Sous-titre : D’après les souvenirs d’Alan Ingram Cope. Du beau boulot, rien à dire. Les réminiscences d’un vieil homme qui a contribué à la libération de l’Europe, avant, pendant et après la guerre, un témoignage poignant servi par des illustrations plus que correctes, Le Tigre valide. Essai ? Roman graphique ? Les deux mon général !
Il était une fois…
Emmanuel Guibert, grand dessinateur, a par hasard rencontré Alan qui coulait une retraite paisible sur l’île de Ré. Les deux hommes se voient régulièrement, tissant une amitié longue et artistiquement prospère. Alan a en effet combattu l’Allemagne nazie sur le théâtre ouest-européen, et sa mémoire presque infaillible délivrera plus que ces souvenirs.
Critique de La Guerre d’Alan
Emmanuel Guibert aime prendre du temps avec des personnages d’exception (du moins une partie de leur existence l’est), recueillir leurs témoignages, et en faire un roman graphique. Grâce à des heures de conversations enregistrées (d’où les éclats de rire compris), trois tomes maintenant regroupés ont pu être délivrés. Juste à temps, l’auteur a assisté au décès d’Alan alors que celui-ci n’a pu voir le résultat final. Dommage.
A titre liminaire, je m’attendais au débarquement et à quelques belles bastons dès le début. Il n’en est rien, après un entraînement efficace mais sommaire Alan est arrivé plutôt tardivement en Europe. Je n’ai pas bien compris les dates, toutefois en posant le pied en France des soldats américains sont déjà près du Rhin. Car Emmanuel G. illustre la guerre intérieure d’Alan, et non la « guerre » en général (cf. le premier thème).
Comme si, quand cela est raconté par des individus « normaux », l’horreur de la guerre fait qu’alors le conteur cherche à parler de tous les à-côtés, et ce pour équilibrer ses émotions. Ou, pire, tout ce qu’il a vécu comme aventure humaine découle de ce conflit (la plupart des connaissances d’Alan ne prennent racines que dans cette époque).
C’est parce que le récit est livré avec une simplicité et une intimité qui honorent nos deux amis que ce roman graphique est réellement à part. Suivre le parcours d’Alan est un pur plaisir et Le Tigre n’a pas vu le temps passer (sauf sur la fin). J’ai trouvé le ratio illustrations / texte assez faible, disons que le lecteur doit provisionner trois bonnes heures pour apprécier La Guerre d’Alan.
Les illustrations ne m’ont pas choqué dans la mesure où Le Tigre associe ce genre de période aux photographies en noir et blanc (sauf quelques dernières pages) Les traits des protagonistes sont peu fouillés, mais les décors, waow ! Quelques planches, sobres en apparence, fourmillent de détails vivifiant la lecture de l’ouvrage.
Au final, une BD dont il est difficile de dire du mal. Le seul reproche à formuler serait que trois bons quarts de l’œuvre consistent au quotidien parfois morne d’un homme. Ça peut être déroutant quand aucune mise en perspective avec l’évolution globale du conflit n’est formulée. Ce serait une critique formulée par un lecteur qui rechercherait de l’action, à l’instar du Tigre dans une certaine mesure (je reste un bon bourrin). Ensuite, Le Tigre a un peu baillé sur les cinquante dernières pages, qui traitent d’Alan des années 50 jusqu’à la fin du millénaire.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Le titre est légèrement trompeur, comme je le disais. Le lecteur aurait pu légitimement s’attendre à quelques interventions militaires d’importance, or il appert que le combat d’Alan est tout autre. A mon sens, il est davantage question de la voie que va prendre Alan après les hostilités : embauché en tant que civil auprès des autorités militaires, il restera quelque temps en Europe avant de se former en tant que pasteur en Californie. C’est à ce moment que notre ancien soldat émet quelques doutes (notamment sur sa fiancée dont il se séparera rapidement), jusqu’à tout lâcher et s’installer à la Rochelle.
S’il ne faut retenir qu’une chose de cette BD, c’est bien la force d’un homme capable de se remettre en question, sentir que le chemin qu’il prend n’est pas le bon, et surtout changer de voie sans regarder en arrière.
J’ai découvert que le père Patton (le général francophile un poil dingue sur les bords) a envoyé des troupes jusqu’en Tchécoslovaquie. Imaginez, il voulait être en Europe orientale avant les Russes pour les empêcher de prendre trop de territoires. On apprend même qu’une délégation de soldats (dont faisait partie le héros) a été envoyée encore plus loin derrière les lignes afin de négocier avec un général allemand une reddition, ou quelque chose dans ce goût là. Sauf que ça n’a pas donné de résultats tangibles.
Il y a enfin une belle dose de tendresse, sinon, d’humour. Tous ces boys n’étaient pas totalement préparés aux horreurs qu’ils allaient subir. Certes ils ne sont pas parfaits (la case « pillage » était régulièrement cochée), mais Alan a risqué plus d’une fois la cour martiale en « traînant » avec des Allemands : il a eu d’excellents contacts avec quelques familles en leur rendant régulièrement visite, ce qui était à l’époque prohibé. Humour, par exemple, quand on apprend comment notre soldat a obtenu la Purple Heart : il a juste eu une mémorable gamelle en tombant d’une grange parce qu’un de ses camarades avait retiré l’échelle.
