Incontournable titre de l’immense auteur de space opera Reynolds, The Prefect s’inscrit dans la fabuleuse saga des Inhibiteurs, bien que ce titre puisse se lire seul. Thriller technologique se déroulant dans des habitats spatiaux, un pur plaisir de suspense où les considérations sur les systèmes politiques ne manquent pas.
Il était une fois…
Tom Dreyfus est un Préfet (Prefect dans le roman) au sein de Panoply. En fait, une sorte de policier chargé de veiller à la bonne tenue des logiciels d’élection dans l’Anneau de Lumière, ceinture d’astéroïdes entourant la planète Yellostown, base de la puissante civilisation démarchiste. Finissant son enquête sur des malversations autour d’un habitat spatial, Tom est chargé d’enquêter sur une attaque qui a tué 900 citoyens. Sur place, il découvrira que c’est un peu plus retord que prévu, en effet une menace terrible plane sur l’Anneau de Lumière.
Critique de The Prefect
Dernier petit-né de la saga Inhibiteurs, voici une (relativement court) histoire rondement menée qui n’a pas laissé Le Tigre indifférent. Tout d’abord, il faut recaser le contexte : il semble que The Prefect se passe avant même le premier roman du cycle, bien avant le cataclysme qui va détruire l’intégralité de Yellostown. Pas un prequel, ni un one-shot, on parle plutôt de « stand alone ». Donc n’importe qui peut attaquer ce roman, aucun prérequis !
Sur l’histoire, encore du lourd : nous suivrons une grande organisation (Panoply) qui opère dans la ceinture d’habitats entourant une puissante planète. Les habitats étant globalement indépendants, notre héros de Panoply ne s’occupe que des systèmes de votes assistés par des nanorobots afin d’éviter toute triche. Bien vite une mission particulière (une invraisemblable tuerie) va mobiliser toutes les ressources de nos héros (Tom D. et ses collègues). Ceux-ci seront plongés dans une sombre machination qui a pourtant pour vocation d’éviter quelque chose de plus terrible (je ne dirai pas quoi).
Ensuite, le style : en anglais, rien à dire question compréhension (Le Tigre n’étant pas bilingue). Chapitres certes assez longs, mais pour une fois Reynolds parvient à passer sous le seuil des 600 pages. Champagne ! Pour ma part, j’ai été transporté par cette histoire même si je suppute ne pas avoir intégralement compris certains passages. Être familier de l’univers créé par l’auteur a été d’un grand secours.
Comme toujours, quelques idées totalement révolutionnaires de la part du Gallois. A titre d’exemple (d’autres sont dans les thèmes), le fonctionnement de Panoply est fort bien pensé : des niveaux d’accréditation selon l’importance de l’affaire (avec des noms laissant rêveurs, du style Manticore ou Pangolin), l’intervention immédiate par le vote des citoyens (savoir si on peut utiliser une arme), une hiérarchie stricte et claire, bref une administration efficace.
Enfin, vous l’aurez sûrement compris, c’est une œuvre excellente mais pas forcément évident à saisir tous les petits détails. Le fin mot de l’histoire renvoie, non sans brio, avec le cycle principal des Inhibiteurs qui, rappelons-le, m’a fait un second trou du cul. Sorti il y a quelques années, nos éditeurs ne semblent pas décidés à se bouger et traduire le roman, ce qui est fort dommage.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
La Démarchie. En ai déjà parlé dans la Cité du Gouffre, vais me concentrer ici sur le système de votation. Chaque habitat a la politique qu’il souhaite, souvent certains proposent des expériences politiques innovantes (dictature, anarchie), la base étant que chaque citoyen puisse voter (par la pensée). Pour certaines décisions concernant l’intégralité de la ceinture d’astéroïdes, tous émettent une opinion qui est sauvegardée. Plus tard, si telle ou telle décision est jugée rétrospectivement bonne, ceux qui ont jadis voté pour auront un « bonus de vote » (et vice versa) : le coefficient de leurs voix sera augmenté, jusqu’à être multiplié par trois. Intéressant. Avec ce principe; nos politiciens n’auraient même pas le droit de voter !
Les « simulations beta ». Déjà présentes dans L’espace de la révélation, ces simulations sont finement imaginées par Reynolds. L’interface homme-machine presque au point ! Vous prenez un esprit humain, et hop on le transfère dans un ordinateur quantique. Comme ça si ladite personne meurt, on peut toujours récupérer un de ses clones et « transférer » sa psyché. On y a affaire dans ce roman, puisque les Préfets, dans leur mission, débusquent une de ces simulations (celle d’une certaine Delphine) pour savoir ce qui s’est passé.
