Le Tigre vous aidera.

Vous n’allez pas en effet tabler sur le fond de l’ouvrage, mais sur la forme. En sus, vous ferez la délicieuse synthèse entre littérature et romantisme. Rien de moins. Pour cela, à l’instar d’un magicien, il y a un tour qui doit être soigneusement préparé. Ayez sur vous un livre (dont vous aurez repéré une certaine page) et un stabilo (rose, ça passe bien). Et en piste. Une minute, douche comprise.

Imaginez maintenant la scène, vue « côté cible » : devant vous un être d’apparence timide lit frénétiquement, puis jette un regard plus qu’appuyé sur vous. Regarde à nouveau une page, et encore vous. A ce moment cet individu farfouille dans sa sacoche un objet. Un surligneur. Et semble marquer quelques passages de son livre, qu’à votre grande surprise vous tend. Vous prenez l’ouvrage entre vos mains, et les mots surlignés forment le très direct « veux-tu prendre un café avec moi ? ».

Quelle bravoure ! Quelle finesse (et agilité) d’esprit ! A défaut de dire oui, la cible au moins sourira. Vous l’aurez en sus compris, il convient de faire un intensif repérage dans sa bibliothèque pour que votre douce demande possède ses mots, dans le bon ordre, dans une même page. Pas évident.

Avantages : c’est mignon, rigolo, et encore assez novateur.
Inconvénients : ensuite il faut faire le boulot, convenir d’un rendez-vous, et là il est délicat de casser le charme. N’hésitez pas à terminer la conversation avec un stylo. En outre, ce tour ne marche qu’une fois. Vous allez en pourrir des bouquins. D’où la possibilité de le faire avec un journal gratuit (nettement moins classe).

II. La voie réactive

L’objet de votre désir est en train de lire : il va falloir la jouer fine. Plus ou moins.

II.A. Le curieux asexué

…mais j’adooore la couleur de ton écharpe. Je suis fan. Du cashmere en plus. Je suis hétéro sinon.

Méthode assez classique, quoique périlleuse pour l’inculte. Heureusement internet est là. La cible lit tranquillement, et par votre conversation et érudition vous allez « l’accrocher » autour de son hobby. Mais de manière innocente, l’objet de vos échanges ne glissera jamais vers la target. Sauf si celle-ci décale la discussion. Quelque part, si vous lui parlez, c’est à cause de ce qu’elle lit. Et pas pour sa belle gueule. Mais paaaaas du tout…

A partir de là, deux écoles se foutent sur la gueule depuis des décennies : la première veut que vous adoptiez un comportement docte, tout en remarques hautement intellectuelles et autres conseils. Hélas, dans le métro, dans une fenêtre d’une minute, il va falloir être concis et percutant sans donner l’impression de défourailler votre culture comme Hollande ses discours.

La deuxième (préférence personnelle du Tigre) enseigne plutôt l’illusion de l’émerveillement : vous semblez réellement intéressé, et avez envie d’en savoir plus sur l’œuvre, son auteur, les livres du même genre, tout en fait. Vous offrirez alors à la cible un statut d’enseignant, voire de gourou, d’où une délicieuse impression de puissance chez celle-ci. Grâce à elle, vous avez enfin trouvé le cadeau parfait pour vous ou votre frère / sœur / ami(e) / …

Avantages : la défausse est à tout moment possible, du style « ah non là on ne parle que littérature, je n’ai aucune arrière-pensée d’ordre charnel ».
Inconvénients : le temps vous manquera, et prolonger ladite conversation en demandant un numéro (ou mail) vous percera sûrement à jour.

II.B. Le maître chanteur spoiler

…Hey mam’zelle, Baskerville il crève à la fin. Sinon t’es charmante.

Le meilleur (donc le pire) pour la fin. Jamais testé, The Tiger is walking here on thin ice comme on dit. Le titre de cette dernière partie me semble assez clair. Terroriste de l’information et du plaisir de terminer un bon polar, vous obligez la cible à adhérez à votre programme « je-ne-dévoilerai-rien contre numéro de téléphone ».

Le tout est dans le ton que vous donnerez à votre négociation. Bien sûr vous ne serez qu’à moitié sérieux dans ce que vous direz, mais qui irait prendre le risque d’une révélation précoce ? Pour reprendre la métaphore militaire, il faut faire dans le « shock & awe » : choquer dans la demande, qui est plutôt inhabituelle (même séduisante), et aussi effrayer gentiment la cible par ce que vous vous apprêtez à lui dire. Vous vous en sortirez d’autant mieux que le langage utilisé contrastera avec votre bestiale intention. Par exemple, dites quelque chose dans le genre :

Veuillez me pardonner mademoiselle (ou monsieur), je compte vous proposer mon silence le plus total, jusqu’à Mabillon du moins, sur l’identité de l’inélégant qui a occis la pauvre Margaret. En échange de quoi vous consentez à me laisser votre courriel, et ce afin que je vous conseille d’autres ouvrages du même acabit.

Voilà qui ne fleure pas du tout la sueur de la ligne 13, non ?

Avantages : vous serez susceptible de faire rigoler votre carré dans le wagon.
Inconvénients : si la cible le prend au premier degré, vous passerez pour un fieffé salaud. En outre, si vous ne connaissez pas ladite fin, et qu’on vous la demande, je vous laisse imaginer le malaise. Un vrai Patrick Bruel du spoil, du bluff littéraire digne d’un paysan bavarois. Comme par hasard vous sortirez à la prochaine station.

Conclusion

Le Tigre, qui ne veut faire un article trop long, a bien sûr oublié tout un tas d’astuces. Comme par exemple se faire passer pour l’écrivain (et dédicacer le roman lu par la cible, fin du fin). J’attends vos grandioses techniques (book related bien sûr), et ce afin d’en synthétiser le meilleur dans une éventuelle V2 du présent post.

