VO : [impossible de trouver le titre, si quelqu’un a une idée…]. Les histoires de Jørn Riel (trois en l’occurrence), adaptées par Gwen de Bonneval (au scénar’) et Hervé Tanquerelle (illustrateur), sont aussi tendres qu’acides. L’univers du Groenland, terre pas aussi inhospitalière qu’on pourrait le croire, apporte de belles surprises littéraires au Tigre.
Il était une fois
Jørn Riel est un Danois qui a passé quinze bonnes années au Groenland dès les années 50. Grâce à une expédition scientifique au Nord-Est d’une île, il a pu sentir de plus près l’ambiance et apprendre à connaître les locaux. Pendant toutes ces années, il a notamment pu écouter les histoires des locaux et a rédigé un joli tas de volumes à ce sujet. Voici ces fameux racontars en versions illustrées.
Critique d’Un petit détour (et autres racontars)
Il arrive au Tigre, dans une librairie, de fermer les yeux et prendre un titre au pif. C’est un jeu auquel je m’abonne une fois par mois, et sur ce coup j’ai encore eu une chance de cocu. J’ai dévoré avec avidité la centaine de pages et ai eu envie de continuer d’aligner tous les tomes des histoires de Riel mises en BD.
Cet opus comporte trois racontars, dont un sensiblement plus long que les autres (le deuxième). 1/ Duel entre un homme et un ours, ce dernier étant tué presque par accident au final. Mignon et bien rythmé. 2/ Un vieux de la vieille et un ancien militaire chassent sur un bateau. Un iceberg se détache et les deux hommes se retrouvent, presque par magie, en haut du bloc de glace. Ils vont dériver dessus pendant de longs jours… 3/ Emma, somptueuse femme qui n’a guère froid aux yeux, est l’objet d’intenses fantasmes de la part des habitants du cru qui se la refilent contre du troc. Jusqu’à ce qu’un « acheteur » souhaite la rencontrer pour de vrai.
La dernière nouvelle est mignonne et terrible à la fois : si on sent bien qu’une telle femme a peu de chance d’exister dans la réalité groenlandaise, il faut avouer que savoir de qui il s’agit en vérité titillera plus d’un lecteur. Le pouvoir de l’imagination qui peut sévir auprès d’une population mâle esseulée est autant poétique que triste, et pour une fois un racontar traite de certains besoins charnels de ces messieurs.
Hervé Tanquerelle a produit un boulot d’une rare qualité. Pages en noir et blanc qu’on croirait passées au fusain, certaines planches présentent des plans d’ensemble (qui d’un somptueux paysage, qui d’une maison, qui de dix potes autour d’une table) qui font plaisir aux yeux. Quant aux protagonistes, l’illustrateur parvient à mélanger les genres : soit les traits sont caricaturaux et rigolards, soit le réalisme est frappant, par exemple les regards de certains Groenlandais à qui il manque une case. Ce qui rend encore plus poreuse la frontière entre ce qui est exagéré de ce qui est fidèle à la réalité.
Au final, de Bonneval a su superbement adapter les histoires du Danois dans un univers graphique, et fatalement je me suis posé la question de la réalité de telles anecdotes. Et l’auteur danois, intelligemment, répond avec la définition qu’il donne du « racontar » : une histoire vraie qui pourrait passer pour un mensonge. À moins que ce ne soit l’inverse.
Thèmes abordés (du moins selon Le Tigre)
Je reviens rapidement sur la notion de ce qu’est un racontar, même si beaucoup a été dit. Dans notre cas, il s’agit d’un conte, une petite histoire avant tout arrangée par l’intéressé afin de ne pas passer pour un mauvais bougre. Sortir la tête haute et ne pas perdre la face face à ses amis est primordial, il est alors compréhensible que Silverts, Valfred, Fjordur, Museau, Mads Madsen, Lodvig et les autres se répètent ces histoires, subtilement modifiées au fil du temps.
La deuxième chose qui me vienne à l’esprit est la rudesse des gens là-bas. A mi-chemin entre des brutes surtestostéronnées et des êtres ayant des fulgurances de bonté parfaitement touchantes. Je ne sais pas dans quelle mesure l’environnement leur porte sur le ciboulot (le froid, la nuit polaire, les étendues immenses, la consommation d’alcool), toutefois certains accusent de sérieux troubles – Tigre pense à la première histoire où le gus s’en prend directement à un ours. L’homme nordique comme on peut se plaire à l’imaginer, sur ce point Riel ne nous déçoit guère.