…à rapprocher de :
– A signaler, L’enfance d’Alan. Toujours aussi bon, et on peut lire cet opus indépendamment.
– De Guibert, j’ai également gardé un superbe souvenir du Photographe. Direction l’Afghanistan !
– Guibert et B. David (scénario) ont produit l’étonnant Capitaine écarlate, que je ne peux que vous conseiller.
Ce ne sont pas les BD « de guerre » qui manquent dans ma bibliothèque :
– Les trucs de Dupuis (par exemple ici, par là ou de ce côté).
– Antony Beevor (gros essai, attention) a su conjuguer grandes manœuvres stratégiques et anecdotes du soldat de première classe.
Toutefois, sur la vie plus « intimiste » des militaire, je ne vois (pour l’instant) que C’était la guerre des tranchées, de Tardi. Un petit bijou (d’antimilitarisme).
Enfin, si votre librairie est fermées, vous pouvez trouver ce roman graphique via Amazon ici.
John Malkovitch en personne m’a vendu chèrement ce titre « crazy », imaginez ! Le moins que l’on puisse dire est que l’acteur n’a plus toute sa tête. Excessif, humour lourdingue, intrigue presque inintéressante, références obscures (sinon attendues), vocabulaire répétitif, ce n’est hélas pas fameux. N’ai pas du tout pris mon pied.
Joseph Kessel ne cessera d’étonner Le Tigre. Félix Kersten, le dernier des justes, masseur du chétif Himmler, devenu son ami et confident, qui est parvenu à sauver des milliers de personnes ? L’histoire est édifiante, et grandement servie par la prose de l’académicien. La question qui se pose après la lecture est terrible : est-ce vraiment un essai biographique ?
VO : Paying for It. Un auteur peu connu (du moins depuis ma tanière) qui décide de « payer pour ça ». Ne vous attendez pas à du sexe à tous les étages, c’est avant tout intellectualisant. Le classement de cette œuvre dans les biographies est largement justifié, d’autant plus qu’à l’instar de ce genre d’essais c’est parfois longuet. Mais édifiant.
« Salut mec ! Putain, ça fait déjà des piges que Mon beau-père et moi est sorti sur les écrans, et le happy end final est un peu mensonger sur les bords. Le gros De Niro est resté insupportable, un vrai bouledogue impossible à apprivoiser. Tu n’aurais pas quelques romans à me conseiller pour qu’il arrête de me me chier dans les bottes ? Thks. Ben S. »
Une idée originale qui confine au génie, une leçon d’art graphique qui peut se savourer autant sur papier qu’en numérique, différents niveaux de lecture qui s’offrent au lecteur, bravo. Il y a certes quelques longueurs contemplatives à déplorer, et encore. L’histoire, on s’en moquerait presque au final s’il n’y avait pas cette énigme qui tourne autour d’un scandale dans le monde du football.
Sous-titre : Cycle de violence. VO : Cycle of Violence. Batman, The Dark Knights #10-15 + #0 (attention c’est important ici la numérotation). Une magnifique histoire, bien sombre comme il faut, à l’image de la couverture d’une glauquerie de bon aloi. Batman n’est pas à la fête, et pour une fois c’est un ennemi peu connu qui va nous régaler.
VO : idem. L’Irlande du Nord, Belfast, les nombreux antagonismes locaux, des personnages savoureux à qui il manque plus d’une case, voilà un bon moment de littérature. Si ce n’est pas le meilleur titre de cet auteur (notamment le début qui est loin d’être prenant), Eureka Street reste une pépite d’humanité et d’humour corrosif sur un sujet plutôt sensible.
Sous-titre : La Malédiction de la Tour Saint-Jacques [ooouuuuhhh, peur !]. Paris, ville des lumières, de l’Histoire, de l’Amour,…et glorieuse cité victime de bandes dessinées mal dégrossies qu’on n’offrirait pas à son meilleur ennemi. Le scénario était prometteur, mais tout a été gâché. Le premier tome, dédié à une malédiction de la Tour Saint-Jacques, ne donne pas envie de continuer dans cette voie.
Dans ce volume de l’encyclopédie féline, je vais tenter de vous expliquer comment transformer une innocente visite chez le véto en un impressionnant maelstrom dont il ne se remettra pas complètement. Accrochez-vous, ça va dépoter dans le bureau du praticien.
Sur ma version, y’a un gros macaron « PAR L’AUTEUR DE TITEUF ». Merci captain obvious, ah ouais là je vais l’acheter. Sympathique, mais sans plus…illustrations pauvres et concentrées sur les personnages (qui finissent par tous se ressembler), presque une déception. Ce serait du turbin alimentaire que ça ne m’étonnerait pas.
Gros pavé qui fait partie d’une trilogie (avec Solal, si je ne me goure pas), j’ai bien failli à ne pas aller jusqu’au bout. Au milieu des années 30, nous suivrons l’existence de cinq potes et cousins juifs qui se font appeler les Valeureux, sur une île grecque. Too long, too much, j’ai baillé trop souvent. Rabelais est bien loin.