En outre, j’ai conscience de la difficulté de draguer dans un tel milieu lorsque 83% des usagers ont des écouteurs dans les oreilles. A la japonaise, nous tendons vers une société « de bulles » où chacun est séparé, dans le lieu public, de son voisin tout en restant connecté avec ses proches (qui sont parfois à des milliers de kilomètres d’ici).

Ne faites pas attention, enfin, aux initiales du titre du post. Malheureux hasard, Le Tigre vient de s’en rendre compte.

Snyder & Capullo - Batman : La Cour Des Hiboux 1VO : Night of the Owls. Conseillé par un ami très au fait du Bat, Le Tigre s’est vite procuré ce premier tome. Épisode très sombre et à la limite de l’ésotérisme à certains moments, il n’en demeure pas moins d’excellente qualité (dessin, et scénario digne d’un bon polar). Décidément, les reboots du personnage sont bien léchés.

Il était une fois…

Bruce Wayne sort de sa torpeur et enfile à nouveau son glorieux costume. Pourquoi ? Batman se lance à la poursuite d’un inquiétant tueur qui ressemble à un hibou. D’autant plus inquiétant que la prochaine cible de l’ergot (d’après une comptine éponyme du titre) n’est autre que notre fringuant milliardaire. Au fil de sa quête, il apparaîtra que le chevalier noir ne maîtrise pas aussi bien les arcanes de Gotham qu’il pensait, et que dans les fondations de la ville (au sens propre comme figuré) un ennemi se terre, prêt à conquérir la ville.

Critique du premier tome de Batman : La Cour Des Hiboux

Cela fait beaucoup de comics de l’homme chauve-souris dans la bibliothèque du Tigre, j’en conviens aisément. Avec DC Renaissance, il y a de quoi se faire réellement plaisir avec les super-héros réinventés dans le joyeux bordel qu’est le 21ème siècle. Et cet opus n’est pas décevant sur ce point.

Sur l’intrigue, encore de très bonnes trouvailles de Snyder, familier du personnage Bruce et ses acolytes (Alfred, Robin & co). L’ennemi dans cet ouvrage est tout neuf, sorti de l’imagination de l’auteur j’imagine. Un ennemi, plutôt plusieurs, une clique d’individus qui œuvre en sous main depuis l’érection de la ville. Le titre original fait référence à la nuit de cette clique, et non sa cour. Pourquoi donc ?

Le début de l’œuvre porte sur ce qu’on peut associer comme unique mot à Gotham, incipit intelligent pour présenter la ville. Quant à la fin du tome, c’est tout simplement une invitation à acheter le second tellement ça semble mal parti (une nuée de tarés déferlant depuis les cieux).

Quant au dessin, également bon, mais sans plus. Rien ne m’a proprement ébloui (dans la mesure où les traits des héros me semblent un peu grossier), sauf un passage d’une rare audace : le lecteur suit Batman, dans un labyrinthe où il délire à tout-va, avec des pages qu’il faut lire à l’envers, ou en tournant le livre à 90°. Le but étant de renforcer l’immersion du lecteur dans l’épreuve du chevalier noir, ce qui fonctionne étonnamment bien.

Bref, incontournable et addictif, et même la bleusaille du monde de Gotham pourra être conquise.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

Le Gotham underground. Batman n’a rien vu arriver. Un si bon détective, et pourtant tout un pan de Gotham lui est passé sous le nez. A cause du sentiment qu’il n’y a rien à voir, sentiment acquis lors de sa première enquête de jeunesse (juste après la mort de ses vieux). Ni ligue de l’ombre, ni Joker, mais une cour de coucous (hiboux plutôt) tirant le meilleur (le pire surtout) de la technologie : à la limite du fantastique, leur « cocktail » pour créer de super hommes est un tantinet too much.

Le Tigre, fan de rapprochements en tout genre, voit bien ladite Cour des hiboux comme des vilains petits Morlocks bien décidées à prendre leur revanche face aux hédonistes Eloïs (la riche société de Gotham). H. G. Wells, nous voilà, à la différence que de machine à explorer le temps il n’est question.

Enfin, ce titre présente quelques sombres histoires de famille. Concernant le Bat, on va découvrir un de ses ancêtres (qui a terminé dingue) déjà confronté à la fameuse Cour. Quant au pauvre Robin, sa famille est son cirque sont à l’honneur, et il en fut de peu que son destin prenne un tout autre chemin. Judicieusement glaçantes ces révélations, et le passage dans le labyrinthe infernal en rajoute une couche fort glauque.

…à rapprocher de :

– Toutefois le Tome 2 a été relativement (pas la fin de l’histoire, mais le reste) décevant. Le tome 3, Le deuil de la famille, pas mieux. Quant au quatrième tome intitulé L’An Zéro (1ère partie) qui reprend les débuts de Wayne, c’est sympathique mais sans plus – même topo avec le deuxième tome de L’An Zéro.

– Le chevalier noir malmené, blessé, au bord du gouffre, dans une histoire en deux tomes assez géniale, c’est aussi Batman : sombre reflet.

– Pour savoir ce qu’il se passe du côté de Robin, il faut aller voir du côté du premier tome de Nightwing. Loin d’être génial hélas. Le deuxième, pas mieux putain. Le troisième tome, Hécatombe, rattrape partiellement le coup (pas assez hélas).

Enfin, si vous n’avez pas de « librairie à BD » à proximité, vous pouvez trouver ce comics en ligne ici.