…à rapprocher de :
– Ces auteurs ont d’autre BD dans leurs besaces, à savoir La Vierge froide et autres racontars. Vais me la taper celle-là (la bande dessinée hein…). Et Le Roi Oscar et autres racontars. Le tout est réjouissant. Dommage qu’une intégrale ne soit pas sortie.
– Le grand nord, la solitude, la rudesse du climat, ça me rappellerait presque le bon Conan et ses couillues aventures adaptées en BD. Pour l’instant, je n’ai lu que La reine de la côte noire. Pas mal.
Enfin, si votre librairie est fermée, vous pouvez trouver cette BD en ligne ici.
Erreur de casting, suivant ! Histoire tragico-mièvre sur fond de secret familial qui prend ses sources pendant la seconde guerre mondiale, la lecture fut autant laborieuse que la fin salvatrice. Sans condescendance aucune, ce truc est un livre pour les femmes. Celui-ci n’avait rien à faire entre mes griffes. Mais comme je ne lâche pas mes proies…
VO : Night Of The Owls. Tiré du comic strips Nightwing #8-12 et #0. Parce que le premier tome n’était pas complètement catastrophique et annonçait une intrigue de qualité, c’est tout naturellement que le félin a poursuivi. Hélas l’histoire se tasse (les nouveaux vilains ne faisant nullement peur) et le lecteur sombre dans l’ennui. Tigre aurait du s’abstenir de poursuivre avec Dick Grayson.
VO : Superman : Birthright. Contient Superman : Birthright #1-12, Superman/Batman Secret Files 2003 (on ne voit nullement le Bat pointer le bout de son museau d’ailleurs) et The brave and the bold #16. Début et fin décevants, heureusement que le reste reprend, à la sauce contemporaine, les origines du Cryptonien qui s’avèrent très complexes.
VO : Crónica de una muerte anunciada. Marquez est un immense auteur qui en une centaine de pages parvient à produire une œuvre d’une rare densité. Ne vous fiez pas au nombre de pages, c’est plus long qu’il n’en a a l’air. Sur fond d’une histoire de vengeance révoltante car évitable, c’est autant la fatalité que l’insondable bêtise de l’Homme qui sont abordées.
VO : The Dark Tower. Mazette, quelle claque de bonheur littéraire. Plus de 4 000 pages vis-à-vis desquelles je pourrais discourir des heures, sept romans dont l’intensité, crescendo, aborde une foultitude de sujets, La Tour sombre est incontournable avec des niveaux de lecture presque infinis. Putain, il est même arrivé au Tigre de chialer en parcourant quelques chapitres.
L’image de couverture, mélange de culture classique (du style Quasimodo) à qui on affuble des cornes de Minotaure, envoie du rêve. C’est bien l’unique fois que ça arrive dans ce roman, l’histoire d’un ignoble (d’un point de vue plastique) personnage amoureux fou d’une belle gosse n’est ni crédible, ni envoutante. Tout en restant relatif, Nothomb a fait mieux.
Proposez à un homme de changer de voie, et il y a fort à parier qu’il vous pète une durite. C’est ce qui arrive presque au protagoniste principal, écrivain à ses heures. Ce roman, plus que correct, mérite définitivement sa place dans la cour des grands. Après lecture, le titre ne contredirait-il pas le chemin que choisi, en fin de compte, le héros ?
VO : Conte cruel de Manhattan. Voici l’histoire de la belle Florence Evelyn Nesbit (on ne rit pas je vous prie), jeune Américaine qui au début du vingtième siècle a somptueusement défrayé la chronique. Nathalie Ferlut, à l’aide d’illustrations parfaitement adéquates, a su rendre compte d’une époque et d’un état d’esprit caractérisant la riche populace des États-Unis avant la première guerre mondiale.
L’image de couverture parviendrait presque à spoiler en montrant la jeune Leopoldine, personnage qui occupe une place centrale dans ce huit clos de basse extraction que Le Tigre a eu un mal de chien à terminer. Très loin d’être le meilleur roman de Nothomb, dès le début le style qui lui est propre (violence des dialogues) montre ses limites.
VO : white tiger. Un tigre dans le titre d’un roman, comprenez que je ne pouvais laisser passer ce truc sans broncher. Je ne savais pas à quoi m’attendre, et face aux critiques, toutes positives, j’attendais beaucoup du narrateur passé du statut de chauffeur/esclave à riche entrepreneur. Décevant au final, le style m’a hélas insupporté.