La méchante technologie. La chef de Panoply a un gros souci : le Clockmaker, c’est une invention qui a terriblement mal tourné et qui a pu implanter le « scarabée » dans la nuque du boss. Si on tente de le lui retirer, si elle est trop stressée, ou si elle dort, la chose explose. Maintenue dans un espace clôt et constamment sous drogues, Jane Aumonier (c’est son nom) a de la volonté puisque ça fait plus de dix piges que ça dure. Sans spoiler, ce que les protagonistes imaginent pour le lui retirer est hallucinant. Et terriblement logique.
…à rapprocher de :
– L’univers du cycle des Inhibiteurs dans lequel se joue The Prefect, ça commence ici pour finir là. La Cité du Gouffre, en particulier, nous offre un autre aperçu de la société démarchiste post peste.
– Pour en savoir un peu plus sur cet imposant arc narratif, les recueils de nouvelles Galactic North et Diamond Dogs, Turquoise Days sont tout indiqués.
– Une autre saga, intitulée les Enfants de Poseidon, n’est pas mal non plus : Blue Remembered Earth, On the Steel Breeze, etc.
– Century Rain est différent, et un peu en-deçà de mes attentes. La pluie du siècle, en VF.
Pour finir, si votre librairie est fermée ou ne propose pas de titres en anglais, vous pouvez trouver ce roman en ligne ici.
Palahniuk est un grand malade, et pour notre plus grand plaisir. Mais quelle imagination ! Après la chute d’une secte néo esclavagiste un homme est pris en main par les autorités pour réapprendre à vivre. Bien sûr tout va se compliquer. Humour dérangeant, situations improbables, narration originale, encore une petite perle.
Sorti au début des années 2010, justement récompensé, Chroniques de Jérusalem vaut largement un essai politique sur la région. Roman graphique dense et facile à suivre, on se régale à suivre les pérégrinations de Guy et ses carnets de croquis. Région en tension permanente, personnages pittoresques, la vision de Guy semble, en conclusion, assez juste.
VO : Il Cimitero di Praga. Le Tigre s’est tardivement mis à Umberto Eco, à la limite du sacrilège. Son sixième roman, longue odyssée au long du XIXème siècle, est mitigé : à destination d’un lectorat cultivé, certes quelques petites touche d’humour mais fort exigeant et passablement complexe. L’exercice est louable, pas ma came hélas.
Dans le cadre de mes « batlectures » et grâce au reboot du fameux héros, voici les premières armes de Wayne en tant que chevalier noir. Mais aussi celles de Jim Gordon qui est nouveau dans Gotham. Scénario qui tient la route, dessin impeccable quoique classique, un ouvrage somptueux qui démarre bien la série.
Sous titre :Essai sur les hommes de la terreur. VO : Schreckens Männer – Versuch über den radikalen Verlierer. Na ja ! Ouvrage très court et d’une densité impressionnante, le lecteur suivra le cheminement intellectuel menant au terrorisme. Titre polémique et sans concessions, on peut ne pas être d’accord.
Après la Chine et la Corée du Nord, retour en Extrême-Orient dans un pays où ONG et gouvernement sont loin de travailler main dans la main. Ouvrage dense et complet, Delisle manie la pédagogie aussi bien que l’humour, malgré un début un peu poussif. Toutefois, la plongée dans la Birmanie reste totale. Un plaisir.
VO : Paratiisisaaren vangit. Bon petit roman sans prétention d’un de mes auteurs scandinaves préférés : sur 200 pages c’est une délicieuse utopie toute en finesse qui se déroulera, facile et rapide à lire. Le génie scandinave, tant dans l’écriture que les modes de survie décrits. Pour une fin toute savoureuse.
VO : The Dead Heart. Un homme prisonnier d’une communauté perdue en Australie et obligé d’épouser une fille locale. Piégé dans cet enfer, comment s’en tirer ? Thriller d’excellente facture, Kennedy est parvenu tant à faire sourire qu’à peiner le lecteur, le tout servi par un style sec et efficace. Un must.
VO :A Hidden Place. Robert Charles Wilson a toujours les faveurs du Tigre. Ce premier roman, écrit en 1986, plongera le lecteur dans l’Amérique puritaine des années trente. Et porte déjà les qualités romanesques de l’auteur : narration simple, bonne dose de mystère pour des révélations au compte goutte, protagonistes attachants dépassés par les événements, que du bonheur.
VO : The Butt. Un homme, prisonnier d’une île lointaine, sera trimbalé de droite à gauche à la suite d’un regrettable geste en apparence anodin. Et c’est parti pour plus de 400 pages d’aventure. En principe, Self, c’est court et détonnant. Ici, un peu trop poussif à mon avis, Le Tigre a eu largement le temps de s’ennuyer. Dommage.
Ha ha ha, une BD des années 70 de politique-fiction. Retrouvée au fond d’un placard, Le Songe d’Atthalie est une petite histoire fort sympathique et toute épicée. La gauche de l’époque en prend pour son grade. Lecture rapide et aisée, humour omniprésent, Le Mutin maîtrise bien son sujet.