Fernand Bloch-Ladurie - Georges-Guy LamotteAttention, objet politique non identifié. Une biographie acide et tout en fantaisie, faite par un pseudo historien d’une rare incompétence et au phrasé pompeux à un point que ça en devient hilarant. Livre à destination d’un lectorat français et porté sur la vie politique, c’est aussi une petite bouffée d’air littéraire assez savoureuse.

De quoi parle Georges-Guy Lamotte, le dernier des socialistes, et comment ?

Cet essai est celui des « ou pas ». Georges-Guy Lamotte, né en 1929 et décédé en 2007, fut un acteur incontournable de la vie politique française. Ou pas. Son existence, injustement oubliée par notre monde médiatico-politique, a pu être retranscrite par Monsieur Bloch-Ladurie (ci-après « FBL »), intellectuel de renom qui sévit comme professeur à Sciences-Po. Ou pas.

Ainsi, c’est la vie d’un individu fantaisiste mais terriblement crédible que le lecteur va suivre. De sa naissance (avec moultes descriptions de son « pedigree ») à sa mort, une vie dédiée à la politique mais aussi à ses délicieux petits à-côtés. ENA, juge administratif, création d’un parti, un peu de corruption, du sexe et une pincée de drogues, l’incontournable traversée du désert, quelques maladresses, la girouette idéologique, Georges-Guy Lamotte est l’alpha et l’omega du politicien.

Contrairement à ce que peut annoncer le 4ème de couv’, nous n’en profiterons pas vraiment pour revisiter 70 ans de l’histoire du socialisme : les quelques évènements historiques ne sont là que pour souligner l’influence de Lamotte et ses interventions parfois maladroites, souvent hilarantes (les négociations avec les communistes sont à se taper le cul par terre).

Quant au style, ce n’est certes pas un chef d’œuvre d’écriture. Mais FBL (du moins ceux qui écrivent en son nom) se fait largement plaisir, usant de remarques corrosives et d’adjectifs lénifiants. Ce qui suffit amplement pour ce type d’ouvrage. Copier-coller, l’air de rien, un couplet d’une chanson de Starmania par exemple, c’est toujours sympa. Asséné avec un certain aplomb, Le Tigre a mis trois lignes avant de le découvrir.

Enfin, là où le lecteur sera servi (et ravi), c’est au sujet des innombrables notes de bas de page plus délirantes les unes que les autres : la maîtrise de l’exercice est parfaite, et à y regarder de plus près rien n’est sérieux, tout n’est que clin d’œil. Archives départementales poussiéreuses (où vivent des fonctionnaires honnis par FBL), discours historiques, PV de conseils municipaux, auteurs tels que BHL, Bruckner, ou même Lamotte… Jamais lire lesdites notes n’a été aussi distrayant pour Le Tigre.

Bref, le lecteur régulier du Canard enchaîné ne sera pas déçu par Le dernier des socialistes.

Ce que Le Tigre a retenu

L’œuvre étant un exercice de style « queneausien » mais à grande échelle, il existe quelques thèmes sous-jacents assez intéressants à décortiquer malgré le ton franchement décalé utilisé.

Tout d’abord, la vie du sieur Lamotte est riche en péripéties, qui sont autant d’échos à la médiocrité des hommes et de leurs actes. Lâche pendant la guerre, résistant de la dernière heure, usant et abusant de ses relations à des fins personnelles (entrée à l’ENA zum Beispiel), n’hésitant pas à trahir amis (qui tiennent une sacré couche d’ailleurs) ou femme, c’est un politicien scandaleux mais touchant au final. Touchant lorsque le personnage voit la plupart de ses projets se terminer devant la barre d’un tribunal, ou alors quand il tente d’aller à l’encontre des grands courants historiques (mai 68, élection de Mitterrand,…). Un homme seul avant tout.

Ensuite, la pensée politique de Lamotte. C’est là que Le Tigre s’est marré, puisque le « collectisme » (doctrine révolutionnaire du socialiste) n’est que du vide au service du pouvoir (pour paraphraser Karl Zero). Ajoutez à ça les hochements de tête approbatifs de l’universitaire / auteur, on est alors en présence d’un grand n’importe quoi qui n’est pas sans rappeler quelques jaillissements intellectuels de « vrais » politiciens. Le tout rappelle un peu le bon Henri Queuille (notamment l’assise locale), figure incontournable de la IVème république dont le leitmotiv était il n’est pas de problème dont une absence de solution ne finisse par venir à bout.

Enfin, Fernand Bloch-Ladurie représente une caricature à l’excès de tous les travers de l’historien. La prise de recul avec l’objet de son étude est presque nulle, d’ailleurs la raison du choix de Lamotte comme sujet d’étude (expliquée sur la fin du roman) est loin d’avoir la noblesse qu’on pourrait attendre. Malgré les évidences historiques, les faits bruts, l’historien fait corps avec la version de Georges-Guy, quitte à le défendre contre toute l’éthique la plus triviale. Même si dès le début le pseudo scientifique annonce son admiration pour Lamotte, ses flagorneuses interventions se font de moins en moins discrètes au fil des chapitres.

…à rapprocher de :

– FBL a un blog, et fournit sur celui-ci de très fines (hum) analyses sur l’actualité, et ce avec la verve et l’impertinence qu’on retrouve dans le roman.

– Il faut savoir que FBL intervient dans le roman Il n’y a pas de sparadraps pour les blessures du cœur, où par bonté vis-à-vis des petites gens il aide le héros à retrouver l’identité du préfet du sous-préfet du Loiret – ne me demandez pas pourquoi…

Si votre librairie est fermée, vous pouvez le trouver en ligne ici. Ou, mieux, via le site de l’éditeur.

Shôtaro Ishinomori - HokusaiVO : idem. Trouvé par hasard en déambulant dans une obscure librairie, Le Tigre se félicite de cet achat. D’une part, c’est sur un sujet assez inconnu. Un illustre peintre de la période Edo (c’est bien celle avant l’ère Meiji?) dont certaines parties de son existence sont contées. D’autre part, ce titre est depuis longtemps épuisé et a pris une valeur considérable.

Il était une fois…

Hokusai, un des plus grands peintres japonais du 19ème siècle, a eu une vie longue et riche en estampes. Ce sont des fragments de sa vie, à tout âge, que Shotaro Ishinomori mettra en dessin (et en textes) sur près de 600 pages.

Critique de Hokusai

Je n’ai point été déçu par ce manga. En pensant manga, on s’imagine (certes légitimement) quelque chose d’un peu plus « pop », dans la lignée d’un Akira ou Neon Evangelion. Or il se trouve que l’auteur est plutôt versé dans la SF, mais a su s’attaquer à un sujet plus classique.

Le sujet en question, c’est Hokusai, dont j’ignorais jusqu’au nom. En y regardant de plus près, il se trouve que c’est un peintre majeur de sa période. Ayant vécu jusqu’à 90 ans, un âge exceptionnel quand on sait qu’à cette époque on ne vivait guère au-delà de 50 piges, il y a matière à écrire.

Le mangaka a eu une approche (comme il l’explique à la fin de l’ouvrage) assez intéressante : les chapitres ne sont pas chronologiques, et présentent l’artiste à différents âges (plus d’une quinzaine au total). En outre, Ishinomori s’est attaché à principalement illustrer des périodes de la vie du peintre à propos desquelles on sait pas grand chose. Le travail d’imagination est ainsi plus poussé, à mi-chemin entre biographie et fiction.

Sur le style, pas vraiment grand chose à dire. On ne voit pas vraiment passer les 600 pages dans la mesure où les dialogues sont assez rares et le manga est enrichi de nombreux exemples du travail d’Hosukai.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

Hosukai mérite largement un manga. Je ne vais pas vous copier-coller wikipedia, aussi voici ce qui m’a surpris : une longévité exceptionnelle ; des noms à profusion utilisés par l’artiste (autant de nouveaux défis à relever) ; une existence assez pauvre et la reconnaissance après la mort ; un queuteur (ce terme existe ?) de première jusqu’à un âge fort avancé. Bref, le monsieur a lâché dans la nature un paquet d’œuvres assez disparates, le tout étant délicat à référencer pour les collectionneurs. Mais c’est la marque d’un grand artiste.

Le système de l’estampe japonaise. Le Tigre est très porté sur le noble art de l’ukiyo-e, technique de dessin japonaise précédent l’ère Meiji. En plus de cette technique, ce sont tous les à-côtés qui sont relatés : principe des sceaux du peintre (son nom du moment) et du « mécène » (disons celui qui fait la commande), demandes insistantes des puissants de l’archipel (les shoguns par exemple), on est assez proche de certaines contraintes occidentales.

L’occident fait une entrée assez remarquée avec la découverte, par le biais d’Hosukai notamment, de la peinture à l’aquarelle. Le vieux peintre, toujours en quête de nouveautés, va rapidement adopter cette nouvelle façon de produire. Le lecteur français aura droit à l’effet inverse (en quelque sorte), en attendant près de 15 ans pour voir ce manga enfin traduit.

…à rapprocher de :

– Sur les innombrables travaux d’Hokusaï, il y a un bel ouvrage que Le Tigre s’est vu offert : Estampes japonaises, de Neuer, Libertson et Yoshida, aux éditions Flammarion. « Tu viens chez moi regarder ma collection d’estampes japonaises ? » n’est plus un mensonge.

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Martine Monteil - Flic, tout simplementUne autobiographie assez récente sur un personnage exceptionnel de la police, voilà qui manquait à la bibliothèque du Tigre. Instructif sans être flamboyant, on est très loin d’un polar. Le quotidien policier vu de l’intérieur est bien rendu, entre précision et amour du métier. Pour l’impétrant aux métiers de la justice et de la sécurité : à lire, tout simplement.

De quoi parle Flic, tout simplement, et comment ?

D’abord, pourquoi avoir lu un tel essai d’ailleurs ? Lassen Sie mich erklären : Le Tigre adore passer toute sorte de concours, dont celui de commissaire (je n’en dirai pas plus). Or une fois admissible il y a des oraux, et le président du jury n’est autre que Mme Monteil. Alors tant qu’à être en mesure de glisser de subliminales remarques pendant un oral, c’est bon à prendre.

Ensuite, qui est donc Martine ? Une des premières femmes ayant réussi le concours de commissaire de police, à diriger des brigades souvent réservées aux hommes (stups, mœurs, BRB en particulier), puis préfet de la zone de défense de Paris. Parcours quasiment parfait d’une femme déterminée et forcément talentueuse dans son domaine.

Ainsi, la « super flic », exposant rapidement les raisons de son entrée dans le corps de commandement de la police, poursuivra par sa brillante évolution dans le métier et les nombreuses affaires qu’elle et son équipe ont eu à affronter. Solitude, solidarité, mais aussi guerre entre services, tout cela colle assez bien avec l’idée qu’on pourrait légitimement avoir du métier.

Enfin, le style. Que j’ai trouvé assez impersonnel et fort poussé sur la description. On sent aisément que dame Monteil est peu à l’aise dans le rôle d’écrivain. Disons que ses proches ont du, à plusieurs reprises, lui conseiller de sortir une autobiographie. Et ceux-ci ont eu raison, parce que derrière une modestie non calculée il est plaisant de lire un essai sur un monde viril et souvent brutal écrit par une femme intelligente.

De bons moments de lecture donc, avec de temps à autre une « touche » humaine bienvenue (même si l’ensemble est plutôt froid) chez un corps de fonctionnaires souvent mal considéré par la population. Car au-delà des affaires policières racontées, le lecteur apprendra quelques techniques managériales en milieu policier très utiles.

Ce que Le Tigre a retenu

Le dur métier de flic. On ne peut imaginer les horreurs qu’un policier peut rencontrer. Dans notre cas, il y a un tueur en série, des cadavres putrescents un peu partout (soit on fume comme un pompier autour du corps, soit un mouchoir parfumé sous le pif pour écarter l’odeur), l’accident de Lady Diana, mais surtout l’attentat du RER de 1995. Et là c’est un peu duraille ce qu’a vécu l’auteur, qui était aux premières loges.

Ce qui m’a également frappé, ce sont les grands de ce monde (du moins les gens très aisés) qui se font plaisir ici et là. Ayant œuvré aux stups et aux mœurs, la commissaire a rencontré des individus pas comme les autres (Le Tigre pense à Sagan). Stars prises dans un coup de filet anti drogues ; ou femmes de la haute demandant à ce que leurs noms n’apparaissent pas lors de perquisitions dans de riches lieux échangistes (leur mari ne doit pas savoir qu’elles se livrent à des « heures sup »). L’auteur garde la tête froide et jamais ne se laisse impressionner par ces extraordinaires configurations.

…à rapprocher de :

– Un autre témoignage d’un métier à risque, on pense de suite à Pierre Martinet et son DGSE Service action : un Agent sort de l’ombre. Sauf que Pierrot a pris bien plus de risques à l’écrire.

– Sur la BRB, un essai graphique se doit d’être lu : Enquêtes générales, de Pellicer & Titwane.

– Métier méconnu mais qui vaut le détour dans un essai, ce sont les Chroniques d’un médecin légiste, de Sapanet.

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Lucius Shepard - AztechsVO : idem. Il est des recueils de (longues) nouvelles qui ne laissent pas indifférent. Aztechs, bien que comportant quelques textes fort moyens, possède de jolies pépites. Fantastique, anticipation sociale agrémentée de SF militaire, de petites œuvres dans ces 500 pages valent le détour. Shepard, auteur encore trop méconnu, a de la suite dans les idées.

Il était une fois…

Six histoires, vais rapidement en résumer quelques unes, et ce grâce au quatrième de couverture. Merci à lui.

Mexique, dans un futur proche. Une nouvelle société, Aztechs, délivre une technologie supérieure et bon marché. Ca ne plaît pas aux gangs et multinationales déjà présentes qui voient leur part du gâteau sérieusement entamée.

NYC, un homme fouille les décombres de Ground Zero et tombe sur quelque chose de particulier…

Afrique noire, Congo. des hommes-crocodiles règnent sans partage sur une terre qui semble avoir été maudite par les actes de Mobutu.

Moscou, dans une boîte à la mode, l’Éternité. L’endroit, inquiétant, est peuplé par des individus en mal d’existence, entre la vie et la mort.

Critique d’Aztechs

Lu il y a longtemps, c’est amusant seule une nouvelle a particulièrement attiré mon attention. Bien sûr, celle dont personne ne parle. Génial. Ça rendra la partie sur les thèmes d’autant plus courte. Le reste a été rapidement mis au rebut, ce qui peut expliquer le tag « non terminé ».

J’exagère, il y a également le récit phare, celui du titre, qui seul mérite d’acheter le bouquin. Deux nouvelles exceptionnelles sur six, le quota semble respecté. Surtout que ce n’est pas tout à fait de la science-fiction classique que le lecteur aura entre les mains, mais quelque chose de réellement original qui requiert une certaine ouverture d’esprit.

En effet, si le style reste correct, les nouvelles peuvent faire plus de 100 pages (ce ne sont plus vraiment des nouvelles me direz-vous) sans réel chapitrage. Du coup ça paraît bien long à certains moments, et si vous n’avez pas la patience de poursuivre une histoire qui ne démarre pas sur les chapeaux de roue, il y a de fortes chances que vous ratiez quelque chose de beau. Ce qui est sans doute arrivé au Tigre.

Je m’attacherai donc, dans la partie suivante, à mettre deux thèmes relatifs à deux récits qui m’ont tout particulièrement surpris (suspense et intelligence du texte notamment), ce qui ne signifie pas que le reste est bon à jeter aux oubliettes.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

La jungle économique, zone de non droits : la nouvelle du titre représente un futur (pas si éloigné) où la frontière hispano-américaine est un endroit peu fréquentable. Au mains des MNE (entreprises multinationales) et diverses organisations criminelles, la bioéthique n’y est pas vraiment de mise. Description d’un univers à la limite du cyberpunk, le lecteur sera vite intégré dans ce nouveau paradigme (Le Tigre abuse de ce dernier terme il est vrai).

La lutte entre le masculin et le féminin. Une des intrigues est assez fine, et a comme trame de fond l’éternelle conflit entre deux guerriers, chacun représentant son espèce. A la suite d’un très vieux et profond malentendu, deux êtres se foutent non sans un certain entrain sur la gueule (il n’y a pas d’autre terme). Leur petite vendetta a lieu pendant toutes les époques, et leur puissances respectives ne passent pas inaperçues là où celles-ci s’expriment.

…à rapprocher de :

– Ces textes assez ambitieux et exigeants pour le lecteur ne sont pas sans rappeler les fables de Robert Charles Wilson ou d’un Robert J. Sawyer.

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James Church - Un mort à l'hôtel KoryoVO : A Corpse in the Koryo. Primo-lecture de James Church, auteur atypique ; Le Tigre découvre un polar qui se passe en Corée du Nord. Et il faut dire que le résultat est saisissant. Bien que les personnages soient peu travaillés et l’intrigue exagérément complexe, c’est tout un pays au sein duquel le lecteur évoluera. Même si c’est parfois traité superficiellement.

Il était une fois…

L’inspecteur O a reçu une mission toute simple. Faire le plancton en haut d’une colline en pleine campagne, attendre le passage d’une voiture et la prendre en photo. Forcément ça ne se passe pas comme prévu. Déjà l’appareil ne semble pas marcher, ensuite la berline noire roulait à vive allure et sans plaques d’immatriculation. Ça pourrait passer, sauf que l’inspecteur est nord-coréen. Et dans ce pays, lorsque les membres de l’état-major lui somment de leur dire ce qui a bien pu se passer, c’est qu’il y a un gros piège qui n’attend qu’à se refermer.

Critique d’Un mort à l’hôtel Koryo

Je préfère le dire de suite, Le Tigre féru de géopolitique a été ravi de ce roman policier qui se passe dans la dernière dictature stalinienne de ce bas monde. C’est pourquoi ça ne peut pas forcément plaire à tout le monde.

Les mauvais points d’abord : l’intrigue est, surtout au tout début, très délicate à saisir avec tous ces services coréens (police, armée, services de renseignements, …) qui se tirent entre les pattes. Quand au personnage principal, s’il est plutôt crédible et attachant, ses compatriotes qui passent dans le roman sont en revanche difficilement représentables dans l’esprit, même fécond, du lecteur.

L’histoire d’O (ne me dites pas que vous ne vous attendiez pas à une telle saillie douteuse de la part du Tigre) n’en reste pas moins étonnante : à partir d’une mission basique, les péripéties vont s’enchaîner et le héros va malgré lui mettre le doigt dans un engrenage qui dépasse son « simple » statut d’enquêteur. Au risque de rendre l’histoire invraisemblable par moment. La fin, magique, vaut largement ces presque 400 pages.

Le style, enfin est (pour un polar) plutôt fluide et l’auteur (notamment quand le héros va dans les villages montagnards éloignés) sait faire montre de poésie dans la description de ce pays.

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

La Corée d’honneur à l’eau Nord. Excusez la foireuse contrepèterie. Tout ça pour dire que des romans sur ce territoire qui ne sont ni des documentaires ni des essais ne courent pas les rues. Le lecteur est presque dans le pays, au moins dans les arcanes du pouvoir vus par un inspecteur tout ce qu’il y a de plus normal. Comment en arriver, pour un occidental, de penser à produire une telle œuvre ?

Cela m’amène à glisser un petit mot sur James Church. Avec un nom d’emprunt, James aurait été un Américain travaillant pour le gouvernement dans des contrées proches (sinon en plein dedans) de la Corée du Nord. Une riche expérience qui autorise à imaginer un tel polar. Roman où on sent d’ailleurs que, malgré la terrible situation de cette Corée, l’auteur a été saisi par la beauté de ses paysages.

On pourra aussi comprendre (voire pardonner) pourquoi Church excelle quand il romance les luttes entre factions politiques, les petits et grands arrangements politiques dans une dictature, tout en semblant avoir plus de mal à rendre compte de la vie réelle de ses habitants dans leur quotidien.

…à rapprocher de :

– James Church a sorti un autre roman, dont Le Tigre achètera tôt ou tard la version poche. Le monde est ainsi fait de petites missions.

– Le héros, policier, dans un pays totalitaire, il y aussi le bon Günther dans les romans de Philip Kerr. La Trilogie berlinoise ou La mort, entre autres.

– Sur la Corée du Nord, il y a Pyongyang, grandiose BD de Guy Delisle. Instructif et drôle (si cela peut se concevoir pour un tel pays).

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Haruki Murakami - Autoportrait de l'auteur en coureur de fondVO : Hashiru koto ni tsuite kataru toki ni boku no kataru koto (ouf). Le Tigre a bien failli être converti au jogging avec ce foutu roman. Coup de cœur tout personnel, ces 220 pages associent intelligentes confessions mâtinées de poésie. A lire en moins de temps qu’il ne faut pour courir un marathon.

De quoi parle Autoportrait de l’auteur en coureur de fond, et comment ?

Première (et seule) autobiographie de Murakami, la volonté de l’écrivain est réellement contagieuse. Déjà que Haruki est dans les petits papiers du Tigre, ce texte assez court au final a eu un écho particulier dans mon esprit. Je tiens à ce titre à préciser que je déteste le jogging. Trop long, trop dur, je préfère une séance d’elliptique ou un sport associant puissance et l’agilité (mâtinée de quelques réflexes).

En avril de l’année 1978, Murakami décide de vendre son club de jazz afin d’écrire un roman. En parallèle, et ce pour ne pas se laisser aller, à l’écriture se joint le jogging. Des débuts balbutiants aux multiples marathons aux quatre coins du monde, le lecteur sera dans la tête du fameux auteur. Écrit quelques semaines avant le marathon de NYC, la mémoire de l’auteur semble infaillible.

Sa manière de se confier, de se raconter est intéressante et terriblement séduisante. Beaucoup d’analyse sur le comment de la course, en quoi écrire et courir se rejoignent, les raisons d’avaler les kilomètres sans broncher, les impressions avant, pendant (à quoi pense un marathonien ?) et après, tout est abordé.

Sur le style, c’est tout ce qu’il y a de japonais : pas de familiarité, une retenue toute orientale au service d’un but : courir et écrire, deux activités qui au fil de l’essai se révèlent indissociables. L’esprit et le corps à l’unisson, c’est beau. Du coup, on a l’impression qu’un professeur (voire un ami) nous narre son programme, les difficultés et joies qui se présentent.

Autoportrait… se lit donc fort vite, et est un passage littéraire obligé pour tout joggeur qui se respecte. Pour le non sportif à la Churchill, peut-être vous changerez d’avis. Au moins vous comprendrez un peu mieux « l’esprit running ».

Ce que Le Tigre a retenu

Premièrement, la volonté de l’auteur. A 30 ans bien sonnés, vendre son club pour écrire, ça passe. Avec sa vie de tenancier d’un établissement nocturne, le mode de vie de l’auteur n’était pas optimal. Trois paquets de clopes par jour en sus, Le Tigre a été pantois devant un tel homme qui se met progressivement à courir. L’arrêt de la cigarette s’est naturellement imposé, et, malgré la violence perçue par son corps au début, Murakami n’a pas une seconde songé à arrêter les frais.

Deuxièmement, cet ouvrage est aussi une invitation au voyage. En plus du « voyage intérieur » (oh c’est niais) du marathonien pendant ces 42 bornes, été comme hiver, Murakami a couru dans un beau paquet de destinations : Nord du Japon, Hawaï, Boston, Grèce (avec une équipe de journalistes),… Chaque endroit apporte son lot de variations (infimes ou plus triviales) qui sont grandiosement décrites, le lecteur se fait plaisir et souffre de concert avec l’écrivain.

Troisièmement, et on s’en doute, il appert, qu’au-delà de l’immense douleur des premières sessions, courir constitue rapidement une sorte de drogue. Le Japonais a rapidement besoin de sa dose quotidienne de running, et comme tout bon drogué augmente progressivement la cadence. Sauf que c’est bon pour la santé. En partie, parce que les articulations en prennent pour leur grade.

…à rapprocher de :

– Cet essai est un amuse-gueule plus que savoureux vers quelque chose de bien plus ambitieux, à savoir la trilogie 1Q84 du même auteur. Ou Les amants du Spoutnik, qui tient bien la route. Pour ma part, j’ai une préférence toute particulière pour Au sud de la frontière, à l’ouest du soleil.

– Un autre auteur a écrit une biographie, lue par Le Tigre, c’est Irving et sa Petite amie imaginaire. Moins bon.

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tthew B. Crawford - Eloge du carburateurVO : Shop Class as Soul Craft. An Inquiry into The Value of Work (la traduction française est plutôt libre). Conseillé par un ami philosophe (l’entourage du Tigre est vaste), cet essai tente de démontrer de manière très docte comment le travail dit « intellectuel » est une supercherie contemporaine. Compliqué voire abscons, j’ai bien failli lâcher le morceau.

De quoi parle Eloge du carbu, et comment ?

Matthew B. Crawford a eu un parcours assez atypique. Élevé dans une communauté au sein de laquelle il remplissait de menues fonctions d’électricien, étudiant à l’université porté sur la mécanique, doctorant talentueux à qui on propose ensuite la direction d’un think tank (rémunéré par une compagnie pétrolière), poste qu’il a quitté pour monter un garage de réparation de motos.

A ce titre le quatrième de couv’ est un peu trompeur : ce n’est pas l’histoire d’un homme qui du jour au lendemain laisse tomber son très lucratif métier de col blanc. Plutôt celle d’un « enfant de la balle » très tôt plongé dans le bain de la bricole qu’il n’a jamais quitté. Aussi lorsque son métier ne lui convient décidément pas, c’est tout naturellement que Matthew se tourne vers ce qu’il sait faire de mieux. Pas de reconversion étonnante donc.

Car l’auteur est un grand connaisseur des mécaniques d’une moto et ne se prive pas, au long de cet essai, de nous faire partager ses joies (et surtout ses problèmes, dans le sens scientifique du terme) lorsqu’un tel objet doit être réparé. A ce titre Le Tigre, certes curieux, a eu souvent du mal à saisir de quoi il retourne. Par exemple :

S’armant d’un pied à coulisse vernier pour mesurer la compression du ressort, il me fit resserrer l’étau jusqu’à ce que la lecture du vernier corresponde à la mesure de la soupape au repos moins la longueur de son ouverture maximale.

Bon, ça me parle un peu, mais après dix pages de cet acabit j’étais content que Crawford revienne à des considérations plus « philosophiques ».

Et voilà le grief contre l’auteur : Le Tigre a fait un cycle supérieur et aime à croire qu’il est en mesure de comprendre quelques notions mobilisant les neurones. Or ici c’est trop, on a l’impression de lire une thèse. Notes de bas de pages plus longues que le texte, termes exagérément épineux à saisir, faut s’accrocher. Imaginez avoir ce genre de prose toutes les dix lignes :

Elle présuppose une forme de solipsisme […]. Mais il s’agit là d’une conception qui oblitère notre dette naturelle à l’égard de l’univers et manifeste une forme d’ingratitude profondément erronée sur le plan moral.

Autre petit défaut, le traducteur a parfois eu un certain mal à rendre compte des mots utilisés par l’auteur, du coup il les indique (« pattern » pour configuration) ; en sus le lecteur sentira la grammaire anglo-saxonne (utilisation du passif notamment).

Pour conclure, Éloge du carburateur est un superbe outil d’appoint pour tout manager ou curieux du monde de l’entreprise. Hélas cet essai ne saurait se lire seul, sur un coup de tête à moins d’avoir du temps et une partie de cerveau disponible. En VO ça pourrait aussi mieux le faire.

Ce que Le Tigre a retenu

Eu égard à la scandaleuse densité de l’ouvrage et le cahier des charges du Tigre (500 à 1.000 mots, exceptionnellement plus), je vais m’attacher à résumer deux-trois idées qui ont eu un certain écho dans mon esprit. Bref, les rares considérations que j’ai été capable de saisir.

Déjà, le système économique et productif qui fait que l’esprit de réparation a quasiment disparu. On pense de suite aux nouveaux produits dans le marché : il ne viendra jamais à l’idée de personne de réparer son smartphone qui a un défaut d’affichage. La plupart du temps, le concepteur s’arrange pour qu’on ne puisse l’ouvrir. La porte de votre micro-ondes est cassée, il revient moins cher d’en acheter un nouveau que de changer ladite pièce. Tout s’est complexifié, les notices sont écrites par des intellectuels qui ne comprennent rien au produit, bref il semble temps de revenir à quelque chose de plus simple.

Ainsi, il vaut mieux être de suite plombier plutôt que trainailler à l’université. Ce premier métier nécessite un apprentissage progressif inégalable dans les livres, et surtout n’est pas délocalisable.

Ensuite, la réparation des motos anciennes à proprement parler. Et bah c’est bien plus retors que bichonner sa voiture. Ces bestioles là sont terriblement susceptibles. Fabrication à la base pas forcément bien pensée, diagnostiques des pannes qui sont de vraies quêtes, on n’est pas loin de traiter avec une entité vivante qui (selon la marque) a ses propres défauts et doit être manipulée avec d’infinies précautions. Le mécanicien pourra dévorer l’ouvrage en se concentrant uniquement sur les anecdotes de l’auteur dans ce domaine.

Enfin, en guise de vrac : les diplômes qui ne sont que signalétiques et sont grandement démonétisés ; le taylorisme qui a fait disparaître l’artisanat et qui s’applique au secteur tertiaire ; la dictature « soft » de l’entreprise où l’employé se doit d’adhérer à sa politique,… Mais surtout les cols blancs qui œuvrent au sein d’un poste tout sauf intellectuel puisque les processus de création et de gestion des tâches sont décidés par une minorité au sommet.

…à rapprocher de :

– Aucune idée pour l’instant, désolé. A part que je vais me mettre à la plomberie (ou pompier, ou contremaître, ou…).

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Paul Auster - Travels in the ScriptoriumVF : Dans le scriptorium. Le Tigre n’a point attendu la traduction française pour acheter ce Paul Auster. Moins de 150 pages, texte simple, histoire compliquée à multiples ramifications, c’est surtout grâce à un style d’une fluidité séduisante que ce roman peut se dévorer. Les sens de l’œuvre sont en sus légion donc propices à pas mal d’interprétations.

Il était une fois…

Un homme se réveille, perdu, dans une chambre inconnue. Prisonnier de quatre murs avec comme point d’horizon une unique fenêtre. Sur son bureau, deux manuscrits, de quoi écrire et des photographies en noir et blanc. L’homme reçoit la visite de mystérieux personnages, dont Anna qui l’appelle par un nom qu’il ignore. Constamment filmé dans sa pièce, il paraît évident qu’on attend quelque chose de lui. Qui est-il, et que sont les individus qui l’interrogent ?

Critique de Dans le scriptorium

Le Tigre l’annonce de suite, j’ai lu ce roman à la va-vite et sans m’attarder sur les nombreux sous-entendus du roman. Maintenant que je le résume, il va falloir s’y mettre un peu plus sérieusement.

Je me souviens d’un ouvrage fort facile à lire, voire savoureux  : en effet l’enchainement des mots en Anglais est presque parfait, on se laisse porter par la prose d’Auster qui est loin d’être un débutant en la matière.

Quant à l’histoire, c’est un peu confus dans l’esprit du Tigre. Bizarre au possible, j’ai cru lire de la SF au début. Et puis du bon mystère, avec une histoire assez « space » et dotée de multiples tiroirs. Condition de l’auteur et du devenir de ses personnages, guerre imaginaire contre un ennemi commun, Auster apporte de multiples références que Le Tigre n’a pas forcément saisies.

Bref, ce roman ne peut laisser indifférent, surtout dans la configuration d’un huis clos oppressant. Et en Anglais c’est assez féérique comme lecture. Qu’en est-il de la traduction française ?

Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)

L’enfer personnel. L’enfer, ce n’est pas forcément les autres (hein Jipé S.). Peut-être ça l’est un peu plus lorsque les autres en question sont une invention de l’auteur. Quoiqu’il en soit, il appert vite que le héros fait face à des individus qui ont quelque chose d’assez grave à lui reprocher. Tel un Sisyphe où la littérature fait office de rocher, le narrateur va progressivement accéder à la conscience de son problème, jusqu’à une fin tout à fait satisfaisante.

Ainsi, le roman propose une vaste mise en abîme que Le Tigre, en lisant dans la version originale, a été un peu long à déceler. Travels in the Scriptorium, comme le titre laisse l’indiquer, c’est une visite personnelle de Paul A. dans son écriture, du  « process » de fabrication à la relation que l’écrivain peut avoir avec les personnages qu’il a imaginés. Aussi l’univers paraît froid et inquiétant, ce qui peut être le cas d’un roman en cours de rédaction lorsque les pièces mettent un certain temps à s’assembler. Du moins c’est ce qui m’est venu à l’esprit.

…à rapprocher de :

– Du même auteur, Tigre a largement préféré Le Livre des illusions.

– Sur le travail d’écriture d’un auteur, avec mise en abîme à la clef, il y a Vers chez les Blancs, de Djian.

– L’ambiance au long du roman, dans un pays énigmatique un peu désuet où une guerre fait rage (l’Irak me dites vous ?) rappelle Mysterium de Robert Charles Wilson.

Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver ce roman via Amazon ici (en français).